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sur 607 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le 21 juillet dernier, j'ai lu sur Babelio un commentaire qui me semblait celui d'une jeune fille adolescente -mais peut-être me suis je trompé !... et j'ai trouvé très intéressant pour ma propre réflexion ses questionnements et ce qu'ils m'ont inspiré, à propos de la Leçon de Ionesco.

Je retranscris ici nos échanges, façon comme une autre de critiquer à deux voix l'oeuvre. J'espère qu'elle ne m'en voudra pas de reprendre ses mots, respectueusement, sous commentaire en mode théâtral, et avec un peu d'autodérision à la Ionesco en ce qui me concerne...

S. : "J'ai apprécié le début de l'histoire. le concept d'une scène entre un professeur et un élève me plaisait bien surtout que je souhaitais que ceci me révoque les souvenirs de l'école.
Mais au fur et à mesure que la pièce avançait, je ne comprenais plus "

Le professeur Candle : "Très souvent sur Babelio, les critiques affirment. S., ta critique est originale parce qu'elle questionne. de plus, elle questionne réellement, pas comme souvent nos critiques d'adultes, qui comprennent des questions uniquement pour mieux introduire nos jugements personnels...."

S. : "pourquoi le professeur est représenté si durement. Pourquoi est-il devenu cruel, agressif, insensible face à son élève qui souffre. La jeune fille avait mal aux dents : bienveillante au départ avec une intention d'apprendre et de réussir, elle a tout de même essayé de le suivre même après sa peine.
Pourquoi la servante ne réagira-t-elle pas et n'arrêtera pas le « pire » ? "

Le professeur Candle : "J'essaie de répondre ici, même si La Leçon est un tel monument que chacun doit y trouver ses propres réponses : d'abord, Ionesco est un maître de l'absurde : il met en évidence des non-sens et le grotesque de situations ou réactions (comme celles que tu relèves) pour mieux critiquer et obliger chacun à s'interroger sur ses propres actes, le maître et l'élève peut être chacun de nous à un moment ou à un autre ; parfois on est en position (basse) d'élève, parfois (haute) de maître.

S. : "Pourquoi le prof explique des choses qui ne veulent rien dire ? Et, pourquoi avoir choisi les dents ? Quiconque ne pourra plus ni se concentrer ni travailler une fois qu'il aura mal aux dents.
Finalement, pourquoi l'élève est-il la victime et le prof le méchant ? Alors que la faute dans notre monde, n'est pas tout à fait celle du prof, mais celle de l'élève qui parfois ne veut plus travailler sous prétexte qu'il a mal à la tête alors qu'en réalité il n'est que fatigué.

Le professeur Candle : "Cette pièce symbolise (enfin je crois) justement l'affrontement entre la jeunesse de l'élève, qui ressent les choses et travaille suivant son humeur, son désir, son coeur... et le professeur, qui prétend savoir, a plein de choses à enseigner mais se rend compte que lui-même a oublié sa sensibilité de jeunesse (parce que, oui, lui aussi a été l'élève, il y a longtemps...) , s'est endurci et a perdu sa capacité à juste sentir les choses... du coup il en devient jaloux au point de vouloir détruire chez autrui ce que lui a perdu...

S. : "Est-ce que le message de cette pièce est que les professeurs sont des personnes cruelles qui ne comprennent pas les besoins de leurs élèves ? "

Le professeur Candle : "Tant mieux si tu n'as pas rencontré ce genre de professeur à ce jour ; mais on en rencontre généralement au cours de sa vie, et parfois on le devient aussi... heureusement des auteurs comme Ionesco sont là pour nous rappeler l'absurdité de ce qui nous parait si raisonnable ou rationnel, et la liberté de nos pensées de jeunesse...
Et heureusement aussi, les enfants et les adolescents (chacun de manière différente) viennent parfois bousculer les certitudes des plus anciens, leur rappeler leur part d'enfance et d'adolescence enfouie, parfois simplement par des question ouvertes, comme dans ta critique.

Merci."
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La mécanique absurde des sciences tant arithmétiques que linguistiques, c'est la puissance de Ionesco qui ne se limite pas dans cet exercice à contrecarrer la logique mais qui, avec une perversité montante, additionne les paroxysmes du burlesque en soustrayant le sens commun menant à l'altération de l'esprit, puis multiplie les doses de sadisme jusqu'à la chute dramatique.
de l'abus de pouvoir d'un professeur avilissant, les mots décentrés deviennent les maux du corps pour l'élève cuisinée qui, le malaise s'amplifiant, souffre de mal en pis. Ionesco s'empare alors du licencieux, le corps de la jeune fille devient alors sexué, en démontrent ces passages tels des appels à la séduction qui ne sont que tourments:
"j'ai mal...ma tête...ma gorge...mes seins... mes hanches... mes cuisses... mon ventre".
Connotations érotiques qui mèneront l'excitation meurtrière à son comble.

La leçon, c'est le tableau de l'excentricité et de la perversion dans un décor neutre en absurdie , la vision saugrenue du langage délivrée dans une incohérence comique, le fantasme de la destruction pure qui débute par un échange effarouché puis à couteaux tirés pour finir dangereusement mortifère.
Nul héros dans cette satire noire écrite à la sortie de la guerre si ce n'est la déraison et la lubricité de l'homme, voire du monde, et c'est bien là la grande force des absurdistes qui, en créant une logique allégorique, mettent en avant alors la bêtise de la pensée ultime ainsi que nos travers.

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"La leçon" est une pièce culte de Ionesco que j'ai eu la chance d'étudier dans ma jeunesse. La pièce retrace l'histoire d'une simple leçon qui va vite déraper vers un gros délire. Il s'agit en fait de montrer par l'absurde la puissance des mots.

Un professeur donne une leçon particulière à une élève pleine de zèle qui se prépare au doctorat total. le professeur parle d'un tas de sujets mais va perdre peu à peu son calme devant la naïveté et la distraction de l'élève à cause de son mal de dents. Les échanges ne vont plus respecter le strict cadre des codes sociaux induits par ce type de relation. Et c'est par le langage que tout va basculer, s'affoler. le professeur va s'emparer peu à peu de la parole et la leçon va prendre un tour magistral et sadique. Les mots vont s'animer alors en séries obsédantes, en se répétant jusqu'au mot-maux de la fin.

Dans ce drame comique, le langage, sous ses apparences de convention et d'échange, devient donc une arme abstraite.
A lire et surtout à voir au théâtre pour rire de cette drôle de leçon.
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Deuxième expérience avec le tyrannique Ionesco. Pour ce qui est de sa dictature scénique, cela ne change pas. Mais son contrôle imbuvable s'efface à la découverte du texte, grande comédie dramatique et satyrique sur l'enseignement. Une mise en abîme qui amuse en pleine réflexion.
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Si on aime le théâtre de l'absurde, on ne peut qu'adhérer à cette pièce. Une élève arrive chez son professeur pour que celui-ci la fasse travailler. La pièce commence sur un ton comique et bascule au fur et à mesure dans le tragique. Même si, certains passages sont parfois redondants, cette pièce mérite d'être lue rien que pour son dénouement renversant.
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Une bonne pièce pour illustrer le théâtre de l'absurde

Résumé:Un vieux professeur reçoit chez lui une bachelière de 18 ans pour lui donner des cours. Au fil du temps, les cours augmentent en difficulté et l'élève ne comprend plus le maître, qui devient de plus en plus agressif, tandis qu'elle-même devient petit à petit un objet mou, inerte, épuisé.

Un fossé de connaissances les sépare finalement et le maître finit par tuer son élève. À noter que cette élève est la 40e victime du maître de la journée.

Cependant, une nouvelle élève se présente...
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le comique repose sur la caricature de la situation d'enseignement, le question-réponse, la répétition de l'erreur, l'agacement du professeur, agacement susceptible de le mener à une crise profonde, crise nerveuse parce qu'elle révèle l'incohérence même d'un système d'enseignement.
Cette petite comédie loufoque (la jeune fille est capable de calculer des multiplications impressionnantes mais incapable de soustraire), sous des apparences de fait divers (un prof tueur en série) grossit en fait une situation typique de l'enseignement ; elle fait la critique du mode d'éducation le plus répandu. le professeur fait face à l'incohérence de son élève. Et devant cette chose qui le dépasse, l'anormalité fondamentale de son élève, le professeur n'a d'autre choix que de craquer, que d'écarter, de renier l'élève (la tuer ?) pour restaurer la normalité. Dans la conception traditionnelle de l'enseignement, il y a une normalité théorique et pas de place pour ceux n'y correspondant pas, qui sont effectivement écartés. Or, cette anormalité de l'élève, cette imperfection, est bien-sûr la norme. Tout élève, et au-delà tout être humain pensant, a bien entendu des défaillances de raisonnement. Se priver de l'un d'eux, dont les défaillances transparaissent, c'est se priver de compétences importantes dans d'autres domaines.
le second point pédagogique que l'on peut observer dans cette pièce, c'est le côté chien savant de la jeune fille. Elle apprend tel qu'on le lui demande, ni plus ni moins. La raisonnement est étouffé, caché, par la méthode scolaire. Ce qui laisse penser que même les élèves parfaits, acceptables par ce professeur allergique aux mauvais, ne sont que des défectueux cachés sous des apparences de bons élèves. Les questions du professeur ne demandant en effet aucun raisonnement, mais un apprentissage scolaire.
La manière dont Ionesco détaille longuement l'endormissement progressif de la jeune fille sous l'effet de la leçon montre le sens que l'auteur donne à son drame. le jeu d'acteur donnera à la fois esthétique et sens à la pièce. Symboliquement, la pédagogie a pour effet d'étouffer la vitalité de l'élève, sa personnalité, son ingéniosité, ainsi que de le transformer en une sorte de zombie, une proie facile, facile pour un assassin, mais facile aussi pour un gourou, une propagande fasciste, ou bien simplement une société de consommation. L'esthétique minimaliste, l'absence d'objets illustre de même la volonté abstractrice de la pédagogie, dont l'effet est l'anéantissement de l'humain, d'où également son affadissement progressif. La pédagogie est déshumanisante.
Si l'on élargit les symboles à la société, le professeur devient la volonté de supervision et de formation du citoyen par la société. Former des bons citoyens, rejeter les défectueux… Cette philosophie qui conceptualise un citoyen idéal, un fonctionnement humain idéal, et qui force des êtres imparfaits, difformes, à rentrer dans le moule est voué à l'échec ou au massacre. C'est le principe du fascisme. On retrouve ainsi cette préoccupation de Ionesco, qui frappait dans Rhinocéros qui s'intéressait à la propagation. Ici, il, par une méthode proche de l'ironie socratique, il fait accoucher la philosophie fasciste à son premier degré (l'éducation par le modèle idéal) d'une monstruosité.
Au delà du rapprochement d'avec le fascisme, c'est le modèle d'enseignement tel qu'on le connaît qui est démonté. Pourquoi vouloir façonner les êtres malgré leurs défauts évidents, les assigner à un modèle auquel ils doivent se conformer, se modifier tant que possible, plutôt que de profiter de leurs qualités, de leur difformité même.
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La leçon est un drame comique en un acte qui met en scène trois personnages : l'élève, le professeur et la bonne, et dont l'action est simplissime : on assiste à une leçon, loufoque et absurde, de plus en plus angoissante. Difficile de faire plus simple.

Une élève, qui souhaite passer le « doctorat total » sonne à la porte d'un petit appartement. La bonne lui ouvre, elle s'installe avec sa petite jupe plissée au bureau et attend l'arrivée du professeur. le rapport dominant-dominé est d'abord en faveur de l'élève : l'échange banal qui s'installe entre les deux montre un professeur soumis, qui se noie dans les excuses, et ponctue son discours de « mademoiselle » obséquieux dans un souci trop pressent de marquer sa déférence. Au fur et à mesure du déroulement de la leçon, ce rapport dominant-dominé va s'inverser, le professeur devenant de plus en plus violent envers son élève, évoquant ainsi la montée du désir.

La malheureuse élève se dit à la disposition du professeur. Cette marque de politesse est mal interprétée et va éveiller le désir du professeur, dévoilé par la didascalie « lueur dans les yeux vite éteinte ». La leçon d'arithmétique débute par l'addition et la soustraction, opérations des plus élémentaires mais qui ne sont pas sans difficultés pour l'élève qui n'arrive pas à retrancher trois à quatre. Tous les exemples qui surgiront feront appel au corps de l'élève, dévoilant l'obsession naissante du professeur.

Puis vient la leçon de linguistique, dans laquelle le professeur noie son élève dans une logorrhée sans fin, utilisant un jargon pseudo-scientifique sur l'origine des langues. Il se fait menaçant, son discours étant sans cesse interrompu par l'élève qui déclare avoir mal aux dents. Irrité, il déclare son intention de lui apprendre toutes les façons de dire « couteau », symbole phallique s'il en est ! Cette logorrhée est une façon d'allier le verbe à la passion brutale, à la toute-puissance du désir. Peu à peu, les traductions du mot « couteau » revêtent un caractère hypnotique et le spectateur voit l'élève, qui le répète sans cesse, être réduite à une femme-objet, évoquant sa gorge, ses hanches, ses cuisses, son ventre.

Enfin, l'action se termine : le professeur brandit son « couteau » et, dans un cri équivoque, l'élève s'affale dans une attitude « impudique », les « jambes écartées » comme le précise la didascalie. Affolé par son crime, le professeur nie d'abord son acte auprès de la bonne qui le tance, lui reprochant que ça fait quarante fois aujourd'hui qu'il tue son élève. Puis elle l'aide à se débarrasser du corps. Pendant ce temps, la sonnerie retentit. Une nouvelle élève est introduite par la bonne…[...]
Lien : https://enquetelitteraire.wo..
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La Leçon est avant tout une pièce à voir jouer car le texte seul rend mal compte du crescendo et de l'intensification des répliques. D'ailleurs, les didascalies tiennent une place énorme dans la façon dont Ionesco veut que nous ressentions la pièce à sa lecture. La très longue didascalie du début en particulier révèle le sens de la pièce ce qui rend la lecture très différente de la pièce jouée. Dans le premier cas, on sait comment la situation va évoluer. Dans le second cas, on se laisse surprendre par le déroulement de la pièce. Ceci dit, sans même cette didascalie initiale, la lecture serait encore plus éloignée de l'effet de la pièce.
Si la pièce tourne effectivement a l'absurde, le non-sens n'en est néanmoins pas le moteur. Il est toutefois très plaisant de noter tout ce qui relève du non-sens dans les répliques du professeur et de l'élève. La Leçon me semble la pièce idéale pour aborder le théâtre de Ionesco puisqu'il guide bien plus le spectateur que dans ses autres pièces.
La dimension sexuelle de la pièce est peu évoquée alors que j'imagine bien une mise en scène insistant sur la concupiscence de moins en moins contenue du professeur et la provocation involontaire mais de plus en plus flagrante de l'élève. Une telle présentation, qui a peut-être été déjà exploitée, n'était peut-être pas envisageable dans les années 1950 mais pourrait l'être de nos jours.
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J'ai beaucoup plus accroché à cette seconde pièce qu'à Rhinocéros ; le texte est drôle et devient féroce, grinçant. On sent venir la catastrophe, et l'ensemble est presque trop court.
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