En Grande-Bretagne et en Irlande, il peut arriver aux promeneurs, au détour d'un chemin, de découvrir des souches, des troncs ou plus rarement des arbres vivants dans lesquels ont été insérées des pièces par dizaines, centaines ou milliers.
Ceri Houlbrook, dans son essai
The Magic of Coin-Trees from Religion to Recreation, à la fois passionnant et d'un abord relativement aisé pour un néophyte, se penche sur les origines, les significations et le devenir possible de cette étonnante tradition.
Sans prétendre réaliser un inventaire exhaustif, que la nature-même de cette coutume, pouvant être démarrée à tout moment et où que ce soit par n'importe qui, rendrait de toute manière impossible, l'auteure rencensait en 2018 quarante sites où ces arbres à pièces, nommés la plupart du temps coin-trees, étaient visibles, parmi lesquels trente-sept considérés comme actifs, la majorité d'entre eux étant concentrée dans la moitié nord de l'Angleterre.
Si dans certains parcs naturels des panneaux présentent parfois des coin-trees comme étant anciens et incitent les visiteurs à chercher dans leur bois de vieilles pièces, les dates visibles sur ces pièces, minutieusement listées à chaque site par l'auteure et constituant la date la plus précoce à laquelle chacune à pu être insérée, indiquent aux contraire que ces arbres sont pour la plupart des créations récentes. La majorité d'entre eux daterait d'entre la fin des années 1990 et le début des années 2000. le cas le plus ancien attesté remonte au XVIIIe siècle, sur Isle Maree en Écosse, où à proximité d'un puits consacré à saint Maelrubha (également connu sous le nom de Maree), auquel étaient attribuées des propriétés curatives, une souche était utilisée comme autel afin de déposer des pièces en offrande.
Afin d'expliquer cette tradition, l'auteure ne se contente pas de développer le symbolisme attaché à l'arbre et à la pièce, ou de la rapprocher d'autres pratiques adjacentes, comme celle des rag-trees, ces arbres où sont noués rubans et morceaux de tissu, ou celle des très envahissants cadenas des amoureux ; elle évoque aussi les critères matériels concrets ayant permis ou contraint son l'évolution. le fait qu'aujourd'hui l'on préfère laisser un arbre ayant dû être coupé se dégrader dans son milieu naturel plutôt que de l'en retirer, et qu'il est commun d'avoir sur soi des pièces d'une valeur si infime que l'on peut sans regret s'en délester sont peut-être les plus déterminants. D'ici quelques années, la disparition ou du moins la raréfaction de la menue monnaie pourrait conduire à une nouvelle mue et à l'usage de nouvelles offrandes.
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