Sous ma main de plâtre
un voleur m'étrangle
mais je me dois de dormir
si je veux clamer la vie
dès l'aube d'eau très claire.
*
L'œil est chambre d'or
où volent corbeaux et pies,
où vivent deux corps aimés
dans la terrible clarté.
Jamais le sommeil
ne ferme les paupières.
*
Macule de bleu ton sexe.
Et surgit la jouissance.
Ton délire apparaît
sous les yeux du dormeur
qui caressait ton torse.
*
Hésite. Haleine en bouche.
Une petite chaleur existe
en-dehors du corps, des os.
Rien n'est plus léger
que ce semblant de brume.
La paume arrête les mots.
La paume est une paume.
*
Air est là. Corps sans doute.
Le silence ne bouge plus.
Mais tout colle à la peau
qui n'est plus qu'elle-même,
enrobant muscles et fièvres.
Les os n'ont plus de nom.
*
La langue en l'air caresse
le ciel tombé du ciel.
Mille muscles frémissent.
Nous pesons notre propre chair.
Affamés de mots, nous délirons.
*
Chaude odeur. La voix. La vie.
Le corps noyé de vin.
Cécité ! Celui qui voit
ne voit que ce qu'il voit.
Dans la tête, mille petites têtes
ont des regards partout,
font l’obscurité, la clarté.
Nous pénétrons dans chacune d’elles.
Se morcèlent nos cerveaux.
Nous atteignons le bleu.
Dans le caillou, le poing gelé.
Mais un cœur bat quand même
qui ne fait que répéter
soubresauts et coups sourds.
D’autres poings dans le poing
sont des pierres à la volée.
Hommage d'E. Savitzkaya à Jacques Izoard