Citations sur La péninsule aux 24 saisons (130)
Est-ce Buson qui a chanté l’« aveuglante lumière de la lune sur les rochers de l’hiver » ? On croit entendre le craquement de la lumière sur les branches, sur la moindre pierre. Les ombres noires dans la forêt, la rangée de petits arbres devant l’entrée, la route qui passe devant la maison en plan incliné, tout déborde du crépitement silencieux des éclats tranchants du clair de lune. Moi, je me penche sur la profondeur des ténèbres silencieuses où ni voiture ni âme ne passe, et mon oreille savoure l’ineffable plaisir d’être absorbée par la densité du silence.
C'était comme si je me trouvais sur une plage privée. La mer, les rochers, le ciel sans nuages, tout le paysage m'appartenait, il était à moi seule. En même temps, ce monde habité seulement par le bruit des vagues, entouré de falaise, me semblait une terre appartenant aux temps anciens.
Je m'étonne moi-même de la quantité de livres contenant des photos que je sors des cartons, des livres pleins de blancs. A peine quelques volumes remplis de textes imprimé serré. Les journées que je passe dans la péninsule sont comme les blancs de ma vie. J'en ai par dessus la tête des journées remplies du matin au soir de choses à faire. Je voudrais ici autant que possible vivre des journées en blanc. Rejeter les idées compliquées qui déteignent sur ce blanc. Cette prise de conscience m'a sans doute fait choisir des livres aérés
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Ce que le système économique avait dédaigné, laissant les champs à l'abandon, nous le redécouvrions, autant de produits frais que nos mettions sur la table sans attendre. Quel luxe ! Quoi de plus magnifique que l'optimisme invincible qui permet d'être insouciant du lendemain si l'on a aujourd'hui de quoi se nourrir, la certitude que demain aussi sera sans problème ?
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Alors que ma tête retentissait d'une musique splendide, autour de moi tout n'était que silence. La lune était d'une clarté coupante. L'astre qui s'amenuisait de jour en jour indiquait distinctement, dans le contour de son arc, le temps disparu. La lune retrouverait de nouveau sa plénitude, mais le temps dans lequel vivaient les hommes se perdait définitivement, comme le sable file entre les doigts.
Des choses de la mer arrivent sur le rivage. Où vont-ils, ces êtres vivants dont on peu apercevoir le mouvement lorsqu’ils traversent furtivement la forêt qui fait suite à l’estuaire ?
Les saisons sont au coeur de notre vie quotidienne, ce ne sont pas quatre mais vingt-quatre saisons qui scandent nos journées. Les choses changent, les choses passent, et c’est bien ainsi. Ce n’est pas l’homme qui ajoute ou qui retranche, c’est la nature.
Même des bribes de souvenirs, les morceaux d'un vase, d'une assiette ou d'un bol cassés sont imprégnés du temps, ils portent la marque des jours où ils étaient vivants, car utilisés. Les vieilles tuiles noires rappellent la pauvreté de l'ancienne maison, la chaleur du soleil qui gonflait matelas et édredons, le bol au bord ébréché qui rappelait sans nul doute à ma mère l'odeur de la cuisine où elle s'affairait en rentrant de son travail. Elle ne disait rien mais son regard qui allait d'un objet à l'autre cachait mal l'ardent désir de retrouver ce temps si lointain déjà.
Je te conseille d’oublier, oui, oublie les morts. Tu devrais ne fréquenter que les gens qui vivent. Et vivre pour toi-même, autant que tu peux
J’en ai par-dessus la tête des journées remplies du matin au soir de choses à faire. Je voudrais ici autant que possible vivre des journées en blanc. Rejeter les idées compliquées qui déteignent sur ce blanc.