Un polar ! Un des rares que je lise… Et un auteur que je n'ai jamais lu et dont je n'ai même jamais entendu parler. Soyons honnête : sans le challenge ABC, jamais je n'aurais emprunté ce livre.
Alors, bonne ou mauvaise découverte ?
Bonne, assurément. le début était certes un peu longuet, mais au bout d'une cinquantaine de pages, j'étais lancée et plus rien ne m'arrêtais. Pour plusieurs raisons : parce qu'il y a du suspense, des rebondissements assez réguliers pour relancer l'intérêt quand il s'essouffle, et surtout, des personnages auxquels je me suis attachée.
Mes préférées : Karen et Cheryl. La première a son petit caractère parce qu'elle est frustrée de n'avoir pas pu faire les études qu'elle désirait (Will en fait les frais au début du livre). À raison, quelque part : elle est prise de haut par tous ces médecins qui ne la voient que comme une épouse alors qu'elle a eu un résultat nettement meilleur qu'eux à l'examen d'entrée.
Lors du kidnapping, elle a tout d'une victime (sa fille enlevée, elle est entièrement soumise aux désirs de Joe), mais elle résiste. J'avais peur qu'elle ne se laisse maltraiter sans réagir (ce qui m'aurais particulièrement agacée), mais je me suis trompée. Tant mieux parce que j'étais extrêmement empathique : j'étais littérairement avec elle quand elle se rebellait, et je bouillonnais de rage quand elle se laissait faire. Karen est un personnage qui ne tombe jamais dans le pathos ; et si elle se décourage parfois (ce qui est normal et humain dans ce genre de situation), c'est pour mieux remonter la pente.
Personnellement, je ne sais pas ce que c'est que d'être mère. Mais si c'est être capable de faire tout ce qu'elle a fait, je me demande franchement si je suis à la hauteur.
Cheryl, elle, est un personnage très nuancé. D'un côté, c'est une vraie garce (elle participe volontairement à l'enlèvement d'une enfant de cinq ans, merde !), de l'autre, je n'ai pas pu m'empêcher de la plaindre. Son histoire m'a glacé le sang, d'autant plus que, même si elle est fictive, je sais que ce sont des choses qui arrivent. À des personnes qui n'ont rien demandé et qui ont juste manqué de chance. Qui auraient pu devenir des gens bien, mais qui n'en ont pas eu l'occasion.
Peu après, la jeune fille change de camp. Elle ose défier l'autorité de son partenaire, qui la terrifie, pour sauver l'intégrité d'une famille. À ce moment de l'histoire, je me suis dit qu'elle valait le coup qu'on lui donne une fin heureuse et je me suis clairement attachée à elle. Mais… Je vous parlerai de la fin plus bas.
Il y en a un que j'ai adoré détester : Joe. Il est si viscéralement mauvais que c'est un plaisir que de voir Karen résister et le surprendre, et de voir que son plan est mis à rude épreuve par les époux
Jennings. Il n'est pas foncièrement mauvais, quand on y réfléchit (il aime sa mère à la folie et il a un code d'honneur : le gosse s'en sort toujours), mais il est buté comme un âne
et s'est mis dans l'idée que Will était responsable de la mort de sa mère, et qu'il fallait le faire payer.
En revanche, Zwick est à la limite de la caricature. L'auteur le décrit comme était l'image même de l'autosuffisance, du gars qui agit avant et réfléchit après. Quelque part, il est l'incarnation des angoisses des proches des kidnappés, qui veulent juste que l'otage s'en sorte. Lui, il veut juste capturer le terroriste, et accessoirement sauver l'otage.
Je n'ai rien à redire pour l'écriture. Comme je l'ai expliqué plus haut,
Greg Iles maîtrise le suspense et les rebondissements. Il a su relancer mon intérêt quand ce dernier flanchait et je n'en demande pas plus. Je n'ai pas l'habitude de lire du polar ou du thriller, donc je ne fais pas très bien la différence entre un bon et un mauvais roman. Il y a juste un moment où j'ai décroché sans signe avant-coureur : quand il est huit heures du matin, juste avant le dénouement final. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai perdu tout intérêt pour ce livre d'un seul coup. Je voyais qu'il restait encore plus d'une centaine de pages, et je crois que je me disais que ça allait être plutôt long, comme dénouement.
Au final, non. C'était même plutôt court et franchement inattendu (voire même capilotracté, parce que je ne sais même pas si c'est humainement possible, de faire ce que Will a fait, avec son avion). C'est tellement écourté, même, qu'on ne sait pas ce que deviennent les personnages secondaires.
Karen est dans un état critique et on ignore si elle va survivre (enfin, SI, bon d'accord, les dernières phrases sont tellement pleines de positivisme qu'elle ne peut QUE s'en sortir, mais c'est pas dit explicitement), on ne sait pas si Will tiendra sa promesse faite à Cheryl (le dernier commentaire à son égard, celui qu'il adresse au FBI laisse même présager qu'il la laissera tomber, comme elle s'y attendait), et dans les dernières lignes, il n'est absolument pas question de la jeune femme, mais uniquement de la famille retrouvée. Elle est passée à la trappe. Tout comme Huey. Celui-là, on l'abandonne, comme ça, au bord de l'autoroute, à côté du cadavre de son cousin qu'il essaie de réveiller. Mais enfin, il va devenir quoi, ce pauvre garçon ? Il a tué Joe pour sauver Abby, ça va laisser des séquelles, non ? Il va atterrir dans un hôpital psychiatrique ? Travailler pour la famille Jennings ? Reverra-t-il la fillette qu'il a sauvée ? Ses parents lui montreront-ils leur reconnaissance, ou ne se soucieront-ils plus de son sort ?
La deuxième option est celle qui se dessine le plus…
« de toute manière, ils se sont retrouvés, ils s'en foutent, du reste » est la conclusion de ce livre. C'est décevant…
Mais à part une fin clairement bâclée, c'est un livre que j'ai pris plaisir à lire et j'en retire un bon souvenir.