AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,03

sur 7579 notes
En tant que réquisitoire contre la peine de mort, d'abord rationnel dans la préface puis généreux et poignant dans le roman, le dernier jour d'un condamné est un texte indispensable.

Il nous fait réfléchir à toutes les raisons de ne pas exécuter un homme, fût-il coupable, et ressentir l'angoisse, le désespoir et l'horreur de celui qui sait qu'il va mourir dans la journée, alors que tous les autres, spectateurs de son supplice, bourreaux, juges et autres prisonniers, continueront tranquillement leur soirée...

Pour autant, et aussi convaincue que je sois de la barbarie de la peine de mort, j'ai eu du mal à me passionner pour le texte. Car ce dernier jour semble évidemment bien trop court au condamné, mais aussi par moments interminable, vide, aride et vain... Et Hugo rend si bien cet ennui, cette humeur sombre comme la mort et ce trouble qu'on les ressent à la lecture.

Challenge XIX 8/xx, challenge Petits plaisirs 40/40 et challenge PAL
Commenter  J’apprécie          6410
Victor Hugo utilise différents styles littéraires pour clamer son hostilité à la peine de mort :
- Une longue préface, près d'un tiers de l'ouvrage, véritable essai permettant à l'auteur d'argumenter son opinion. Une argumentation qui paraît un peu naïve aujourd'hui, mais qui a le mérite d'étayer l'avis d'Hugo ;
- Une courte pièce de théâtre où s'affrontent les pros et les antis peine de mort. Pas la meilleure partie de l'ouvrage de mon point de vue :
- Un court roman, entièrement écrit à la première personne, où un jeune condamné à mort nous fait partager ses dernières heures, entre acceptation, abattement et révolte...
Le dernier jour d'un condamné n'est certainement pas la meilleure des oeuvres de Victor Hugo, mais elle a le mérite de prendre date dans un combat qui durera encore un siècle.


Lien : http://michelgiraud.fr/2021/..
Commenter  J’apprécie          630
Six heures, six semaines, six mois : 666 ne serait-ce pas les chiffres du diable ?

Victor Hugo dénonce ici l'absurdité de la peine de mort et son dégoût pour celle-ci. Il relate ici les derniers jours d'un condamné à mort, sans nous dire quel est son crime mais en nous livrant l'horreur des derniers jours qu'ils vivaient.

Ce texte est poignant et aura un effet sur l'avenir car certains pays aboliront la peine de mort afin de rendre hommage à Victor Hugo.
La société qu'elle soit haute ou basse est infâme. Que ce soit celui qui condamne ou celui qui vient assister à la condamnation ils sont au même niveau, car se réjouir de la mort d'un être humain est totalement abject.
Ce condamné qui nous raconte son histoire de sa sentence à ses dernières minutes nous fait passer par de nombreuses émotions.
Il commence par accepter son sort car il ne veut pas être condamné au bagne, puis il se ravise et se remémore des souvenirs heureux de sa vie. Ensuite la vue de sa fille qui ne se souvient plus de lui, lui donne envie de vivre et de s'accrocher à la vie en espérant la grâce. Mais celle-ci ne viendra jamais.
Les conditions dans lesquelles ils vivaient étaient abominables que ce soit physiquement ou psychologiquement. C'était une vraie torture pour l'homme et inacceptable, humainement parlant.

Qui est le plus monstrueux dans cette histoire ? Celui qui a commis un crime et subit cette horreur ou celui qui condamne ou bien celui qui vient assister à cela comme si c'était un passe-temps agréable ?
Le diable est dans le comportement humain et à cette époque il régnait partout. Et surtout tous les jeudis à quatre heures.

Ce texte est un magnifique plaidoyer contre la peine de mort qui au départ n'avait pas été signé par Victor Hugo car il ne l'a fait que quelques temps plus tard quand il a réalisé l'impact que cela produisait. La préface nous mettant en condition pour la suite du texte et nous apprenant aussi les diverses injustices qu'il y avait eu face à cette guillotine de malheur.

Je n'ai pas pu décrocher de ce livre avant la fin tellement j'étais prise par l'histoire.
Victor Hugo a su placer les bons mots afin d'atteindre les gens et dénoncer toute cette horreur.
Lien : https://fantasydaniella.word..
Commenter  J’apprécie          612
Paris , sous Charles X. Je suis condamné à mort.
Comment peut-on prononcer pareille sentence alors qu'il fait soleil et que les fleurs éclatent de leurs couleurs vives ? Mais tous les recours sont épuisés.
Qu'ai je fait ? Je ne parlerai que de la hache, car j'ai demandé du papier, je veux que ma fille chérie de trois ans apprenne l'histoire de son papa qui l'adorait. Il me reste six semaines à passer à Bicêtre, ce château-hôpital-prison, dans un cachot pour les condamnés à mort.
.
Même Victor Hugo, avec sa qualité d'écriture, peut-il ressentir et faire ressentir les impressions d'un condamné à mort ? Ce n'est pas sûr. Mais il a essayé, peut-être moins pour le roman que comme un texte accusant cette peine injuste : j'accuse ... l'homme de tuer l'homme ! En effet, écrit-il dans Bug-Jargal, seul Dieu peut disposer de la vie d'un homme.
Les juges seront jugés : Maurice Druon, dans la bouche de jacques de Molay l'a bien démontré dans sa série "Les rois maudits".
Le voeu d'Hugo ne sera exaucé que plus d'un siècle plus tard, par Robert Badinter.
.
Pour ma part, c'est une relecture. J'avais été impressionné la première fois. Là, j'ai souligné certains détails qui m'avaient peut-être échappé.
1 ) le forçat qui vient remplacer le condamné sert sans doute de modèle au portrait de Jean Valjean, trente ans plus tard.
2 ) le condamné se demande ce que fait l'âme, une fois la tête tranchée : va t-elle avec le corps ou avec la tête... Les vrais médiums peuvent maintenant répondre à cette question : )
Commenter  J’apprécie          594
Quelle âme généreuse avait Victor Hugo !

Le Dernier Jour d'un condamné, c'est un dernier souffle de vie, une main tendue vers l'abominable, un dernier pardon …
A travers ce court roman, Victor Hugo se fait le chantre de ces derniers instants, y instillant toute sa compassion, son humanité, son empathie.
Quoi de plus fort que de se mettre dans la peau de celui qui va mourir...

A l'heure où les actes les plus atroces se perpétuent, écorchent des vies innocentes, à l'heure où un sentiment de colère et d'horreur gagne nos coeurs, à l'heure où le mot « pardon » ne trouve plus sa juste place, il convient de trouver cette force de bonté et d'abnégation pour faire face à l'incompréhension et à la rancoeur qui nous animent.

Lire ou relire « Le Dernier Jour d'un condamné », magnifique plaidoyer contre la peine de mort peut nous y aider.

Victor Hugo ne cherche pas à disculper l'homme condamné. D'ailleurs, il ne nous dit rien de son crime, effleure à peine son histoire. Il n'est pas là pour jouer les avocats du diable. Il cherche tout simplement à se mettre à la place de cet homme, de ressentir ses dernières émotions, cette angoisse qui l'étreint face à la mort. Un homme qui demande grâce de la vie. Un homme qui pourrait être n'importe quel condamné à mort.

« Je veux bien des galères. Cinq ans de galères, et que tout soit dit, - ou vingt ans,- ou à perpétuité avec le fer rouge. Mais grâce de la vie !
Un forçat, cela marche encore, cela va et vient, cela voit le soleil. »

Si Victor Hugo dénonce avec force et émotion la peine capitale et les conditions de détention de l'époque, ne comprenant pas comment la société se permet d'infliger en toute impunité ce qu'elle-même reproche à l'exécuté, il s'indigne également contre cette foule assoiffée de sang, qui s'amasse en Place de Grève, les jours d'exécution.

Un roman, court mais intense, qui, à sa parution, survient comme un pavé dans la mare mais qui reste malheureusement d'actualité.
Dixit Amnesty International : « En 2015, nous avons recensé plus de 1 630 exécutions dans 25 pays. Ce chiffre est le plus important depuis 1989. Et il ne tient pas compte des statistiques de la Chine qu'il est impossible d'établir avec certitude alors que ce pays exécute de manière massive. »





Commenter  J’apprécie          586
Oh la la, que d'émotion ! Sauf qu'on ne joue pas à la baballe. C'est juste que cette relecture me ramène près de quarante cinq ans en arrière. Les radios omniprésentes vomissaient des jeux débiles comme la valise ou les grosses tête et une guimauve musicale affligeante. Nous étions une poignée d'adolescents acnéiques à défiler le poing en l'air brandissant des livres comme celui-ci ou "l'exécution " de Robert Badinter. La foule réclamait la tête de Patrick Henry. La loi du talion était la règle et gare à ceux qui étaient contre. le rasoir national les guettait. Certains réclamaient même de rétablir les exécutions en place publique, spectacle, pop-corn et esquimaux, cartes postales souvenirs et badges cocardiers. On croyait qu'on n'y arriverait jamais mais nous lisions et relisions tous ces livres qui nous confortaient, nous permettaient de jeter des arguments massues à la face des partisans de la guillotine.
Pourquoi vient-il nous emmouscailler aujourd'hui, la peine de mort est abolie en France depuis plus de quarante ans. En France oui, mais on exécute chaque jour des femmes et des hommes aux quatre coins de la planète même dans des pays qui bombent le torse en se qualifiant de démocratie.
Alors ce livre publié en 1829 reste d'une actualité effrayante. Sa force ne réside pas dans des statistiques ou de savantes démonstrations mais en nous immergeant dans les dernières heures d'un homme qu'on va mener à l'échafaud, en nous invitant à nous identifier à lui et c'est particulièrement réussi. On ne saura jamais ce qu'il a fait, on cheminera juste dans ses pensées et ses souvenirs jusqu'à ce qu'ils deviennent nôtre.
J'ai volontairement choisi l'édition folio + LYCÉE, un peu pour reprendre contact avec la réalité de mes 16 ans et pour l'ensemble des développements autour de ce texte.
À l'heure où les partisans de la peine capitale redonnent de la voix, encouragés par des portes paroles populistes et nationalistes, il me semble important de relire ce texte (et d'autres plus contemporains) afin de ne pas baisser la garde. Depuis quelques temps, le lynchage n'est jamais bien loin et certains ressortiraient le goudron et les plumes sans état d'âme. Rien n'est jamais acquis.
À lire et relire.
Commenter  J’apprécie          567
Un condamné à mort raconte ses derniers jours cauchemardesques dans l'attente de sa fin cruelle...

Victor Hugo surprend par son style relativement contemporain, toujours facile d'accès bien que recherché, et surtout foudroyant de modernité, presque deux cents ans après la publication de cet ouvrage. Il aborde le thème difficile de l'homme sur le point de mourir. Mais pas n'importe quel homme ni n'importe quelle mort : un condamné à la guillotine. Un criminel.
Le récit oscille entre ces deux idées éthiquement compliquées : l'homme a beau avoir commis un crime il n'en reste pas moins un humain doué de raison empli de craintes ; mais un malfaiteur, sûrement meurtrier puisque le crime n'est pas précisé, ne mérite sans doute pas qu'on le respecte dans sa dignité. Deux sentiments très violents et opposés que tout un chacun ne peut s'empêcher de ressentir au moins une fois. (Sans compter l'épineuse question de l'être humain qui ôte la vie et se la voit ôtée par un autre sous le sceau de la Justice, mais Hugo ne rentre pas trop dans cet aspect moral de la condamnation.)
Si le récit démarre sur une note somme toute prévisible de torture mentale dans l'attente de l'application de la sentence, certaines scènes soulèvent quelques profondes idées manichéennes, comme lorsqu'un bagnard prend la belle redingote du détenu, lui qui n'en aura plus besoin dans quelques heures. le raisonnement est logique, mais le narrateur se sent dépouillé, mécontent. Cette redingote était un peu un symbole d'identité, d'humanité, et sûrement la lui enlever le ramène à sa propre vie qu'on lui retire. On lui vole tout, il n'a plus rien, et c'en est trop. L'humain contre la logique, un exemple puissant...
Hugo insiste également sur la part surréaliste du statut du condamné qui vit comme en transparence face aux vivants : l'architecte qui lui promet une meilleure cellule dans six mois alors qu'il sera exécuté le lendemain, ou quand, lors de son transfèrement, l'huissier joyeux ne comprend pas son air morbide et résigné, converse de la pluie et du beau temps et se plaint de perdre son tabac à un homme qui va perdre la vie. Hugo dresse ainsi le portrait de plusieurs personnages indifférents au devenir d'autrui, mais surtout au devenir de criminels, indifférence banalisée sans aucun doute par un côtoiement quotidien.
Il en va de même pour ce prêtre qui récite des litanies plus qu'il ne cherche à accompagner réellement et de manière personnalisée le condamné...
Il y a encore ce geôlier qui le considère déjà comme un fantôme et traite de manière outrageusement légère le sort du détenu.
Hugo, en vérité, ne fait pas vraiment de portrait caricatural : il montre les faiblesses du genre humain, sa capacité à faire extraction, à oublier le malheur d'autrui. Aussi bien pour son propre bien que par manque cruel d'empathie. C'est là, sans doute, la force de cette nouvelle, plus que l'énumération même des sentiments terribles par lesquels le narrateur passe. La plus poignante étant certainement quand le condamné voit sa mort non plus comme une délivrance mais comme une guérison, comme si sa situation en geôle équivalait à la maladie. Voir la mort comme une sortie agréable dans cet outil grotesque et barbare qu'est la guillotine, c'est une pure oxymore symbolique et métaphysique...
Dans le témoignage du bagnard qui prend la redingote du narrateur, Hugo dévoile également l'idée que la récidive est souvent générée par le rejet d'un ex-taulard par la société. Un homme qui a fait une erreur et souhaite se racheter se retrouve dans la position délicate de paria, et ne trouve aucune autre solution que de revenir au crime pour survivre. La notion de seconde chance n'existe tout simplement pas, et à l'inverse la catégorisation est maîtresse en cette vie...
Au-delà des réflexions qui peuvent traverser l'esprit d'un condamné à mort avant son exécution, c'est bien les tréfonds de l'âme humaine bestiale et égoïste qu' Hugo sonde à travers les yeux d'un homme qui les fermera bientôt à jamais.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
Commenter  J’apprécie          544
Dès le début, j'ai été happée par l'écriture de Victor Hugo, par sa fluidité et surtout par la justesse de chaque mot.
Qu'importe le crime commis par le condamné, qu'importe son nom, l'essentiel n'est pas là.
Victor Hugo nous invite dans la tête d'un condamné pour partager avec nous ses dernières pensées.
Le texte est poignant, chaque sentiment est décrit avec puissance, il vous submerge et vous prend aux tripes.
Le sort de ceux qui restent est également abordé: la famille du condamné ne pourra avoir d'autre destin que le déshonneur et la misère.
Le dernier jour d'un condamné est un plaidoyer contre la peine de mort, contre la barbarie de l'homme et l'indécence d'un peuple en délire devant un tel acte.
Malheureusement, le sujet de ce livre, pourtant paru en 1829, est toujours d'actualité dans certains pays et pousse donc à la réflexion.
Commenter  J’apprécie          520
En racontant ses derniers jours avant son exécution, un condamné, anonyme, mais coupable, en relate les souffrances. Victor Hugo aurait pu choisir la facilité et nous faire pleurer sur le sort d'un innocent. Il n'en est rien, le condamné anonyme est bel et bien coupable.

La guillotine cherchait à éviter trop de souffrances physiques, mais le malheureux se souvient d'une exécution où le bourreau a raté son premier coup, son deuxième puis son troisième. Un apprenti se décide à achever le prisonnier. Brrrr ! Âmes sensibles, s'abstenir.

La souffrance morale, c'est de penser à ceux que le condamné laisse derrière lui.
Et l'attente, bien sûr.

Distraction dont le condamné se serait peut-être passé : la mise aux chaînes des forçats.
Une question qui hante : quel est le plus malheureux ? Celui qui est condamné à mort et dont les souffrances vont prendre fin ou celui qui conserve la vie ainsi que des années de tourments.
Vous n'aurez pas de réponses.

Lien : https://dequoilire.com/le-de..
Commenter  J’apprécie          510
Victor Hugo a vingt-sept ans lorsqu'il publie Le Dernier jour d'un condamné. Je suis toujours frileux à mettre en avant l'âge de celles et ceux qui ont écrit des chefs d'oeuvre, comme si cela devait étonner. Camus avait vingt-trois ans lorsqu'il écrivit Noces. Quant à Rimbaud, n'en parlons pas, ce jeune surdoué était déjà à la retraite de la poésie à cet âge-là. Cependant, l'âge auquel Victor Hugo écrit ce récit a une importance, car il vient d'être confronté, quelques jours avant le démarrage de l'écriture de ce texte, à l'exécution en Place de Grève d'un jeune homme qui a, à peu de chose près, le même âge que notre homme de lettres. Et dans son enfance, Hugo a assisté à plusieurs exécutions capitales dont il ne s'en est pas temis. Cela ne peut plus attendre.
Le roman est une narration. Le condamné à mort nous parle, à voix basse, tandis qu'il écrit, durant les vingt-quatre dernières heures de son existence, le journal dans lequel il relate ce qu'il a vécu depuis le début de son procès jusqu'au moment de son exécution, soit environ six semaines de sa vie. C'est un long monologue dont on connaît par avance l'issue fatale.
Nous ne savons rien de cet homme condamné, ni son nom, ni son crime, mis à part la phrase : « moi, misérable qui ai commis un véritable crime, qui ai versé du sang ! ». Nous suivons l'homme, au plus près de son angoisse en tant que condamné à mort et ses dernières pensées, les souffrances quotidiennes morales et physiques qu'il subit, nous découvrons aussi les conditions de vie des prisonniers qui sont rudes. L'homme, au plus près de sa mort prochaine, exprime ses sentiments sur sa vie antérieure et ses états d'âme.... En faisant le choix d'utiliser la première personne du singulier, Victor Hugo veut transmettre au lecteur l'angoisse ressenti par le condamné.
Pourtant, Victor Hugo n'est pas dans la recherche de l'effet. le récit est froid. Au fond, il révèle peu de choses sur cet homme. D'ailleurs, l'opinion publique accueillera mal ce récit, ne comprendra pas.
Toute sa vie durant, Victor Hugo va lutter contre cette ignominie, cette tâche sombre dans la constitution de notre société. Tout d'abord dans ses livres et celui-ci en est le principal plaidoyer littéraire, mais forcément aussi politique, parce que le sujet est politique. En effet, ce texte constitue un magnifique plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort. Plus tard, on retrouvera cet engagement dans d'autres oeuvres de l'auteur comme Claude Gueux, mais aussi dans l'Homme qui Rit, dans une des premières scènes de l'ouvrage où il décrit avec effroi la scène quasiment dantesque d'un gibet où pend un homme, qui vient s'offrir aux yeux ébahis de Gwinplaine, encore enfant. Derrière le paysage, un ciel lugubre, noir de corbeaux, accentue l'angoisse et la tragédie de cette vision...
Sur l'âge de Victor Hugo, s'il faut vraiment insister sur ce point, il s'agit donc ici d'un roman de jeunesse, soulignant, déjà avec une conviction lucide, la révolte face à la cruauté et l'injustice de ce châtiment suprême. Plus tard Victor Hugo portera ce sujet de manière obsédante et véhémente jusque dans l'hémicycle de l'assemblée nationale en farouche abolitioniste de la peine de mort.
Le roman n'est pas sorti de son imaginaire. Comme je l'ai évoqué précédemment Victor Hugo s'est nourri de scènes qu'il a vécues, peut-on appeler cela spectacles, les gens venaient assister aux exécutions capitales comme on se déplace aux jeux du cirque, au stade, à la corrida... Qui a-t-il au fond de différent aux yeux de beaucoup ? Victor Hugo s'en est indigné. Ici c'est une indignation sans relâche qu'il veut nous communiquer, il veut nous convaincre, il nous prend par les vêtements, il nous prend par le bras, pour peu il nous prendrait par le col, à la gorge, pour venir nous placer au plus près de cet homme, dans son haleine, dans sa respiration, dans ses battements de coeur, cet homme qui va mourir bientôt, la tête tranchée d'un coup et qui a peur. « Regardez cher lecteur, cet homme aura de son vivant bientôt la tête tranchée d'un coup ».
Il faudra attendre plus d'un siècle et demi pour que notre cinquième République lave enfin cet affront, cette tâche sombre faite à la République. Car la France des Lumières, la France des droits de l'homme, la France terre d'asile, a trimbalé cette guillotine, la veuve comme on disait autrefois, tout d'abord en place publique, puis plus tard dans l'arrière-cour glauque des prisons, et cela jusqu'en 1981, c'est-à-dire, presqu'avant-hier !
Robert Badinter n'eut de cesse de crier à la barre des tribunaux, devant les jurés : « vous ne vous rendez pas compte de ce qu'on vous demande de faire. La guillotine, qu'est-ce que c'est ? Prendre un homme vivant et le couper en deux morceaux ». Il vint le crier, lui aussi à la tribune de l'hémicycle devant l'assemblée nationale, au même endroit où 133 ans plus tôt, Victor Hugo disait : « [...] Messieurs, il y a trois choses qui sont à Dieu et qui n'appartiennent pas à l'homme : l'irrévocable, l'irréparable, l'indissoluble. Malheur à l'homme s'il les introduit dans ses lois. Tôt ou tard elles font plier la société sous leurs poids, elles dérangent l'équilibre nécessaire des lois et des moeurs, elles ôtent à la justice humaine ses proportions ; et alors il arrive ceci, réfléchissez-y, messieurs, que la loi épouvante la conscience [...] ».
La force du récit est de ne pas savoir la raison véritable, de prendre parti pour la cause de la peine... Il n'est pas question d'entrer en empathie avec le condamné. Victor Hugo n'en n'a que faire... C'est ici la force de son propos, ne pas laisser entrer l'émotion, le doute sur l'innocence ou la culpabilité de l'homme. Peu importe. D'ailleurs, à un moment du récit, le condamné reconnaît que c'est sans doute justifié au regard de ce qu'il a commis... Victor Hugo nous convoque seulement pour nous amener à porter un regard lucide sur la peine de mort. Et c'est efficace.
C'est un texte indispensable, intense et solaire, dont on n'en sort pas indemne.
Commenter  J’apprécie          494





Lecteurs (26930) Voir plus



Quiz Voir plus

Victor Hugo (niveau facile)

Lequel de ces livres n'est pas de Victor Hugo ?

Les Misérables
Notre-Dame de Paris
Germinal
Les Contemplations

10 questions
1244 lecteurs ont répondu
Thème : Victor HugoCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..