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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une adaptation tout en sobriété

Après sa brillante adaptation du roman chinois « Servir le peuple », Alex W. Inker s'attelle à un autre texte : celui de l'américaine Virginia Reeves. L'histoire se déroulait dans les années 20, il choisit de changer légèrement l'époque en la décalant de 5 ans et en la plaçant dans les années 1930 au moment de la Grande Dépression. En le feuilletant, on y trouvera un air de Steinbeck et des « Raisins de la colère ».
La couverture avec ses gros plans sur des visages permet d'aborder plusieurs thèmes : la Grande Dépression, les différentes classes sociales, la condition ouvrière, elle est assez « flash » et met d'emblée en avant le graphisme choisi (semi réaliste voire un peu burlesque).
La mise en page est variée mais sobre. On passe de pages de 3 à 9 vignettes de forme bien symétriques et séparées par une gouttière à des pleines pages semblables à de belles illustrations. Nombre d'entre elles sont muettes, le dessin se suffisant à lui-même.
La narration de ce one shot est très fluide. le récit est linéaire et fonctionne sur les ellipses. L'ellipse la plus importante (entre la rencontre et le délitement du couple six ans plus tard) est même matérialisée par une page monochrome.
Ce n'est pas un album bavard : pas de récitatifs, dialogues parcimonieux (mais toujours justes) et de nombreuses pleines pages ou planches muettes. On notera d'ailleurs qu'Inker a transformé la relation existant entre Roscoe et son métayer noir car elle était beaucoup trop fraternelle (tutoiement)dans la traduction. Ici la hiérarchie est bien respectée.

L'envers du rêve américain

Tout commence comme dans une comédie des années trente : Roscoe virevolte, marivaude et séduit. On pourrait croire à une oeuvre joyeuse vantant l' « American dream » et un pays de profusion où tout est possible mais cette rêverie se brise littéralement sur la seule page monochrome de l'album et l'itinéraire du héros va nous plonger bien au contraire dans l' « American nightmare» !
Alex Inker raconte qu'il a été séduit par l'oeuvre de Virginia Reeves grâce à l'histoire d'amour entre Roscoe et Mary. Celle-ci est très subtilement rendue tant dans le coup de foudre que dans son délitement. Il a d'ailleurs choisi de doter le protagoniste de ses propres traits et de donner à Mary et Gerald ceux de sa femme et son fils. Il en fait une histoire très personnelle qui favorise l'empathie avec le personnage de Roscoe présenté de façon très humaine. On le voit avec ses défauts (l'alcoolisme et la violence nés de sa frustration) mais on ne peut s'empêcher de le plaindre en voyant qu'il est obligé de mettre de côté ce qu'il aime (l'électricité) pour faire vivoter la ferme de son beau-père. Il doit sauver son couple mais aussi sa ferme : finalement la tâche est trop grande…. C'est un antihéros. Sa destinée est emblématique de bien d'autres. Là aussi tout est suggéré et rien n'est asséné.
Si la première partie met en scène la grande dépression, la majorité de l'oeuvre se passe dans l'univers carcéral et en constitue une critique (un peu comme « l'Accident de chasse » qui se déroule à la même période) par sa description des gardiens brutaux et stupides et des codétenus assassins : y survivre y apparait plus dur que de subir la Crise. le seul espace de liberté, comme dans l'album de Landis et Blair, est celui qu'on trouve dans les livres.
Inker dépeint ici une tragédie : un homme broyé par le système (la Grande Dépression, le cynisme des banques puis l'univers carcéral) dans sa chair comme dans son âme. Celle-ci est redoublée par le personnage du fermier noir encore moins bien traité dans ce sud ô combien ségrégationniste.

Une bd naturaliste haute en couleur à la croisée des arts

Alex Inker a choisi d'éviter la couleur bateau des années 1930 : le sépia. A la place, il nous gratifie d'un orange presque fluo (et de sa couleur complémentaire le bleu qui le tempère). Cette couleur est surprenante mais se retrouve dans beaucoup d'illustrés européens de l'époque : il l'a trouvée dans « Zig & Puce ». Cela donne donc bien un côté rétro et original à la fois, tout comme les trames qui apportent également dynamisme et substance. La couleur orange rappelle également l'uniforme des détenus dans les prisons américaines.
L'écriture d'Inker est aussi très cinématographique par ses cadrages et l'utilisation de la caméra subjective : une page entière est ainsi composée de vignettes noires pour monter l'évanouissement du héros après une rixe. La partie se déroulant en prison évoque, quant à elle, « O'brothers » des frères Coen (surtout la poursuite avec les chiens).
Enfin les paysages du Sud et les paysans en exode rappellent beaucoup les clichés de Dorothy Lange pour la FSA et les portraits photographiques d'Erskine Cadwell et Margaret Bourke White et captent bien l'atmosphère de l'époque.
Jouant des références dans le monde du 7e, 8e et 9 e art, « Un travail comme un autre » devient ainsi une étonnante bd naturaliste à la croisée des arts.


« Un travail comme un autre » n'est que le quatrième opus d'Alex W. Inker ; mais celui-ci fait preuve d'une étonnante maturité tant dans le graphisme que dans la narration et nous propose un album très subtil et très abouti. Cette bande dessinée est aussi très élégante. La fabrication, comme toujours chez Sarbacane, est hyper soignée : un format généreux de 180p, du papier épais, une impression en quadrichromie (crème, orange, bleu aube et marron), une couverture toilée et une belle reliure aspect cuir. L'objet en lui-même est très beau et très agréable à manipuler et possède un côté massif qui sied bien au propos. Une oeuvre parfaitement réussie donc, un vrai coup de coeur !
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Alabama. Années 20. Crise des fermiers. Grande dépression.
Roscoe est fasciné par cette invention qu'est l'électricité et veut en faire son métier, mais Mary, sa femme, hérite de la ferme de son père. le voilà contraint d'y travailler. Dur. Il a l'idée d'une belle escroquerie pour les sortir de là. Et ça marche!

On pourrait croire au début d'un "American dream" mais tout tourne au cauchemar ce fameux soir. Arrestation, incarcération, anéantissement de l'homme dans une de ces terribles geôles du sud des États-Unis.

Le graphisme monochrome, mélangeant pop art et burlesque, révèle une véritable recherche artistique. le visage d'un même personnage peut passer du beau au laid d'une vignette à l'autre. L'expressivité est très travaillée.

Voilà une adaptation graphique du roman de Virginia Reeves réussie. le récit est poignant, déchirant.

Amateurs de bonnes bandes dessinées, allez-y!

Lien : https://carpentersracontent...
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Le graphisme est tout simplement saisissant, le dessin et les couleurs sont si spéciales qu'elles nous plongent dans cet univers et cette époque, d'ailleurs non précisée, mais qui voit l'électrification de l'Alabama. Des personnages forts et un environnement carcéral fort et sombre.
Je n'ai pu lâcher cette lecture sans l'avoir achevé. C'est très fort, très dense du point de vue des émotions et des sentiments.
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Alabama dans les années 1930

Roscoe T. Martin est un électricien passionné de lecture. Dans la rue, il rencontre Mary, un livre à la main. Va se nouer une relation entre eux. Puis Mary hérite de la ferme familiale. Roscoe, obligé d'abandonner son métier, entretient les terres malgré lui. Malheureux, médiocre, pas vaillant, il devient agressif et violent avec sa femme et son enfant. Puis un soir lui vient une idée. Aidé de son voisin fermier, il va détourner l'électricité de la ville pour électrifier les engins agricoles et redresser l'affaire familiale. Cela fonctionne. Mais voilà qu'un employé de la Compagnie électrique se tue sur les lignes trafiquées. Roscoe se fait emprisonner.
Une nouvelle vie commence au sein de la prison. Rédemption ou survie, il devient un des meilleurs prisonniers travailleurs. Cela suffira-t-il ?

Une très belle BD au graphisme original. La couleur dominante orange entretient l'atmosphère électrique jusqu'à la dernière page.
L'histoire n'est pas joyeuse même si une esquisse d'humanité apparaît dans le coeur de cet anti-héros individualiste et borné.
Certains y voient une fable anti-capitaliste. Pour moi c'est la narration d'une vie absurde, dont l'ego est le seul navigateur aux commandes. Et c'est en cela que je la trouve très intéressante.
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