AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,19

sur 534 notes
5
75 avis
4
57 avis
3
7 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je remercie Babelio et les éditions Bamboo de m'avoir envoyé Celle qui parle d'Alicia Jaraba en échange de mon avis.

À la réception de cette BD, j'ai été étonnée par sa taille ! Mais il faut bien 220 pages pour narrer de destin exceptionnel d'une figure féminine historique que je ne connaissais pas et qui a pourtant marqué l'histoire du Mexique : Malinalli alias la Malinche.

De fille de chef de clan à esclave…

Bien qu'il y ait encore beaucoup de flou autour de cette femme, Alicia Jaraba a fait le pari ambitieux de combler les failles de l'Histoire en nous proposant un récit mêlant réalité et fiction. Et le résultat est à la hauteur de ce que l'on peut espérer de ce genre de démarche : passionnant et assez intrigant pour donner envie d'effectuer ses propres recherches. J'ai ainsi pris beaucoup de plaisir à découvrir Malinalli, une jeune femme qui jamais n'acceptera sa condition dans une société précolombienne où les femmes n'ont pas le droit à la parole.

Bénéficiant d'un peu plus de liberté que les autres femmes, grâce à son statut de fille de l'ancien chef de son clan, Malinalli sera néanmoins vendue comme esclave, avant d'être offerte, quelques années plus tard, par Hernán Cortès à l'un de ses hommes. D'esclave à objet sexuel, le destin de la jeune femme n'est pas enviable bien, qu'apparemment, commun dans ce Mexique du XVIe siècle. Cette vie de soumission imposée n'entachera néanmoins jamais sa détermination, Malinalli faisant preuve d'un courage et d'une force de caractère impressionnants. Au fil des pages, j'ai été éblouie par sa personnalité hors norme, sa capacité à ne pas se laisser dominer par les hommes qui peuvent posséder son corps, mais pas briser son esprit.

Un talent pour les langues au service des conquistadors…

Fine stratège, observatrice et douée pour les langues, Malinalli va, petit à petit, s'imposer auprès des conquistadors, ces derniers rêvant de s'emparer des richesses et de l'or du Mexique et de soumettre les Mexicas. Un peuple à l'influence tentaculaire qui exige des autres toujours plus de « dons », d'esclaves et de personnes à offrir en sacrifice. Un peuple responsable de la mort du père et de la soeur de Malinalli enlevés puis sacrifiés comme beaucoup d'autres. On peut alors comprendre qu'elle décide de collaborer avec les conquistadors contre les Mexicas, leur violence et leurs exigences démesurées qui vident les clans de leurs habitants et de leurs possessions.

Si la jeune femme devient traîtresse aux yeux de certains, on découvre l'importance de son rôle d'interprète dans la paix. Ainsi, grâce à sa capacité à comprendre et parler plusieurs langues, elle va permettre d'éviter que certaines situations ne dégénèrent, mettant des mots là où les opposants n'entendent que des sons étranges. Malinalli fera également preuve d'un sens redoutable de la diplomatie, choisissant quoi traduire et surtout comment reformuler les propos des uns et des autres. Un talent qui se conjugue à merveille avec son don pour les langues, deux choses qui feront d'elle un atout pour Hernán Cortés.

Une femme d'exception qui fera de son mieux avec les circonstances…

Ce dernier semble d'ailleurs réaliser l'importance stratégique de Malinalli, de « celle qui parle » dans un pays et à une époque où les femmes sont cantonnées au silence et à la soumission. Intelligente et débrouillarde, il y a quelque chose d'avant-gardiste et de visionnaire dans cette jeune femme qui ne fait pas unanimité parmi les siens, mais qui réussira à nouer des amitiés sincères que ce soit avec une Maya ou une Espagnole. Nouvelle preuve de sa capacité à faire le lien entre différents peuples… le contexte historique est difficile, mais au fil des pages, on découvre également quelques instants de bonheur simple, une belle transmission intergénérationnelle et une certaine solidarité féminine.

Tout autant d'éléments qui aideront Malinalli à affronter les épreuves et l'opprobre des siens devant sa collaboration avec l'envahisseur espagnol. Un envahisseur qui va faire montre d'une attitude abjecte, se jouant de l'ignorance des Mexicains des armes à feu, les spoliant de leurs richesses, les manipulant sans vergogne, et obligeant les peuples avec lesquels il s'allie contre les Mexicas à renoncer à leurs propres cultes et dieux. Des actes immondes qui vont pousser Malinalli à imposer, autant que faire se peut, ses propres règles et à tenter de limiter les changements imposés par les conquistadors. Difficile donc de simplement et purement condamner une jeune femme qui fera de son mieux pour limiter le règne de la terreur des Mexicas avec les moyens dont elle dispose, sa connaissance des langues, et les alliés que les circonstances lui imposent, les Espagnols.

Une ambiance graphique immersive, colorée et expressive…

Malinalli, devenue la Malinche, est une figure féminine extraordinaire que j'ai adoré découvrir à travers cette BD, même si c'est de manière romancée. Mais au-delà de sa personnalité qui suscite l'admiration ou la désapprobation selon son point de vue, l'autrice nous offre une immersion convaincante dans la société précolombienne et un Mexique pluriel et varié dans lequel cohabitent plus ou moins pacifiquement différents peuples. le voyage fut d'autant plus agréable que les éditions Bamboo nous offrent ici une édition de qualité avec un ouvrage robuste et épais, mais agréable à prendre en main. En plus de la qualité du papier et d'une mise en page claire, les marges se révèlent suffisantes pour permettre aux lecteurs de lire la BD sans avoir peur de l'abîmer.

Dans une histoire où la parole est essentielle et le dialogue une nécessité, j'ai trouvé, en outre, particulièrement intelligent d'introduire chaque partie par des mots de vocabulaire empruntés aux différentes langues autochtones et à l'espagnol. Mais je reconnais avoir surtout apprécié que chaque partie soit introduite par une carte avec un repère visuel permettant de situer le lieu de l'action… Quant aux illustrations, j'ai été saisie par leur puissance dans la mesure où l'autrice arrive à retranscrire les émotions des personnages, du sentiment de révolte pur à la tendresse en passant par la colère et l'espoir. La gestion des couleurs se révèle également intéressante et dénuée de toute monotonie, précaution indispensable pour une BD de cette taille ! Teintes violacées ou bleutées, verts de différentes nuances… En fonction des événements, des lieux et des saisons, la palette de couleurs évolue, nous offrant différentes ambiances graphiques toutes très immersives.

En conclusion, mêlant fiction et réalité, Alicia Jaraba nous propose avec Celle qui parle une BD ambitieuse autant sur le fond que la forme. D'un trait assuré qui s'adapte à toutes les situations, elle nous plonge avec force dans la vie d'une figure féminine contestée de l'histoire mexicaine, mais une figure historique fascinante qui a su s'imposer dans un monde difficile où les femmes étaient réduites au plus primaire des silences. Traîtresse pour les uns ou héroïne qui a oeuvré à sa manière à la paix pour les autres, peu importe finalement, la seule chose à retenir étant la force de caractère d'une femme d'exception qui a su faire le pont et le lien entre différents peuples. Une femme qui avec courage et détermination a inscrit son nom dans l'Histoire !
Lien : https://lightandsmell.wordpr..
Commenter  J’apprécie          200
Au XVIe siècle, l'empire Aztèque s'étend de plus en plus et le clan de la jeune Malinalli en fait les frais. Ils demandent toujours plus d'offrandes et pour éviter la famine, un jour, Malinalli est vendue comme esclave à un village Maya, bien qu'elle soir d'origine noble. Village qui va finir par recevoir la visite d'un conquistador espagnol : Herman Cortés.

Basé sur des faits réels bien que très parcellaires, Alicia Jaraba nous offre son histoire de la Malinche. Figure féminine légendaire de la conquête espagnole au Mexique, cette jeune femme va devenir la traductrice et la conseillère de Cortes lors de ses combats contre les aztèques.
J'ai adoré le personnage de Malinalli, malmenée par la vie. Elle était noble, bien éduquée, destinée à une place enviée auprès de son peuple. Elle deviendra esclave mais quand Cortes débarque sur les côtes mexicaines, sa connaissance des langues deviendra son meilleur atout.
Au Mexique elle a désormais plutôt la réputation de traite à sa patrie car elle a aidé les espagnols. Mais à l'époque c'était beaucoup plus compliqué que ça car les nombreux peuples precolombiens etaient ennemis, et les alliances se nouaient ou se dejouaient pour tuer un clan rival. Malinalli dans tout cela à survécu avec courage tout simplement. Mais dans le parcours créé par Alicia Jaraba, elle ne manque pas de doutes, de culpabilité, de renoncement, d'espoir... Ce qui fait de la Malinche un personnage très humain, très touchant.

Le dessin simple et expressif a une douceur qui colle parfaitement au récit. Les émotions, les pointes d'humour, les moments de tendresses passent avec fluidité.
Cet épais volume de 215 pages fût une très belle découverte et j'en remercie chaleureusement Babelio qui me l'a offerte au cours d'une Masse Critique.
Commenter  J’apprécie          190
À partir de très minces indices historiques sur la vie du personnage réel de Malinche, l'autrice en dresse un portrait magnifique, sensible, tout en s'appuyant sur ce que L Histoire a conservé de faits réels : la conquête du Mexique par Hernan Cortès, la puissance militaire des Espagnols, leur stratégie consistant à jouer sur les antagonismes entre les peuples.
Sur cet arrière-plan, Alicia Jaraba Abellan construit par petites touches une autre Histoire, celle des peuples et surtout celle des femmes, solidaires entre peuples et entre générations. Entre elles il y a transmission de connaissances, par exemple médicinales, il y a empathie et même humour.
Le rôle de traductrice de l'héroïne Malinalli donne son rythme au récit, chaque chapitre correspondant à un nouvel épisode et à une nouvelle langue qu'elle apprend. La communication est représentée de façon ingénieuse, dans des illustrations dont j'ai tout aimé : trait, couleurs et bien sûr... cartes.
Challenge Bande dessinée 2022
Commenter  J’apprécie          182
Passionné de culture mésoaméricaine depuis l'enfance, je connaissais déjà l'extraordinaire destin de la Malinche, personnage féminin le plus admiré et controversé de la Conquista, la conquête du Mexique par les conquistadors. Cette femme d'exception est tout à la fois « le symbole de la trahison, la victime quintessentielle, et la mère symbolique du peuple mexicain moderne ». Son véritable nom de naissance est inconnu, mais on la nomme volontiers Malinalli (herbe en náhuatl, la langue aztèque). Rebaptisée Marina par les conquistadors, elle sera finalement appelée Malintzin en náhuatl, Doña Marina en espagnol, et plus communément La Malinche. On lui attribuera même le titre de Malintzin Tenepal (celle qui parle avec vigueur ou habileté).

Malinalli est née au coeur des territoires dominés par les Mexicas (les Aztèques). Après la mort de son père, un chef de tribu indigène, la jeune fille est vendue en esclavage à un cacique maya de la région Potonchán. C'est là qu'elle apprend la langue maya qui lui permettra plus tard de converser avec Jerónimo de Aguilar, interprète auprès de Hernán Cortès, le fameux explorateur et conquistador espagnol. Ce dernier fera de Malinalli son interprète personnel, et les témoignages historiques laissent comprendre que son rôle alla bien au-delà. Elle eut même un fils de Cortès. Est-ce que le célèbre conquistador aurait réussi à vaincre l'Empereur aztèque Moctezuma II sans elle ? Nous ne le saurons jamais…

L'adaptation d'Alicia Jaraba est très fidèle à l'histoire connue de la Malinche, même si l'autrice explore son personnage de manière intime en se focalisant sur sa relation à la parole, au corps, ou avec les hommes. Il s'agit même d'un véritable cheminement initiatique pour la jeune Malinalli, depuis les premières menstruations jusqu'aux relations sexuelles non consenties avec son maître maya puis un conquistador. On la voit découvrir et manier diverses langues, s'imposer dans un monde d'hommes, avant de jouer un rôle majeur dans la stratégie de conquête de Cortès. La Malinche est-elle une victime, un outil, ou la seule maîtresse de son destin ?

J'ai apprécié les diverses cartes intégrées à la narration, la mise en couleurs alternant des gammes de tons chauds et froids, les jeux de bulles illustrant la complexité des échanges oraux, ainsi que la postface de l'autrice expliquant son travail.
Commenter  J’apprécie          170
J'avais étudié dans le cadre de mes cours d'espagnol à l'Université, la conquête de l'Empire Aztèque par les Conquistadors menés par Hernan Cortes. C'était à cette occasion que j'avais fait la découverte du personnage très controversé de la Malinche. Aussi, dès que Babélio que je remercie au passage ainsi que les éditions Grand Angle pour m'avoir envoyé le livre, m'a proposé cette bande dessinée lors d'une Masse critique spéciale, je n'ai pas hésité à participer. Et j'ai bien fait car j'ai eu un véritable coup de coeur!

Au début du XVIème siècle, Mallinalli est la fille d'un des caciques du village nahua d'Oluta au Mexique actuel. Elle a reçu une excellente éducation et son père a tenu à ce qu'elle apprenne la langue de leurs voisins, les Aztèques. En 1511, la jeune adolescente a perdu son père et sa petite soeur, tous les deux emmenés pour être les victimes de sacrifices humains perpétrés par les Aztèques. Si elle a encore sa grand-mère et sa mère, cette dernière s'est remariée avec un autre homme qui fait sentir tous les jours à Mallinelli qu'elle est de trop dans sa famille. Un soir, elle est emmenée en plein milieu de la nuit par des inconnus pour être vendue en tant qu'esclave au peuple Maya plus au sud, dans le Yucatan. Elle apprend alors la langue de ses maîtres, des compétences linguistiques qui seront précieux lorsque les navires d'Hernan Cortes débarquent en 1519…

Une bande dessinée historique…

Ecrire le scénario de Celle qui parle n'a pas dû être facile pour Alicia Jaraba tant les sources historiques sont peu nombreuses et bien souvent lacunaires à propos du personnage de la Malinche. Si cette dernière n'a elle-même pas laissé d'écrits, elle est surtout connue grâce aux récits de témoins directs de la Conquista et proches d'Hernan Cortes (les Espagnols Andres de Tapia, Francisco Lopez de Gomora et Bernal Diaz de Castillo) mais aussi d'un Codex aztèque plus tardif (milieu du XVIème siècle), le Lienzo de Tlaxcala. Alicia Jaraba a donc dû combler les vides notamment sur la jeunesse de Mallinalli et sa vie avant l'arrivée des Espagnols. Bien que l'on ne saura jamais l'exacte vérité, j'ai trouvé cette partie romancée bien écrite et plaisante à lire.
Pour en revenir aux faits avérés, on sait que Mallinalli était issue du peuple Nahua et qu'elle avait appris la langue des Aztèques. Au moment de l'arrivée des Espagnols, elle était esclave chez les Mayas, avait également appris leur langue et avait une vingtaine d'années environ. Avec vingt autres esclaves, elle a été donnée aux Espagnols et la jeune femme s'est faite baptisée sous le nom de Marina. Repérée pour ses dons linguistiques (elle apprend également l'espagnol), elle devint la guide, la conseillère, l'interprète d'Hernan Cortès et son amante dont elle aura un fils. On perd complètement sa trace après 1528.

… écrite et dessinée par une linguiste.

Avant de devenir dessinatrice de bande dessinée, Alicia Jaraba a étudié les langues et la littérature espagnole et française. Dans sa post-face, elle rajoute également :

« J'ai été traductrice à maintes reprises, donc je sais combien il est difficile d'établir une communication entre deux personnes qui viennent de milieux différents et ne parlent pas la même langue. (P. 216) »

Et cette formation se ressent dans la manière avec laquelle Alicia Jaraba a écrit sa bande dessinée. En effet, elle a mis l'accent sur l'apprentissage des langues par Mallinalli et certains chapitres commencent par des mots de la langue Nahual, Maya, Aztèque ou Espagnole formulés par la jeune femme elle-même. Une compétence précieuse qui va jouer un rôle important non seulement dans la vie de Mallinelli puisqu'elle se fera remarquer par Hernan Cortès mais aussi dans la Conquista de l'Empire Aztèque.

Autre originalité de la bande dessinée, la ou la lecteur(ice) a le point de vue de Mallinelli sur la Conquista ainsi que celui des peuples de la région actuelle du Mexique ce qui est suffisamment rare pour être signalé. En effet, tous les récits que j'avais pu lire auparavant sur cette période provenaient surtout du point de vue des Européens.

La Malinche, un personnage historique controversé.

Mallinelli était respectée par les Espagnols car ils sembleraient qu'ils lui aient donnée le titre de « Doña » ce qui signifie « Dame » dans leur langue ainsi que le surnom de « Malinche ». Ce dernier deviendra péjoratif bien après sa mort et aujourd'hui, le « Malinchismo » désigne des personnes qui trahissent leur pays et leur tradition préférant les us et coutumes étrangères. Alicia Jaraba parvient parfaitement à retranscrire le paradoxe qui entoure le personnage de Mallinelli dans sa bande dessinée et la rend humaine :

D'un côté, la jeune femme est considérée comme une traîtresse par les Mexicains car elle a aidé les Espagnols à défaire les Aztèques en un temps record et à créer la colonie de la Nouvelle Espagne.
De l'autre, elle était aussi une esclave qui n'avait pas d'autres choix que d'obéir et de subir. Par ailleurs, certains pensent qu'elle a aussi sauvé une partie de son peuple grâce à la communication et à ses négociations.

En conclusion, Celle qui parle d'Alicia Jaraba est une bande dessinée remarquable. Si les sources manquent parfois notamment pour reconstituer la jeunesse de la Malinche, l'autrice s'en sort plutôt bien avec un récit certes romancé mais agréable à lire. Les deux principales originalités de cette bande dessinée résident également dans le fait que les langues prennent une place non négligeable dans le récit et surtout, la Conquista est relatée du point de vue des Amérindiens et de la Malinche en personne. Enfin, si elle est aujourd'hui un personnage historique très controversé dans l'Histoire de la construction du Mexique, l'autrice et dessinatrice espagnole parvient parfaitement à la rendre humaine. Bref, un véritable coup de coeur!
Lien : https://labibliothequedaelin..
Commenter  J’apprécie          170
Roman graphique vibrant d'Histoire, d'espoirs et de questionnements. Narrant l'histoire d'une jeune héritière d'une tribu vendue comme esclave, le lecteur parcourt des kilomètres à la rencontre des différentes tribus, langues et coutumes. Et évidemment en cette période d'explorations, l'on tombe sur les espagnols menés par Cortés. Les vignettes larges, dépaysantes mais également chaleureuses, même dans le plus grand dénuement ont cet art de toucher, d'ouvrir les esprits et les questionnements liés aux conquêtes dévastatrices. le personnage de "celle qui parle" m'était complètement inconnu et c'est avec plaisir que je l'ajoute à ma petite galerie personnelle des femmes qui ont marqué le monde et dont on a tu le destin.
Commenter  J’apprécie          160
Dans cette bande dessinée, nous sommes sur un récit historique se déroulant au XVIème siècle entre les Mayas, les Aztèques, et surtout l'arrivée de l'espagnol "Cortez", le conquistador qui va mener une guerre impitoyable pour coloniser la région.

Dans cette période, une jeune femme, "La Malinche" va devoir survivre, et pour cela elle apprendra les différentes langues telles le Mexicanas (Aztèque), le Maya, l'Espagnol.

Les personnages ainsi que la vie de l'époque sont très intéressants à suivre, les décors donnent du rêve malgré la dureté de l'histoire et l'on parcours les 200 pages de cette BD "one-shot" sans s'en rendre compte.

En plus de la "conquête" espagnole en elle-même, j'ai pris plaisir à découvrir les us et coutumes de l'Amérique précolombienne, et les thèmes abordés comme le rôle des femmes dans cette société dure et machiste au possible, très violente, l'entraide, mais aussi la trahison par peur de l'autre, le féminisme inconscient mais bien présent, l'amour et la haine qui se font face comme un miroir déformé.

Visuellement c'est stylisé et vraiment superbe, j'ai adoré les dessins, les couleurs, la mise en page très fluide.

Je ne peux "que" vous conseiller cet excellent album.
Commenter  J’apprécie          160
Quelle heureuse surprise que ce message de Babelio me proposant de participer à la Masse Critique spéciale "Celle qui parle" de Alicia Jaraba Abellan. En effet, intéressé par les civilisations précolombiennes et ayant lu de nombreux ouvrages sur ce sujet, une BD sur la Malinche ne pouvait que m'attirer. Ce 22 mars, l'objet convoité était entre mes mains, et, malgré une journée de boulot, je l'ai dévoré avant que les douze coups de minuit ne sonnent.
Je peux déjà prévenir que je suis heureux de l'envoi des éditions Grand Angle. Tout m'a emballé : l'histoire, l'objet livre en lui-même, les dessins et les couleurs très colorées choisies par Alicia Jaraba Abellan, le message de féminisme que porte sur ses frêles épaules la tenace Malinche. Seul petit bémol, qui a coûté une demi-étoile : dommage que l'histoire s'arrête aux portes de Tenochtitlan et que nous n'y pénétrions pas...
Commenter  J’apprécie          161
Elle est Celle qui parle, celle qui veut charger sa parole d'espoir et faire cesser le sang de couler.
Son sang est désormais descendu et donné en offrande à Tláloc. de fille de chef elle deviendra femme esclave de conquistadors étrangers, vendue par ceux liés à son sang. le sang de son peuple offert en sacrifice à Huitzilopochtli (divinité de la guerre) par l'oppresseur aztèque ne coulera plus dans les temples, il s'épanche désormais des blessures faites par les armes à tonnerre des hommes blancs au dieu unique.
La Conquista est inévitable, le sang coule. Elle sera alors celle qui boira le vin des espagnols et déliera sa langue pour apprendre ces mots qui attaquent et défendent, vendent et achètent, négocient et conquièrent. Ces mots seront sa seule arme pour aider l'alliance indigènes à en finir avec l'hégémonie mexicaine (aztèque), survivre à l'esclavage et étancher la soif de sang de Hernan Cortès. Elle se dépouillera de ses noms de naissance - Malinalli (divinité de l'eau) - et d'esclave - Marina -, acceptera de porter celui respectable de Malintzin - Celle qui parle - sans mesurer que sa voix de femme resterait muette ou que celle d'un grand homme ne vaudrait rien, sans présager qu'elle sera celle par qui le sang se mêlera.

Alicia Jaraba porte un regard féminin et très personnel – en tant que femme d'origine espagnole et linguiste - sur le personnage controversé de l'Histoire mexicaine, la Malinche, interprète (et victime consentante ?, femme influente dans l'ombre ?) de Cortès. Elle fait de Malinalli, précieuse plante poussée en herbe folle, un vertueux symbole de la désobéissance : elle est celle qui parle et refuse qu'on la fasse taire. Elle ne minimise pas les conséquences des actes de Marina qui redessineront de manière irrémédiable la face du monde. Elle ne juge pas la Malintzin, elle fait un portrait édulcoré et adapté à un public adulescent d'une jeune femme libre dans toute son humanité. Ce scénario émouvant, l'auteur l'illustre et le colorise également pour un récit au résultat harmonieux.

Le découpage des cases est classique sur l'ensemble des 200 pages de ce roman graphique. Les grandes cases en toute simplicité ne sont pas avares des détails nécessaires à la lisibilité des émotions, essentiellement concentrées sur chaque visage féminin. Notre regard est irrémédiablement attiré vers les grands et ronds yeux noirs (ou rouges sang) et les lèvres charnues de Malinalli, sur ses traits enfantins du début du récit, à ceux à la perte de son innocence chargés d'incompréhension, de détresse, de colère ou encore de désolation, mais aussi parfois de joie et de reconnaissance ; des traits qui deviendront radieux et sereins lorsque sa décision d'être la Malintzin sera irrévocable. Les émotions sont la première ligne narrative du récit avec un éventail brillamment accentué par la juste absence d'un regard, d'une bouche, voire du visage en sa totalité, ou par l'exagération d'attributs comme les dents des mexicas et conquistadors pointues et acérées pour souligner leur avidité vampirique.
La deuxième ligne narrative traite de la linguistique et le travail d'Alicia Jaraba est remarquable. Chaque chapitre est introduit, outre par une carte et la datation, par une illustration de la bouche de la Malintzin aux traits doux pour sa langue natale le popoluca, sévères pour le dialecte des traîtres et des esclavagistes le náhuatl et le maya chontal, curieux et colérique pour l'espagnol, accompagnés de bulles des mots clés qui scelleront son sort. Des pages entières lourdes de sens demeureront muettes avant une reprise de la parole assurée et assumée. Les bulles des nombreuses langues traduites parfois dans la même case sont idéalement superposées ; pour d'autres, l'auteure utilise des dessins en remplacement du lettrage pour éviter la surcharge : des traits incisifs verticaux pour les conquistadors, des arabesques pour les dialectes amérindiens.
La finesse des détails de Celle qui parle trouve un parfait équilibre avec la colorisation aux couleurs sobres et lumineuses, tout en jeu d'ombre et de lumière, qui contraste savamment les émotions fortes et contradictoires, saisissantes jusqu'à la dernière page.
Merci à Grand Angle (et Babelio) pour la découverte de cette importante figure féminine du monde.
Commenter  J’apprécie          160
CELLE QUI PARLE raconte la vie trépidante de Malinalli, une autre Pocahontas, qui était fille de chef Maya et vécut au XVIe siècle dans la péninsule du Yucatán.
Son histoire, contrariée par les ennemis de son peuple qui furent d'abord les Aztèques puis les Conquistadores espagnols, fut d'une exceptionnelle richesse.
Elle fera beaucoup mieux que s'inscrire au sein de la grande Histoire collective ; sa volonté, son indépendance d'esprit et son féminisme naissant, vont devenir des biens communs propres à toutes les femmes.

Le scénario s'inspire de la vie réelle d'une jeune femme courageuse, intelligente, cultivée et libre malgré son statut d'esclave qui lui pesa fortement pendant une grande partie de sa vie.
Elle était douée de la faculté d'apprendre et de parler plusieurs langues. Une grande partie de son intelligence sociale singulière - ce qui lui permit de bien comprendre les autres (leurs pensées et leurs sentiments) et d'agir efficacement - lui vinrent des discussions qu'elle eut enfant et adolescente avec sa grand-mère érudite et perspicace.
Femme adulte, elle a osé parler en son nom propre et, plus important encore, elle a su dire non aux hommes de son clan, puis à ses bourreaux et à ses maîtres. Plus tard elle saura aussi se dévouer pour épargner de la peine à ses compagnes d'infortune, ou les sauver.
Elle emmènera dans son sillage bien d'autres femmes de son époque et certainement, par un effet de rebond, celles des siècles à venir.

Et pourtant…
A la mort de son père, Malinalli, à peine pubère, est vendue par les dignitaires de son clan comme esclave afin travailler dans les champs de maïs d'un clan plus puissant. Mais dès sa puberté, elle doit assouvir les caprices sexuels de son nouveau maître.
Miriam, la jeune femme juive qui accompagne les Conquistadores, a été convertie de force à la religion catholique après que l'Inquisition eut assassiné ses parents. Elle fut emprisonnée dans un cachot putride et violée chaque jour par un prêtre inquisiteur. Son avis sur la docte morale chrétienne était à jamais gravé. Elle croisera les pas Malinalli pour leur plus grand bien à toutes les deux.
Jerónimo, un jeune homme Espagnol, seul survivant d'un naufrage près de la côté du Ma'Ya'ab, a été recueilli et soumis en esclavage pendant huit années dans une tribu dont il apprit la langue Maya, les us et coutumes et que, contrairement aux usages en Europe, la propreté du corps ne nuisait en rien. Il y fera aussi la connaissance du panthéon Maya et rendra depuis un culte secret au dieu aztèque de l'eau, Tláloc « celui qui fait ruisseler », « celui qui sème ».
Un culte secret… car en ce temps là, les Espagnols aveuglés par un Christ vengeur et inquisiteur n'aimaient pas les dieux différents de celui qui régentait - dans le sang - la religion qu'ils avaient embrassée.
Les parcours parallèles de Jerónimo et Malinalli comme traducteurs auprès des puissants fut pour eux l'occasion de partager leurs richesses sociales, sociétales.

Alicia Jaraba, l'auteur, croit fermement au pouvoir absolu de la parole et de la communication.
Son héroïne est vraiment formidable !
Cet album est décidément une très bonne pioche !!!
Commenter  J’apprécie          150




Autres livres de Alicia Jaraba Abellán (2) Voir plus

Lecteurs (926) Voir plus



Quiz Voir plus

Les personnages de Tintin

Je suis un physicien tête-en-l'air et un peu dur d'oreille. J'apparais pour la première fois dans "Le Trésor de Rackham le Rouge". Mon personnage est inspiré d'Auguste Piccard (un physicien suisse concepteur du bathyscaphe) à qui je ressemble physiquement, mais j'ai fait mieux que mon modèle : je suis à l'origine d'un ambitieux programme d'exploration lunaire.

Tintin
Milou
Le Capitaine Haddock
Le Professeur Tournesol
Dupond et Dupont
Le Général Alcazar
L'émir Ben Kalish Ezab
La Castafiore
Oliveira da Figueira
Séraphin Lampion
Le docteur Müller
Nestor
Rastapopoulos
Le colonel Sponsz
Tchang

15 questions
5233 lecteurs ont répondu
Thèmes : bd franco-belge , bande dessinée , bd jeunesse , bd belge , bande dessinée aventure , aventure jeunesse , tintinophile , ligne claire , personnages , Personnages fictifsCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..