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EAN : 978B01DHNED18
Yale University Press Sep-1997 (30/11/-1)
5/5   1 notes
Résumé :
By Thorkild Jacobsen ( Author ) [ Harps That Once . . .: Sumerian Poetry in Translation (Revised) By Sep-1997 Paperback
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
A la différence des ouvrages de recherche et des éditions critiques que l'on trouve sur le marché, cette anthologie de poésie sumérienne en traduction n'exige rien d'autre du lecteur que de la curiosité et de l'amour pour la poésie, quelle qu'elle soit. Dans le monde anglo-saxon, les traductions de Jacobsen ont une réputation de qualité littéraire que je serais bien en peine de confirmer ou d'infirmer, n'étant pas un anglophone natif (il faut l'être pour entrer dans une poésie étrangère). Si Jacobsen était un poète, il était fait pour rencontrer le premier peuple poète attesté de l'histoire : certes les Sumériens nous ont laissé quantité de textes économiques, légaux, administratifs, officiels, reçus, factures, feuilles d'impôts, mais aussi de miraculeux poèmes. La première partie de l'anthologie est consacrée au cycle de Dumuzi ("le fils droit, légitime", devenu plus tard Tammuz ou Adonis), le berger amant de la déesse de l'amour Inanna (il meurt et ressuscite au printemps, dans sa version cananéenne). La seconde, la troisième, la septième et la huitième parties contiennent des hymnes amoureux, d'un érotisme explicite, ou adressés aux dieux et aux temples : la poésie et la prière ont une parenté rhétorique. Les cinquième et sixième parties sont consacrées à l'épopée historique ou légendaire. Tout est sous le signe de la harpe et du chant : on ignore bien sûr les sonorités de ces poèmes (et de la langue en général) et la musique qui allait avec, et même les noms des instruments, qui deviennent des types et des genres poétiques comme dans la Bible. Ils sont mystérieux. Nous lirons ces textes en silence, comme ceux de Senghor ou les Psaumes.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
La malédiction sur Akkad (après que le roi Naram-Sin a détruit son temple, le dieu Enlil se venge).

Orage tonnant, déchaîné sur tout le Pays,
Déluge dressé contre quoi il n'y a pas de résistance,
Enlil, son Temple-Montagne détruit, fait de grandes choses.
Il leva les yeux vers le pays des Gubin, il arracha les habitants du haut de leurs vastes montagnes, des gens qui ne ressemblent à aucun peuple, les Gutis, hommes ignorant le frein, des humains certes, mais à l'âme de chien et de stature simiesque.
Enlil les fit sortir de leurs montagnes. Innombrables, comme des moineaux, ils fondirent sur la terre. Comme un filet à bétail, leur bras fut étendu sur la plaine, rien ne lui échappait, personne n'était épargné.
Le messager n'allait plus par les chemins,
le bateau de l'envoyé n'était plus halé sur le fleuve,
les bergers durent suivre les chèvres noisette d'Enlil par les chemins,
les bouviers durent suivre les vaches chassées de leurs étables.
Des repris de justice faisaient la police des routes, les routes étaient pleines d'assassins, les vantaux des portes des villes gisaient dans la boue.
Tous les pays pleuraient amèrement la destruction des remparts. Au milieu des villes, quoique ce ne fût pas la campagne, on installa des potagers... Les grands champs ne rapportaient plus d'orge, les champs inondés ne produisaient plus de poisson, les vergers irrigués ne donnèrent plus ni sirop, ni boisson alcoolisée. Et durant de longs jours, il ne plut pas, et l'arbre mashgurum ne poussa plus.
En ces jours, un demi-litre d'orge coûtait huit grammes d'argent, une demie-mine de laine coûtait huit grammes d'argent, un ban de poissons coûtait huit grammes d'argent : à ce prix, dans cette ville, il fallait payer.
Qui couchait sur le toit mourait sur le toit.
Qui couchait à l'intérieur de la maison n'était pas porté au cimetière.
Les gens, affamés, échangeaient des coups.
Sur le Ki-Ur, la grand place d'Enlil, le dieu rassembla les chiens des rues silencieuses.
Quand deux hommes passaient, ils étaient dévorés. Quand trois hommes passaient, ils étaient dévorés. Les faces étaient frappées, les têtes étaient cognées. Les nez étaient amoncelés, les corps gisaient comme des semences. Le juste se changeait en escroc, les corps de jeunes gens étaient amoncelés, et le sang du juste et de l'escroc coulait également.

Vers 149-192, version adaptée de Jacobsen, Jerrold Cooper et Pascal Attinger.
Manuscrits rédigés entre 2000 et 1800 av. J.C.
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Le roi Naram-Sin, pour punir le dieu Enlil de ses oracles défavorables, entreprend de démolir son temple Ekur dans la ville sainte de Nippur ("La malédiction sur Akkad", vers 105 à 148).

Tel un coureur fléchissant les genoux avant la course, le roi traversa la Terrasse sacrée comme un rien. Comme un pillard de villes, il appuya de grandes échelles contre le temple,
pour mettre en pièces l'Ekur comme un grand navire,
pour fendre son sol comme on fait d'une montagne aux métaux précieux,
pour le mettre en pièces comme on fait d'une montagne de lapis,
pour le terrasser comme une ville que le dieu Orage a renversée...
Comme un guerrier mort, le temple tomba face contre terre. Et tous les Pays tombèrent face contre terre.
Il arracha ses canalisations, et la pluie remonta au ciel.
Il arracha ses portes, et la force du Pays s'en alla.
A la Porte-d'où-le-grain-n'est-pas-détourné, il détourna le grain. Et le grain disparut de la main du Pays.
A la Porte-de-la-santé il donna de la pioche, et la santé des Pays disparut.
Comme un grand champ inondé par la crue printanière, il coula le métal de l'Ekur pour fabriquer ses fourches. Alors sur la divine Chambre à Coucher, qui ne connaît pas la lumière du jour, les gens portèrent le regard. Les gens d'Akkad portèrent leurs regards sur les coffres sacrés des dieux.
(...)
Tous les biens furent emportés loin de Nippur. Comme Naram-Sin emportait tous ces biens de Nippur, c'est le bon sens d'Akkad qui fut emporté. Comme ses bateaux ébranlaient le quai, c'est la raison d'Akkad qui fut ébranlée.

D'après les versions de Thorkild Jacobsen, Jerrold Cooper et Pascal Attinger.
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La malédiction d'Akkad (XXII° / XX°s av. J.C.) Sur un ordre tacite du dieu Enlil, depuis son temple de l'Ekur, les dieux protecteurs de la ville d'Akkad s'en vont.

Là-dessus tomba - comme un sinistre silence -
le verdict de l'Ekur.
Chargée d'effrayer Akkad,
Innana jeta l'effroi dans l'Ulmash,
et elle décampa de la ville.
Comme la jeune femme qui reprend son bien dans le gynécée,
la splendide Innana abandonna le temple Akkad.
Comme un guerrier qui va au-devant de l'ennemi,
elle reprit dans la ville armes et combats
et les donna aux ennemis.
Il ne fallut pas cinq jours, il ne fallut pas dix jours,
avant que Ninurta remise dans son Eshumesha la couronne royale, l'estrade et le trône qui avaient été donnés pour que le roi règne.
Utu remporta l'autorité hors de la ville.
Enki remporta son intelligence.
Sa gloire, qui avait atteint le ciel,
An la fit remonter au coeur du firmament.
Ses beaux poteaux d'amarrage, solidement fichés,
Enki les brisa dans l'Abzu.
Et Innana avait remporté ses armes.
La vie d'Akkad, le sanctuaire, atteignit son terme,
comme une petite carpe au fond des abysses.
Les autres villes avaient les yeux fixés sur elle.
Comme un gigantesque aurochs cornu, elle courba la nuque
et de concert, les autres villes levèrent leurs cornes contre elle.
Voilà Akkad qui laisse retomber sa tête comme un dragon mourant ...

Versions de Thorkild Jacobsen (p. 364) et de Pascal Attinger.
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Légende : comment l'écriture fut inventée. Les seigneurs d'Uruk-Kullab et d'Aratta s'envoient des défis par messager interposé, mais ce dernier n'est plus capable de tout garder en mémoire. Alors :

Mais ce jour-là les paroles
du seigneur sur son trône ...,
semence de princes ...
étaient difficiles,
leur signification avait totalement sombré.
Le messager - si graves étaient ces paroles -
ne pouvait plus les répéter.
A cause du messager
et de la difficulté du message,
il était impossible de le transmettre.
Le seigneur de Kullab
pétrit de l'argile de sa main,
et comme avec un sceau
il écrivit.
A ce jour
personne n'avait encore fait se tenir des paroles sur de l'argile.
Mais de ce jour, sous ce soleil,
il en fut ainsi.
Le seigneur de Kullab
fit se tenir des paroles sur de l'argile,
dès lors,
il en fut ainsi.

Enmerkar et le seigneur d'Aratta, vers 496-506, pp. 311-312, d'après plusieurs versions du texte.
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Les poètes sumériens, autant qu'on sache, n'employaient pas la rime. Le mètre et le rythme, que l'on imagine essentiels puisque la poésie était chantée, ne sont pas assez reconnaissables dans les textes pour inciter le traducteur à les imiter. Ce qui est clair et appréciable dans cette poésie, c'est la structure du sens, son travail subtil et raffiné sur les significations, et bien sûr son imagerie.
Le monde de cette poésie est très différent du nôtre. Il était dirigé par des dieux qui se réunissaient en assemblées pour décider des événements terrestres, de la construction d'un temple à la destruction d'un royaume. Les montagnes de l'actuel Iran étaient le pays des morts. Les habitants réels de ces montagnes étaient les ennemis de toujours. Les dieux, à l'origine des pouvoirs numineux présents dans les phénomènes naturels, prirent avec le temps une forme et une nature plus humaines, et étaient pris dans des relations sociales et familiales.

Préface de l'auteur p. 15
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