AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,32

sur 76 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une visite dans une île de l'île car dans ce lieu, on ne parle pas de continent. Une rencontre qui semble si "vraie" de l'Islande, d'hommes et de femmes enracinés dans leurs terres.... Surprenant !
C'est un vrai livre sur l'Islande, écrit par un vrai islandais, qui nous offre la découverte d'une civilisation méconnue, à la fois par les chemins de l'Histoire, des légendes mais aussi par la description de la vie quotidienne dans les années 60 sur ces chapelets d'îles perdues dans l'océan plutôt hostile.
Nous suivons la narration de deux histoires adroitement mêlées, la première, celle d'un meurtre que l'on cherchera à élucider, la seconde par la découverte du Flateyjarbók (le plus long des manuscrits islandais rédigé de 1387 à 1394, le plus richement décoré et l'un des plus intéressants. Il se compose de plusieurs sagas qui contiennent elles-mêmes un grand nombre de þættir, de poèmes et de courts textes historiques).
Première difficulté, celle des noms, pas facile de s'y retrouver, s'appeler gudvaldur gudvaldsson, aller à Brjánslækur ou à Stykkishólmur, mais la lecture est un sport intellectuel parfois exigeant.
Après, l'Histoire de l'Islande toujours surprenante (état libre de 930 à 1264, puis allégeance au roi de Norvège et en 1380 annexion par le Danemark jusqu'en 1944). Une réalité dont il faut tenir compte pour comprendre les implications entre ces pays nordiques.
J'ai complété ma culture politique avec l'affairisme (merci Wikipedia ! "L'agrarisme n'est ni du libéralisme ni du socialisme. En effet, il s'est construit en réaction à une double conjoncture de modernisation de l'agriculture et d'affaissement des prix agricoles (entre 1873 et 1895). Mais l'agrarisme est aussi tombé dans un anticapitalisme parfois primaire, notamment à cause de son mépris pour la ville, et dans un antisémitisme parfois explicite et virulent, jouant un rôle dans la diffusion du cliché du Juif comme homme d'argent et ennemi des campagnes. Il prône aussi le « retour à la terre » pour lutter contre les débuts de l'exode rural et favoriser le retour aux "vraies valeurs" traditionnelles").
Enfin beaucoup plus léger, les curiosités culinaires islandaises : manger des ris de macareux aux pommes de terre avec du beurre fondu, ou des oeufs de mouette tridactyle au plat, boire du bouillon de ces malheureux goélands à manteau noir, goûter aux oeufs de sternes tout juste pondus, de curieuses recettes d'accompagnement des restes car avec, par exemple, un agneau retrouvé noyé, on fait un pâté maritime : faire bouillir du pâtée de viande et de graisse. Quand il a été bien salé et ramolli après lui avoir fait rendre son eau, c'est un mets délicat. Très appétissant n'est ce pas ?
Pour finir, je ne risquerai pas ma vie en vous dévoilant ou en recopiant la clé de résolution du poème :
U T S E ....
E N I U ...
..... T S I D, il faut lire ce livre car c'est une belle rencontre avec un monde attachant et la résolution des meurtres est, elle aussi, surprenante.
Commenter  J’apprécie          160
Retour aux polars ethnologiques alors qu'une dépression revient sur nos côtes. Après l'anticyclone steppique ensoleillé de l'Est avec Tchekhov, direction les îles du Nord-Ouest, avec une enquête islandaise. Et je vous vois venir, encore un polar glauque sanguinolent au pays des volcans obscurs ?
Que nenni, c'est un voyage à la découverte des islandais de souche, dans les années soixante, sur une petite île plate de l'Ouest, Flatey, connue depuis le Moyen-Age pour une énigme non résolue.
Des légendes Vikings consignées dans un livre, des codes secrets à déchiffrer, ne serait-ce point plutôt à classer dans la Fantasy ?
Non, non, tout est véridique, l'île existe vraiment, deux kilomètres de long sur cinq cents mètres de large, de quoi y loger une poignée d'habitants, liés au monde de la mer.
D'accord, mais ce manuscrit richement décoré racontant les razzias des Vikings, c'est de la pure invention pour enjoliver l'énigme policière, n'est-il pas ?
Mais non, le Livre de Flatey existe vraiment, il se trouve depuis 1971 à la maison de la culture de Reykjavik.
Ah ! donc, deux histoires en une, une enquête criminelle du vingtième siècle avant la recherche d'ADN, agrémentée d'une référence à l'histoire du pays, par un parchemin rempli d'énigmes introuvables ? Je suppose qu'il y a un lien entre les cadavres trouvés sur Flatey et la recherche du code secret caché dans les pages du manuscrit ?
Tout juste, car à cette époque, en l'année 1960, le livre en question se trouve à la bibliothèque du village.
Oh, je suis "flatté" de cette découverte, mais ça nous dit pas qui va gagner, la police chargée de l'enquête ou le journaliste à la recherche de l'énigme ?
Et bah, dites, croyez tout de même pas que je vais vous dévoiler tout le livre ! Si le fils d'Ingolf, Viktor Arnar pour les intimes, l'a écrit, c'est pour qu'on le lise, voilà tout.

Même qu'il y a eu une série télé réalisée il y a quatre ou cinq ans à ce sujet, c'est donc que ça tient la route, ou plutôt la mer.
Sur une île isolée, les pêcheurs ont la part belle évidemment, même que certains qui n'ont pas le même accent se transforment en pécheurs, personne n'est parfait, peu de distractions sur un si petit périmètre, alors ça épie, ça picole, ça bouffe du ris de macareux, ça cause, ça se tutoie avec tout le monde, et ça reste en vase clos. Alors, difficile de démêler l'écheveau, ou plutôt les oiseaux, marins, pas toujours marrants, qui peuplent les environs. Difficile aussi de prononcer les noms des personnages et des lieux, écrits en signes diacritiques, ce qui ajoute une difficulté supplémentaire, il faut s'accrocher, mais quel plaisir !
L'enquête avance tranquillement, pour mieux profiter de la vie des autochtones et de leur mode de vie traditionnel, bien loin de nos préoccupations stressantes. L'auteur nous renseigne aussi sur l'histoire de l'Islande, jeune pays qui fut dominé par les Norvégiens et les Danois. L'alternance entre les sagas vikings du manuscrit et la recherche des coupables maintient le suspense et la tension, au point que l'énigme est aussi celle de l'enquête policière, perdue parmi les eiders et leur duvet, les phoques et leur graisse, les vieux perdus par leur mémoire défaillante ou l'interprétation de leurs rêves.
Un dépaysement salutaire, sur une île qui n'est pas sans me rappeler celle des chasseurs d'oiseaux de Peter May. Hébrides ou Islande, le même climat, les mêmes légendes, les mêmes habitants plus heureux en iliens qu'en découvreurs du monde agité, malgré des conditions de vie difficiles.
Comme quoi on peut écrire un polar islandais sans terreur gratuite. Une bien jolie surprise que cet auteur relativement méconnu car peu traduit encore.
Commenter  J’apprécie          131
Traduit par Patrick Guelpa.
Il fait chaud aujourd'hui, donc je vous emmène vous rafraîchir en Islande, plus précisément dans le nord ouest de l'île de feu et de glace, sur l'île de Flatey, dont le nom, en islandais signifie "île plate" (merci au traducteur pour cette précision !). Pas mal comme voyage, non ?
Nous sommes en 1960, au mois de juin. Alors que le vent souffle de l'est dans le Breiðafjörður, le petit Nonni, parti en mer avec son père et son grand-père, s'en va soulager se décharger d'une envie pressante derrière les rochers, au grand dam de son père qui lui hurle que "maintenant, les phoques vont sentir [son] odeur pendant des semaines" ! En tout cas, ce que les phoques n'ont pas encore vu, c'est ce cadavre en anorak vert, gisant-là depuis un moment, avec comme voisins, un huîtrier pie et deux eiders femelles. Dans ce coin perdu, on a plutôt l'habitude de retrouver des carcasses de moutons ou de grands phoques gris qui se sont noyés. Un cadavre qui va perturber la quiétude de ce golfe perdu, parsemé d'îles habitées ou inhabitées, en particulier l'île de Flatey, au nom rendu célèbre par L Histoire, celui du livre de Flatey, un mythique manuscrit de sagas, qui contiendrait "une énigme irrésolue en quarante questions".
Suite à la découverte du cadavre qui fait beaucoup jazzer, on envoie Kjartan, le sous-préfet, mener l'enquête. C'est un jeune homme de Rekjavik qui ne connaît pas du tout la région et y va à reculons, d'autant plus qu'il n'est pas versé dans les enquêtes à cadavres ! Il est accueilli par le bourgmestre de Flatey, Grímur (en vrai il s'appelle Elliðagrímur Einarsson : j'adore !) et par l'instituteur Högni. Ils seront rejoints par Þormóður Kràkur, le sacristain.Voici pour les principaux personnages du roman, qui vu comme ça pourrait faire penser à Clochemerle. :)

Je ne vais pas vous raconter l'histoire et je vais vous parler de l'ambiance de ce roman noir, parce que je pense que c'est le principal intérêt de ce livre : Viktor Arnar Ingólfsson vous immerge pendant une semaine, du 1er au 8 juin 1960, dans la vie des gens de Flatey. En plus du dépaysement, il y a un bond dans le temps, mais pas de 50 ans, de bien plus : c'est vraiment l'impression que j'ai eue. Presque une plongée dans le moyen âge (j'exagère à peine) parce que la vie est rustique dans ce coin, dangereuse à cause de la météo où naufrages et tragédies ont longtemps été le quotidien des insulaires. Et puis à cause de ce fameux livre, évidemment.
L'écrivain donne sa plume à la nature tout au long du récit et ça c'est un vrai bonheur. Vous vivrez au vent, avec les mouettes tridactyles, les eiders, les goélands noirs, les phoques. Et la nature, nous la retrouvons aussi beaucoup dans notre assiette : un vrai voyage gastronomique car les repas des îliens squattent les pages. Ris de macareux, soupe de macareux, raie bouillie, pâté maritime, oeufs de mouettes au plat. Et le mörflot, "graisse de mouton fondue que l'on consomme généralement avec du poisson". Même Kjartan, notre enquêteur de la "ville", n'a pas l'habitude de cette nourriture, et il en est tout stupéfait !
Un petit passage qui vaut son pesant de cacahuètes :

"Un jour, j'ai connu quelqu'un qui ne mangeait pas de phoque, ni de cormoran, et le plus drôle c'est qu'il mangeait du poulet et qu'il trouvait ça bon."
Quelle idée d'aimer le poulet, quoi ! ;)
Kjartan devra manger du phoque pour faire plaisir à son hôte : un dépaysement gastronomique pour cet homme de Rekjavik ! Alors pour nous, Français, imaginez un peu...

Et peut-être que si vous buvez trop de brennivín (eau de vie de pomme de terre), vous pourrez voir des alfes (j'ai bien dit des alfes, "elfes étant une déformation ultérieure, populaire et publicitaire", qui "sont les esprits des morts, des esprits de fertilité-fécondité qui vivent dans les rochers".

Si vous voulez "bouger", sachez qu'il faut prévoir car le bateau postal ne passe qu'une fois par semaine et qu'il n'y a pas d'autres moyens de se déplacer (sauf si on est propriétaire d'un bateau).
Pour passer le temps, vous pouvez faire un tour à la bibliothèque de l'Institut du Progrès, où l'on trouvait des trésors, avant qu'ils ne soient transférés à la bibliothèque de Rekjavik mais où l'on trouve encore de "la littérature populaire ancienne qu'on [peut] encore emprunter et que lis[ent] les habitants de la commune" : Les revenants de Heiðarboer de Selma Lagerlöf, le navire poursuit sa route de Nordhal Grieg, Anna de Heiðarkot d'Elinborg. le seul trésor, et pas des moindres, de la bibliothèque, non empruntable (évidemment) est l'édition Munksgaard du Livre de Flatey. Ce qui nous ramène à l'histoire ancestrale de l'Islande, jadis colonisée par le Danemark. Et par la même occasion à l'intrigue, puisque ce livre est l'occasion d'une polar quasi-ésotérique qui se greffe sur le reste du récit comme récit secondaire : c'est peut-être le seul bémol que j'émets car en fait c'est assez fastidieux de suivre les deux vraiment attentivement.
Quant à l'intrigue principale proprement dite, le suspense monte en pression quand un deuxième cadavre est découvert. Là, le polar reprend le dessus et l'on découvre les faces cachées des personnages qui ont un passé beaucoup moins lisse qu'il n'y paraît. Avec même une histoire d'amour cachée là-dessous. Et de la rivalité de chercheurs qui m'a rappelé le livre du roi d'Arnaldur Indridason qui évoque aussi le Livre de Flatey.

Enfin, l'éditeur et le traducteur français ont choisi de garder la graphie islandaise des mots (que j'ai reproduit ici), pour encore mieux vous dépayser et s'accorder avec l'ambiance générale du roman.
Le traducteur a aussi choisi le tutoiement pour faire parler ses personnages - le vouvoiement n'existe pas en islandais, paraît-il. Mais en français, je trouve que cela donne une drôle impression : celle que les personnages se connaissent depuis toujours.

Un roman (noir) mais j'ose à peine le qualifier de "noir" car il est tellement plus, m'a vraiment emportée loin, faire une bonne cure d'iode ! Un sacré voyage que je ne peux que vous conseiller si vous aimez l'Islande.

Pour l'instant le seul roman traduit de l'auteur (qui en a écrit 6 ). On en redemande !
L'énigme de Flatey a été finaliste du prix Clé de verre (prix de littérature nordique).
Lien : http://milleetunelecturesdem..
Commenter  J’apprécie          80
Alors qu'avec son père et son grand-père ils se rendent sur une petite île inhabitée pour y chasser le phoque un petit garçon découvre un cadavre. le bourgmestre alerte les autorités qui envoie le sous-préfet Kjartan pour les premières constatations et débuter l'enquête.

Comment l'homme est-il arrivé là. Personne de l'île de Flatey ne semble l'y avoir emmené.

L'enquête piétine jusqu'à ce que le prêtre de la petite communauté se souvient avoir hébergé deux jours, à l'automne précédent, un éminent professeur venu de Copenhague qui voulait étudier un livre ancien le Flateyjarback qui narre les plus anciennes sagas islandaises et résoudre l'énigme qui y est jointe.

L'enquête n'avance pas jusqu'à ce qu'une autre victime, un journaliste ivrogne, est retrouvé mort dans le cimetière, son corps mis en scène selon une ancienne saga islandaise. A partir de là on suit l'enquête menée par deux inspecteurs venus de Reykjavik et tout s'accélère.

En fin de chaque chapitre l'auteur nous joint d'abord quelques extraits des sagas, puis les questions de l'énigme qui ne pourront être vérifiées qu'en solutionnant la quarantième question ce qui n'a pas encore été réussi jusqu'ici.

En parallèle de l'enquête l'auteur nous fait vivre la vie dure d'une communauté coupée de tout et vivant sur une petite île dans les années soixante. Une plume qui est aussi une ode à la nature sauvage mais aussi à la gastronomie particulière de îliens que le sous-préfet n'avait pas encore abordée.

Les personnages sont bien dépeints, des hommes âpres et durs à la vie difficile. le personnage central qui occupe un job d'été est touchant par son manque d'expérience.

Un très bon premier roman.
Lien : http://imaginaire-chronique...
Commenter  J’apprécie          60
Juin 1960, des pêcheurs de l'île de Flatey en Islande découvrent un corps sur un îlot isolé. Il semble que cette personne se soit échouée - on ne sait comment - dans cet endroit désert sans pouvoir en repartir.

Kjartan, jeune sous-préfet, aidé du bourgmestre local, est chargé des premières investigations, dans l'idée de ne pas déranger la police pour une mort accidentelle.

Les papiers retrouvés sur le corps ne permettent pas de l'identifier mais établissent un lien avec ce qui fait la particularité de la région : le livre de Flatey, sorte de manuscrit médiéval dont il va beaucoup être question, et une énigme rajoutée au cours des siècles à ce document, sur laquelle nombre de personnes se sont cassé les dents.

Le récit alterne entre l'avancée de l'enquête, des extraits du livre de Flatey et les questions composant l'énigme.

C'est surtout l'occasion pour l'auteur de nous faire découvrir la vie à part de ces iliens, dont certains n'ont quasiment jamais quitté leur bout de terre, vivant au rythme de la nature et du climat. Les descriptions sont savoureuses, surtout la gastronomie avec des plats typiquement locaux, certains ne mettant pas vraiment l'eau à la bouche comme le phoque agrémenté de graisse de mouton fondue, et d'autres plus alléchants tels que les ris de macareux grillés ou les oeufs de mouette tridactyle au plat. On a droit tout au long des pages à une véritable ode à la nature sauvage de cette région, pleine d'une fraîcheur bien agréable.

Il faut cependant se battre, surtout au début du récit, avec les noms de lieux et de personnages, dont certains venus d'un lointain passé, qui sont quelque peu indigestes – peut-être plus que le phoque à la graisse de mouton.

L'intrigue, relativement lente durant une grande partie du roman, prend finalement son rythme de croisière, avec des rebondissements amenant à une conclusion qui ne déçoit pas.

Il reste à découvrir la solution à la fameuse énigme pour clore ce roman qui, sans être un sommet de suspense policier, est plutôt agréable et original.
Commenter  J’apprécie          40
L'énigme de Flatey, Flateyjargáta dans la version originale parue en 2003, a été publié en 2013 par les éditions du Seuil dans la collection Policiers. L'auteur prend le temps de situer les décors et de détailler les actions dans un style fluide et agréable à lire: "Le trajet comportait des montées, mais cela n'était pas un inconvénient car le transport était aisé. Pormodur Krakur était à l'évidence bien bâti et n'avait aucun mal à tirer la voiture à lui tout seul. Les autres ne poussaient que pour la forme. Ils marchaient à pas lent, dignement, et les roues de la voiture crissaient légèrement au rythme de leurs pas. Il n'y avait pas à aller bien loin, mais Kjartan trouva qu'ils mettaient un temps infini à parvenir à destination. Pormodur Krakur ouvrit la porte de l'église avec une grande clé et le cercueil fut porté à l'intérieur. Au milieu, on avait disposé deux tabourets sur lesquels ils le déposèrent." (Page 54).

Construction: Chaque partie représente un jour d'enquête; les chapitres, assez courts, se terminent par un passage en italique, extraits du Livre de Flatey et des études menées sur cet ouvrage.

Fil rouge: le Livre de Flatey, compilation d'anciennes sagas rédigée dans le courant du XIVe siècle par un grand propriétaire terrien du nom de Jon Hakonarson, sans doute achevée vers 1394, selon les annales qui figurent à la fin du livre.

L'intrigue:

1960. Des pêcheurs découvrent un corps pratiquement à l'état de squelette dans les rochers d'un îlot isolé au large de Flatey, petite île islandaise située dans la baie de Breidafjordur, large fjord situé sur la côte ouest. le jeune Kjartan, stagiaire chez le préfet dont dépend l'îlot, est envoyé sur place pour récupérer le corps et s'occuper de son acheminement vers Reykjavik, et rédiger un rapport.

Après avoir établi que le corps est celui d'un universitaire danois, spécialiste des sagas nordiques, reste à déterminer ce qu'il était venu faire en Islande, particulièrement sur ce rocher perdu en pleine mer. Sa venue avait-elle un rapport avec le Livre de Flatey et la polémique, alors virulente, autour de la question de sa restitution par les Danois à la nation islandaise, d'où le livre était originaire? Ou était-il venu résoudre l'énigme de Flatey, sorte de mots croisés à déchiffrer à partir d'un code qui sert à vérifier la résolution correcte?

Comment le corps a-t-il pu s'échouer dans les rochers, sur l'île de Kétilsey, très à l'écart des trajectoires des bateaux naviguant dans ces parages? Etait-il mort à ce moment-là? A-t-il été victime d'un naufrage, d'un accident ou d'un meurtre? S'il était vivant, comment a-t-il pu survivre sur ce rocher inhospitalier, inhabité, loin de l'itinéraire du ferry reliant les îles à la côte? Après le meurtre sauvage de Bringeir, journaliste venu mener sa propre enquête, l'affaire est confiée à la police de Reykjavik.

L'originalité du roman est que son intrigue est basée sur l'énigme posée par le Flateyjarbok, un manuscrit islandais rédigé de 1387 à 1394, et la compétition qui fit rage. Très richement décoré, il réunit un grand nombre de sagas, royales pour la plupart, intégrant des poèmes scaldiques, des poèmes eddiques ainsi que de courts textes historiques. Certaines de ces oeuvres ne figurent dans aucun autre ouvrage. D'où son importance. L'Islande étant sous domination danoise, le manuscrit fut envoyé au roi Frédéric III en 1656 par l'évêque Sveinsson, ainsi que le voulait la coutume. Il fut officiellement restitué à l'Islande le 21 avril 1971. L'auteur a construit son intrigue autour de l'énigme élaborée par un étudiant danois qui concocta un jeu de devinettes à partir des nombreux personnages y figurant: "Il présenta alors une liste de quarante questions dont la dernière était le code qui validait les réponses justes à toutes les autres. Ce code comportait de surcroît un poème inachevé et la solution devait servir à élucider la fin de ce poème, c'est-à-dire les deux derniers vers." (Page 168). Une compétition féroce s'ensuivit, d'autant que personne ne parvint à élucider l'énigme. Est-ce la raison de la venue de Gaston Lund en Islande??

L'intrigue de ce roman original et passionnant se déroule à une cadence lente, au rythme des occupations et des activités des habitants de l'île, endormant le lecteur dans une fausse torpeur, jusqu'au rebondissement final qui, d'un seul coup, accélère les événements. Sans oublier que, l'histoire se déroulant en 1960, les procédures policières étaient bien différentes de celles usitées de nos jours.
Lien : https://legereimaginarepereg..
Commenter  J’apprécie          20
Une visite dans une île de l'île car dans ce lieu, on ne parle pas de continent. Une rencontre qui semble si "vraie" de l'Islande, d'hommes et de femmes enracinés dans leurs terres.... Surprenant !
C'est un vrai livre sur l'Islande, écrit par un vrai islandais, qui nous offre la découverte d'une civilisation méconnue, à la fois par les chemins de l'Histoire, des légendes mais aussi par la description de la vie quotidienne dans les années 60 sur ces chapelets d'îles perdues dans l'océan plutôt hostile.
Nous suivons la narration de deux histoires adroitement mêlées, la première, celle d'un meurtre que l'on cherchera à élucider, la seconde par la découverte du Flateyjarbók (le plus long des manuscrits islandais rédigé de 1387 à 1394, le plus richement décoré et l'un des plus intéressants. Il se compose de plusieurs sagas qui contiennent elles-mêmes un grand nombre de þættir, de poèmes et de courts textes historiques).
Première difficulté, celle des noms, pas facile de s'y retrouver, s'appeler gudvaldur gudvaldsson, aller à Brjánslækur ou à Stykkishólmur, mais la lecture est un sport intellectuel parfois exigeant.
Après, l'Histoire de l'Islande toujours surprenante (état libre de 930 à 1264, puis allégeance au roi de Norvège et en 1380 annexion par le Danemark jusqu'en 1944). Une réalité dont il faut tenir compte pour comprendre les implications entre ces pays nordiques.
J'ai complété ma culture politique avec l'affairisme (merci Wikipedia ! "L'agrarisme n'est ni du libéralisme ni du socialisme. En effet, il s'est construit en réaction à une double conjoncture de modernisation de l'agriculture et d'affaissement des prix agricoles (entre 1873 et 1895). Mais l'agrarisme est aussi tombé dans un anticapitalisme parfois primaire, notamment à cause de son mépris pour la ville, et dans un antisémitisme parfois explicite et virulent, jouant un rôle dans la diffusion du cliché du Juif comme homme d'argent et ennemi des campagnes. Il prône aussi le « retour à la terre » pour lutter contre les débuts de l'exode rural et favoriser le retour aux "vraies valeurs" traditionnelles").
Enfin beaucoup plus léger, les curiosités culinaires islandaises : manger des ris de macareux aux pommes de terre avec du beurre fondu, ou des oeufs de mouette tridactyle au plat, boire du bouillon de ces malheureux goélands à manteau noir, goûter aux oeufs de sternes tout juste pondus, de curieuses recettes d'accompagnement des restes car avec, par exemple, un agneau retrouvé noyé, on fait un pâté maritime : faire bouillir du pâtée de viande et de graisse. Quand il a été bien salé et ramolli après lui avoir fait rendre son eau, c'est un mets délicat. Très appétissant n'est ce pas ?
Pour finir, je ne risquerai pas ma vie en vous dévoilant ou en recopiant la clé de résolution du poème :
U T S E ....
E N I U ...
..... T S I D, il faut lire ce livre car c'est une belle rencontre avec un monde attachant et la résolution des meurtres est, elle aussi, surprenante.
Commenter  J’apprécie          20
On sait le succès rencontré en France par le polar nordique en général. C'est devenu en quelques années un filon, un produit d'appel, quasiment une "tête de gondole". Pas un éditeur qui ne propose à son catalogue un auteur suédois, norvégien, danois, ou plus rarement finnois. On sait également que tous ceux-là n'ont pas forcément le talent d'un Mankell, d'un Larsson ou d'un Joensuu.
C'est dans ce cadre-là qu'au Seuil ils ont déniché dernièrement un Islandais, Viktor Arnar Ingólfsson, et traduit son roman Flateyjargáta paru initialement en 2003. Comme quoi, il reste encore de la matière…

Nous sommes en 1960, à l'ouest de l'Islande, au milieu de cet immense fjord qui sépare le nord du sud du pays. Autant dire au milieu de nulle part. À mi-chemin des côtes se trouve l'île de Flatey, habitée d'une cinquantaine d'âmes. Un gros rocher battu par les flots avec quelques Vikings dessus…
Par un matin brumeux, partis malgré tout pêcher le phoque sur un îlot isolé en dehors des routes maritimes, le père et le fils Guđvaldsson découvrent sur Ketilsey un cadavre en piteux état dont il ne reste quasiment que le squelette.
Sur Flatey, qui n'est desservie qu'une fois par semaine par le bateau postal, c'est l'événement. le bourgmestre, le pasteur, l'instituteur, personne ne sait quoi faire de cet encombrant "cadeau". La préfecture est prévenue et envoie sur place un jeune adjoint à peine sorti de l'école, Kjartan, afin d'identifier la victime, de faire rapatrier le corps et de mener l'enquête.
Même si de nombreuses semaines, voire mois, sont passées avant que le corps ne soit découvert, on finit tout de même par l'identifier comme étant celui de feu Gaston Lund, un professeur danois spécialisé dans l'étude des récits moyenâgeux et qui se serait sans doute rendu dans la région pour consulter le Livre de Flatey, une sorte de compilation des sagas racontant les épopées des rois de Norvège, une relique.
Une relique qui renferme cependant un secret, sous la forme d'une énigme composée de quarante questions, et que personne n'a semble-t-il jamais réussi à résoudre.
Durant quelques jours, coincé sur cette île, Kjartan va tenter de résoudre les deux énigmes qui s'offrent à lui…

L'Énigme de Flatey est un roman étrange, atypique, qui vous embarque vers des ailleurs méconnus. Au premier abord, il y a les habitants de cette île perdue au bout du monde qui, au début des années soixante, mènent une vie rude, adaptée à l'environnement et au climat. Ils sont un peu pêcheurs, un peu éleveurs, un peu bricoleurs, et surtout vivent en vase clos. À travers le regard, l'enquête et les déambulations de Kjartan, l'auteur prend le temps de nous décrire ces descendants de Vikings que l'on apprend à mieux connaître grâce à une approche quasi ethnographique du récit.
Et puis, alors qu'elles ponctuent chaque fin de chapitre, les questions de l'énigme du Livre de Flatey donnent petit à petit un aperçu de ces fameuses sagas islandaises. Venues du fond des temps par voie orale, elles ont été transmises de génération en génération, avant d'être compilées et confiées aux soins des copistes du Moyen Âge pour raconter les aventures royales ou les épopées chevaleresques et souvent violentes de quelques héros du grand nord. Et le roman de prendre alors une tournure historique qui, en donnant quelques clefs, suscite l'envie d'ouvrir certaines portes.

Car au fond, il faut bien le dire, l'intérêt principal du roman ne réside pas dans l'enquête policière de Kjartan qui, si elle est bien menée à son terme, n'en demeure pas moins le simple fil sur lequel l'auteur enfile les perles qu'il a voulu mettre en valeur.
Dépaysant, atypique, L'Énigme de Flatey est un voyage étonnant qui sort des sentiers battus. Fussent-ils nordiques…
Lien : https://polartnoir.fr/livre...
Commenter  J’apprécie          20
L'énigme de Flatey se distingue des autres polars islandais par l'atmosphère oppressante de la minuscule île éponyme des fjords de l'ouest. Ici, tout le monde se connaît, s'observe et les vieux secrets se conservent sous d'épaisses couches de mutisme. En même temps que dans cette inquiétante compagnie, on plonge également dans les sagas islandaises. Et c'est aussi cela qui donne une singularité particulière à ce récit : l'alternance réjouissante des textes anciens qui servent à décrypter l'énigme de ce vieux livre millénaire, véritable trésor national.
Commenter  J’apprécie          10
Un thriller dépaysant et très agréable à lire, je le recommande!
Lien : http://chroniquesdunchatdebi..
Commenter  J’apprécie          10

Lecteurs (207) Voir plus



Quiz Voir plus

Etes-vous incollable sur la littérature scandinave ?

Qui est l'auteur du roman "Bruits du cœur" ?

Herbjørg Wassmo
Jens Christian Grondhal
Sofi Oksanen
Jostein Gaarder

15 questions
149 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature scandinaveCréer un quiz sur ce livre

{* *}