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Une vieille dame décide de raconter ses journées sur un dictaphone. Elle vit a l'hôtel Paradis et destine ses audios à sa fille Lidia Jorge qui est écrivaine. Elle raconte son quotidien. Ses rêves, cauchemars, et la vie qui coule lentement au fil des jours qui passent.
C'est un texte original car on rentre dans les pensées parfois floues et décousues d'une vieille femme qui vit en maison de retraite.
L'hôtel Paradis n'est rien d'autre qu'une maison de retraite. La maman de Lidia a peur du noir, peur de la nuit, peur de perdre la mémoire. Elle a parfois des obsessions, elle fait souvent des crises de colère, use la patience du personnel, et souvent est un brin paranoïaque.
Elle a eut une vie bien remplie et ne souhaite pas qu'on l'oublie. Même si parfois, ses idées sont confuses, elle reste très alerte et observatrice.
Elle se fait des amitiés puis voit ses amis mourir et disparaître, c'est triste.
Je n'ai pas trouvé ce texte très joyeux car on sent la fin proche.
J'ai trouvé également que le texte n'est pas fluide et assez dense. Pas toujours aisé de suivre les réflexions de cette femme.
Bref, je vous invite à vous faire votre propre opinion.
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L'auteure Lidia Jorge, femme de 77 ans en 2023 m'a fait forte impression lors son passage sur Arte, une dignité et une présence peu commune. “Misericordia” décrit les derniers mois de la vie de sa mère Maria Alberta, jusqu'à la pandémie de Covid et l'enfermement effrayant qui en découle.
Un Ehpad c'est parfois ce qui nous attend.. Lidia Jorge ne nous épargne rien.. chute du lit dans ses excréments ou dans son sang; le crâne esquinté.. le souhait de mourir et d'en finir, mais le livre va beaucoup plus loin, Maria Alberta est aussi pleine de vie, le récit navigue entre humour, poésie, noirceur. le titre est sans doute révélateur : Misericordia, traduction: Générosité entraînant le pardon, l'indulgence pour un coupable, compassion pour la misère d'autrui. Qui est le coupable ? le pardon pour qui ? pour la famille, l'administration, la société..
Faut- il s'émerveiller de l'activité mentale de Maria Alberta l'héroïne ou de celles des personnes âgées ? Non ! La vieillesse ne ralentit pas l'activité cérébrale. Ces institutions sont méritantes mais toujours plombées par la chosification des résidents et par la rentabilité nécessaire de leur hôtellerie..
On pourrait aussi gloser sur la situation de l'humain non productif . Humain non productif égal sous-homme. C'est un peu le sujet.
Qu'est-ce qui m'a plu dans ce texte ? Je m'identifie facilement à cette femme seule avec ses pensées qui prennent aux tripes “quand la nuit sort des murs”, un environnement parfois riche et gai en événements mais aussi d'abandon et de dépaysement mortifére.
La tristesse des pensionnaires lorsque l'un des leurs décède , la mort est vécue comme un non événement, elle est non-dite. Les résidents entendent juste une ambulance partir , pas de présence à une quelconque cérémonie collective , rien… Ahhh !.. si les Ehpad fonctionnaient comme des monastères ou comme certaines communautés laïques, ce serait une vraie et chaleureuse collectivité humaine.
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Ce roman est une pure merveille de sensibilité et de poésie. le titre Misericordia a été choisi par Lidia Jorge à la demande de sa mère décédée en Ehpad du Covid en avril 2020. Miséricorde pour les personnes dépendantes, placées en Ehpad, et que la société ne veut plus voir, miséricorde pour les employés, sous-payés, exploités car sous-qualifiées, autre catégorie invisible qui hante nos services de santé. Tel est le sens que donne Lidia Jorge à ce titre. Avec cette oeuvre, l'auteure fait mémoire de sa mère afin de faire son deuil et rendre hommage à cette femme d'une grande intelligence et qui fut digne jusqu'au bout.

L'héroïne de ce livre est Maria Alberta Nunes Amado, entrée de son plein gré à l'Hôtel Paradis, une résidence pour personnes âgées, constatant qu'elle n'était plus suffisamment autonome pour vivre seule. La perte de l'autonomie est la question centrale de la vie en Ehpad. Comment garder sa dignité quand on dépend de la bonne volonté de l'autre pour tout acte de la vie quotidienne : se laver, se déplacer, se coucher, ramasser un objet… Sans oublier les vexations de la vie quotidienne : être oublié dans un couloir, les petits larcins, les humiliations… Et pourtant, dans cet Hôtel Paradis, dona Alberti, femme de caractère, entre en résistance contre le temps qui passe et la décrépitude, la perte de mémoire, en notant chaque jour quelques pensées. Elle s'émerveille de la pluie qui tombe, s'inquiète de la sécheresse qui assoiffe les plantes. Elle participe à la vie de la communauté, observe les incidents de la vie quotidienne, défend ses amies. Elle attend avec impatience les visites de sa fille avec qui elle a parfois des rapports conflictuels concernant les livres qu'elle écrit. Elle aimerait tellement que sa fille ait du succès ! Dona Alberti porte un regard bienveillant sur les aides-soignants, ces jeunes filles et ces jeunes hommes qui, pour la plupart, ont fui la pauvreté de leur pays et viennent chercher au Portugal émancipation et reconnaissance. Elle s'attache en particulier à Lilimunde, une jeune brésilienne de 17 ans dont elle devient la confidente. Puis la pandémie se déclare et l'Hôtel se referme sur ses pensionnaires qui décèdent les uns après les autres… Cette dernière partie est la plus poignante car elle nous rappelle l'abandon total qu'on vécut nos anciens. Il faudra un jour tenter de comprendre les raisons de cette faillite morale. Et peut-être construire un mémorial aux victimes invisibles de la pandémie qui a révélé que nous ne sommes pas égaux face à de tels évènements. Lidia Jorge en a posé la première pierre avec ce magnifique récit.
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Miséricordia est le journal d'une vieille dame en maison de retraite.
Dona Alberti enregistre ses pensées sur un petit magnétophone pour sa fille écrivaine. Une année de vie où elle parle de ses nuits, ses secrets enfouis et de la vie des résidents de l'Hôtel Paradis. Un récit atypique.
Une belle leçon de vie.

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J'ai toujours beaucoup aimé l'écriture de Lydia Jorge.

D'elle j'avais lu en 2017 « La dernière femme », et je me souviens très bien le choc littéraire que sa lecture m'avait provoqué, et que j'avais tenté de restituer dans un billet. La grande autrice portugaise a écrit de nombreux romans que j'ai et aimé, comme « le vent qui siffle dans les grues », que je vous recommande, ou « le Rivage des murmures », ou bien encore, à propos de la Révolution des oeillets, « les Mémorables ».

Misericordia » est "un pas de côté" dans l'oeuvre de la grande autrice portugaise.

Qui a déjà essayé en effet de décrire le quotidien d'une vie en EPAHD à la première personne ? C'est le défi qu'a relevé Lidia Jorge, en s'inspirant directement de sa propre expérience de sa relation à sa mère, disparue pendant le COVID, en la romançant.

Dona Maria Alberta est une femme d'un certain âge, comme on dit pudiquement, dotée d'un sacré caractère. Elle vit dans cet Hôtel Paradis, un établissement pour personnes âgées. Elle attend régulièrement la venue de sa fille écrivain, même si parfois ces visites lui causent bien du tourment.
Le matin elle a droit à la toilette effectuée par le personnel soignant, toujours trop rapide comme dans toute maison de retraite, puis elle est conduite en fauteuil roulant auprès des autres résidentes, puisqu'elle n'a plus l'usage ni de ses jambes ni de ses mains.

Et il se passe plein de choses dans cet établissement, ce tout petit univers avec ses 70 résidents qui constituent l'Alpha et l'Omega de son espace personnel, renonçant par exemple, contrairement à la pression de son gendre, à regarder la télévision qui lui donne des nouvelles d'un monde qui ne l'intéresse plus du tout.

Un beau sergent tourne la tête de sa voisine de table, Dona Joaninha. Une jeune femme d'origine brésilienne, Lilimunde qui sent bon la bergamote quand elle vient la voir, lui assure qu'elle ne connaîtra jamais aucun homme, mais va tomber amoureuse d'un Hongrois. Des fourmis attaquent les résidents et se retrouvent dans les lits et dans les plats qu'on leur sert – il faudra faire venir une entreprise de désinsectisation. Et puis il y en a qui disparaissent. Comme ce Sergent, peut-être mort d'une crise cardiaque suite à une nuit d'ivresse avec Dona Joaninha, mais la narratrice n'en dira rien et couvrira les frasques de son amie.

Il y est question de mystérieux vols aussi – des bottes disparaissent et réapparaissent. Et puis, comme dans tout EPAHD, on recherche du personnel qui accepte de faire ces travaux ingrats. Une arrivée de plusieurs travailleurs étrangers permettra à l'Etablissement de survivre.
Le Sergent sera remplacé par un certain Mr To, qui tente de soulever les résidents contre la direction de l'établissement, fédérant une colère sourde contre l'absence de prise en considération de leurs besoins réels.

Et puis il y a les fantômes. Ceux que Dona Alberta surnomme « la nuit » puisqu'ils arrivent avec l'obscurité, surtout si elle refuse d'avaler les somnifères qu'on lui prescrit. Commence alors un long combat contre ses forces du mal qui s'adressent directement avec elle et avec qui elle dialogue.

C'est à la foi ironique, poétique – Dona Maria Alberti a une véritable attention réelle à la beauté du monde – parfois brutal. On passe du rire aux larmes, et on est touchés.

Avec une question centrale : qu'est-ce que la mère d'une écrivaine peut conseiller à sa fille en matière d'écriture ? Elle se désole qu'elle ne prenne pas des personnages célèbres comme personnages centraux de ses romans. Ou qu'au moins le roman se termine bien.
Sa fille lui résume ce qu'elle fait en une phrase « je fais l'Amour avec L Univers ». Est-ce donc cela, le secret de la littérature ?

De tout cela on comprendra à la fin que ce sont 38 minutes d'enregistrement que la mère de Lidia Jorge a livré à la postérité. Dans une forme d'exploit littéraire qui consiste à se mettre dans la peau de celle qui lui a donné la vie, notamment dans son dialogue parfois douloureux avec sa fille écrivain. Curieux effet de miroir, que de se regarder au travers du regard de sa propre mère vieillissante ….

« Elle m'a dit qu'il fallait que j'écrive pour que les gens éprouvent de la compassion pour ceux qui ne peuvent plus dominer leurs corps », raconte Lidia Jorge.

En refermant « Misericordia », on a l'impression d'avoir rencontré une femme hors du commun, une femme qui a une volonté de fer et un humour et une ironie parfois mordante, et surtout une furieuse envie d'en découdre encore et de ne pas rendre les armes à tous les fantômes de la nuit qui la tirent vers le monde d'après.

Et on en est ressort profondément touchés.

Lien : https://versionlibreorg.blog..
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J'ai choisi de lire Misericordia suite au récent décès de ma grand-mère, qui était aussi en maison de retraite.
Ce n'était pas un sujet qui m'intéressait jusqu'à présent. Mais loin d'être dans le pathos, c'est un roman que je trouve lumineux et pas vraiment triste. Certes, on est à l'hôtel paradis, un lieu où on vient finir sa vie, mais ici Dona Alberti est loin d'être aigri, elle est ici par choix... Certes difficile...
J'espère recroiser à l'avenir des romans de Maria Albert Nunes, car j'ai beaucoup apprécié sa plume.
Je ne sais pas si le sujet plaira à tout le monde, mais pour ma part, c'etait un chouette moment !

Merci encore une fois Babelio et merci aux éditions Métaillé pour cette jolie découverte.
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Lídia Jorge nous offre un témoignage fort, inspiré de la vie de sa maman, Maria Alberta Nunes Amado (Dona Alberti), résidente d'un ehpad au Portugal et emportée par la pandémie de Covid-19. Dans cet ouvrage, Lídia Jorge explore avec sensibilité les thèmes universels de la vieillesse, de la décrépitude et de la solitude qui touchent les personnes âgées.

Dona Alberti, résidente de l'Hôtel Paradis, s'enregistre nuit après nuit sur un petit magnétophone pendant un an. Ces enregistrements, retranscrits par l'autrice, nous plongeant dans l'intimité d'une vie marquée par la nostalgie de la maison, du jardin, des plantes...

Le récit, bien que traitant de sujets lourds tels que la perte d'autonomie, la maladie et la mort, se distingue par la vie qui persiste au travers des lignes, Lídia Jorge nous offrant un regard tendre sur la vieillesse.

Le roman dépeint les interactions au sein de l'ehpad, entre les résidents partageant amitiés, solidarités, disputes et les interactions avec le personnel soignant, entre attentions bienveillantes et manquements.

Le style de ce roman est particulier et j'ai parfois décroché. Il n'en reste pas moins un bel hommage de l'autrice à sa mère.
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Bienvenue à l'Hôtel Paradis, résidence pour personnes âgées, où nous faisons la connaissance de Maria Alberta Nunes, que l'on appelle familièrement Dona Alberti qui enregistre sur son Olympus Note Corder, ses pensées, ses émotions dans l'établissement. Elle est arrivée le 18 avril 2019, à la suite d'une chute qui a laissé des séquelles qui ne lui permettent plus de rester chez elle.

Elle nous raconte au jour le jour, les évènements, l'ambiance, les amis (et les autres), les soignants, en nombre insuffisants qui s'occupent de leurs corps, les lavent les habillent, sans échanger le moindre mot, pas même un simple bonjour, alors que Dona Alberti est toujours polie, la manière dont on pousse son fauteuil, qu'on l'oublie dans un coin comme un meuble.

Dona Alberti se lie avec une autre pensionnaire, Dona Juana, (qui pousse le fauteuil à l'occasion) qui est très différente d'elle, se précipitant vers un nouvel entrant, encore bien de sa personne, mais plutôt volage…

J'ai aimé la relation qui se noue entre Dona Alberti et une des soignante, Lilimunde, jeune Brésilienne, qui est, elle, à l'écoute, dans l'empathie avec la vieille dame, elle lui parle de la façon dont elle arrivée au Portugal, avec un réseau « religieux » qui n'hésite pas à ponctionner le peu d'argent qu'elle gagne, « à titre de dédommagement pour service rendu ». Elle doit compléter son salaire à l'Hôtel Paradis, avec une activité nocturne dans un bar. Parfois, tellement épuisée elle dort quelques minutes sur le lit vide à côté de Dona Alberti. Lorsqu'elle tombe amoureuse d'un étudiant hongrois, en vacances, elle raconte son amour.

Mais, il y a une valse dans le personnel, certains s'en vont, d'autres sont renvoyés pour faute, et la situation devient de plus en plus pénible pour les résidents : on ne fait que le strict nécessaire ! mais un jour, de nouveaux visages apparaissent, moins exigeants sur le salaire, plus corvéables et parmi eux Ali qui a le malheur d'être homosexuel.

Il y a soixante-dix personnes dans la résidence, à la table de Dona Alberti, il y a une entente cordiale, mais à côté il y a la table du Club des « Six Gentlemen Distribuent des Cartes »et le comportement de certains est odieux, notamment vis-à-vis d'Ali, avec des gestes déplacés, une homophobie revendiquée…

Dona Alberti reçoit la visite de son gendre, de sa fille, écrivaine dont les livres ne plaisent pas du tout à Dona Alberti ; les relations entre la mère et la fille sont tendues, parfois à la limite de la toxicité, ce qui rendent la résidente un peu moins sympathique, mais on comprendra plus tard pourquoi.

Bon an mal an, on arrive à surmonter les crises, entre mère et fille, ou au sein de l'Hôtel Paradis, avec une invasion par les fourmis, et tout ce que cela implique : désinfection, appel au spécialistes (ce qui rappelle le phénomène punaises de lits très actuel !) ou encore, les décès, les maladies, les vols, le désir de mourir parfois… Jusqu'à l'entrée en scène d'un certain virus, le COVID : plus de visites, plus de médecins, les infirmiers qui fuient… Etc. Etc.

Dona Alberti enregistre sur son appareil, elle écrit aussi des petits mots sur des feuilles volantes, comme des Haïkus, qu'elle a parfois du mal à relire…

Une scène m'a beaucoup émue : Dona Alberti cherche dans sa tête de quel pays Bakou est-elle la capitale, mais les jeunes ne savent pas, ou s'en moquent éperdument, jusqu'à ce qu'un résident lui réponde en précisant que si elle a besoin de savoir d'autres chose, ils sont là, lui et son smartphone. Chez elle, elle possédait un atlas, un globe terrestre lumineux qu'elle n'a pas voulu emporter à l'Hôtel Paradis.

Lidia Jorge nous livre un beau témoignage, car il s'agit en fait des notes et enregistrements de sa mère, qu'elle a retranscrit le plus fidèlement possible, en améliorant le style de l'écriture, témoignage bouleversant, de l'enfermement, quand le corps ne suit plus, mais que la tête fonctionne encore très bien, l'empathie (je préfère ce terme à Miséricorde plus connoté religieux à mon sens) qui manque souvent, et le tsunami déclenché par le COVID… le récit est très riche et j'ai choisi de donner la préférence à certaines des thématiques proposées par l'auteure, afin de ne pas être trop dithyrambique!

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Métailié qui m'ont permis de découvrir ce roman et la plume de son auteure que j'ai envie de connaître davantage.

#Misericordia #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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De Lidia Jorge, je n'avais lu que Les Mémorables qui m'avaient accompagné lors de mon séjour lisboète, il y a quelques années.
J'avais admiré son style, cette poésie en prose qui faisait passer tant d'émotion dans le récit. Je m'attendais à quelque chose de similaire.
Mais Misericordia est très différent. du premier au dernier mot, c'est la voix de Maria Alberta, sa grand-mère, que l'on entend.

Ses descriptions du quotidien dans la maison de retraite, des idylles entre locataires, et des misères aussi. Des soignants très gentils et des autres très brusques. de la vieillesse qui ne vous lâche pas, et de la Nuit qui rôde. Aucune date n'est mentionnée : la vie quotidienne aurait pu se dérouler dans les années 90 aussi aisément ou presque que dans les années 2020. Qu'est-ce que le temps quand on sait par avance qu'il s'est déjà trop égrené ?
J'ai trouvé Dona Maria Alberta touchante dans sa narration du quotidien, dans ses explications des faits parfois saugrenues. Son émotion qui ne transparaît que dans ce qu'elle livre à ces pages, n'est pas visible pour ses interlocuteurs. Ses raisonnements ne sont pas expliqués. Là où elle reste un mystère pour ses proches, elle se livre sans fausse pudeur dans son enregistrement vocal pour sa petite fille. C'est touchant, c'est émouvant, c'est passionnant...

Vous l'avez lu ??
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Maria Alberta est une vieille dame formidable que j'aurais aimée rencontrer. Ne pouvant plus marcher et ayant d'autres soucis physiques elle réside désormais à l'Hôtel Paradis.

Elle est magnifique Maria Alberta, digne, cultivée, curieuse, très tenace et attentive aux autres. Si son corps la lâche son esprit reste vivace et son univers intérieur est riche et poétique.

"Galets de la mer sur ma commode.
Je les caresse --- Dans ma main un
océan et ses poissons."

Les relations avec sa fille sont complexes. La vieille dame n'est pas toujours facile entre conseils et reproches fréquents. Un jour elle lui confie un enregistrement de quarante heures, celui de son journal de bord d'une année dans cette résidence pour personne agées. A sa fille de transcrire ce testament. C'est ce texte très littéraire que nous offre Lidia Jorge.

Certains moments sont très durs, témoignage accablant du manque d'humanité qu'impose les contraintes et le manque de personnel dans ces établissements. Comme dans ce passage où deux aides soignantes entrent dans la chambre parlant entre elles, riant , ne répondant pas à Maria Alberta qui attend que l'on s'adresse à elle.
"J'ai encore répété plusieurs fois, bonjour, aujourd'hui c'est le dimanche de Pâques.Mais elles me mettaient mon maillot de corps et mon chemisier, m'enfilaient mes bas et mon pantalon, sans me voir, leurs rires passaient à côté de mon corps et par-dessus ma tête, elles levaient mes bras comme si elles manaient des pièces métalliques au milieu d'une usine"

D'autres moments sont magnifiques car Maria Alberta aime les autres et sait accueillir les belles rencontres. Des moments sincères et affectueux avec un jeune bénévole venant lui faire la lecture, avec Lilimunde très jeune aide soignante qui a besoin de se confier, avec Ali jeune homosexuel parlant très peu le portugais. de beaux moments car Maria Alberta s'interesse profondément à ceux qui l'entoure, les accompagne, les écoute, les défend.

Mes moments préférés sont toutefois ceux où son esprit s'évade, sort de l'enceinte close de l'Hôtel Paradis
"... je recours à la mémoire pour sortir de ces murs et triompher de mon état de recluse"
Elle retrouve alors souvenirs d'enfance, l'alternance des saisons sur le jardin.
" Si je décris ce qui est lointain, c'est uniquement parce que je possédais ces trésors qui me manquent maintenant. Mieux vaut les avoir perdus que ne les avoir jamais eus. Je remplis mon âme des visites sans fin que je fais au monde dont je me souviens comme si je possedais à nouveau la Nature qui est loin"

La langue est superbe, les émotions nous chavirent, du sourire au chagrin, du fantastique à la poésie.

Maria Alberta fut une belle rencontre. Pleine d'humanité elle illumine ce récit traitant d'un sujet assez peu traité.
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