Citations sur Pas de pissenlits pour le cadavre (26)
Si Louise avait été plus objective, elle aurait admis qu’elle ne dépendait que de son mari pour sa distraction quotidienne. Lourd pour le même homme. Chloé lui semblait beaucoup plus rigolote puisqu’elles ne se voyaient qu’une à deux fois par semaine.
Je l’aime, le sexe est très chouette, mais… il est… enfin, je le trouve… barbant. Très. Je sais que ça paraît un peu incohérent.
Ça crée des liens durables. Louise, trente et un ans, le regard d’un clair noisette, assez grande, était aussi brune que Chloé. Ses longs cheveux épais et raides contribuaient à son indiscutable charme aux yeux masculins. Elle venait de divorcer de Raphaël, médecin légiste. Pourtant, Louise n’avait aimé qu’un homme : son ex-mari.
On peut, en effet, classer les humains en deux sous-catégories. Les gens bien et les autres. Les premiers : facile ! On discute des points de divergence. Comme on est entre gens de bonne foi, on parvient à un accord. Plié. Les autres tenteront toujours de vous rouler dans la farine ou de vous manger la soupe sur la tête. Sauf si on montre les crocs avant ou, du moins, que l’on fait comprendre qu’on a des crocs en pleine santé. Quoi de plus normal pour une dentiste ?
Délicat, la mise en scène d’une mignonne jeune femme, respectueuse de la propriété privée, en train de vandaliser une carrosserie parce que les connards ne peuvent pas toujours gagner, quelle que soit leur voiture.
Tant d’images, d’humiliations avaient défilé dans son esprit au cours de sa fuite de quelques minutes. Elle s’était arrêtée, stupéfaite. Son vandalisme ne lui procurait aucun remords. Au contraire, pour la première fois de sa vie, elle était fière d’elle parce qu’elle s’était défendue. Certes, de façon sournoise.
Elle avait ressenti la même fureur que le taureau devant lequel on agite une guenille rouge. Au début, le taureau, bonne pâte, songe que si le mec avec ses bas et son chapeau ridicule se calmait, les choses s’arrangeraient de façon civile. Le type en question ne veut rien savoir, et le taureau charge. Chloé n’avait pas de cornes. Dommage. En revanche, elle possédait un trousseau de clefs. C’est bien, les clefs. Ça ouvre les portes et, en plus, ça raye.
Je n’aurais pas pu euthanasier les animaux, sauf souffrances et maladie terminale ou chien ultra-agressif. On aurait fini avec une vraie ménagerie dans l’appartement.
Les « ouîîînk » « aaahhhh », « nôôôn », « on peut arrêter là ? », les gens qui essuyaient leurs mains moites sur leur jupe ou leur pantalon, dont les pieds tressautaient, la rendaient malade. Pire encore : les enfants sages et résignés. Certains ont un courage que pourraient leur envier nombre d’adultes.
Haletante, entre deux pouffements, elle se précipita dans la réserve et se servit un scotch tassé. Elle tremblotait tant que le bord du verre heurta ses dents. Une série de détails incongrus, pour ne pas dire préoccupants, s’additionnèrent. 1) Elle n’aimait pas le whisky. Aussi, pourquoi en boire ? 2) Pis, pourquoi en avoir planqué deux bouteilles dans son cabinet ? 3) Elle avalait maintenant les quarts de barrettes de Lexomil comme d’autres suçotent des Tic Tac. N’y avait-il pas là matière à interrogation, voire à alarme ? Depuis quelque temps, des cauchemars la réveillaient en nage. Elle se faisait happer l’index par un dentier mal réglé qui resserrait son emprise dès qu’elle se débattait. Elle perdait ses dents en pluie, sans en comprendre la raison. Un tueur psychopathe la saucissonnait sur son siège et approchait de sa bouche une énorme pince adaptée aux sections des tuyaux de plomberie.