AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Un chant dans l'épaisseur du temps (60)

ÉLÉGIE



Quel jardin habitent les vertes adolescentes ?
Quand elles chantent, leurs voix sont pures comme le cristal
  des collines ;
dans le silence du soir, quelle blanche obscurité les recouvre ?

Le prétexte du poème les poursuit.
Il leur donne l’éternité d’un chemin forestier,
en automne, parmi les troncs qui blanchissent.

Il entend leurs rires d’oiseaux
dans leur fièvre de partir.
La nuit tombe plus tôt.
Les champs ont abandonné l’écho des eaux,
le murmure indistinct d’un dieu.

Même un regard attentif ne reconnaît pas,
en ces fleurs piétinées par le couchant,
les lèvres que l’ombre a tues.

/Traduction Michel Chandeigne
Commenter  J’apprécie          20
La vie est toujours une réalité fragile
pour qui s'aperçoit de l'automne et des premiers vents
du nord, lesquels apportent les cieux clairs et les nuages
froids,
et glacent l'âme qui ne s'est pas faite à la solitude.
(Elégie)
Commenter  J’apprécie          20
ANTHROPOLOGIE


L'homme n'a pas la fermeté du basalte ;
comme la pierre, il n'est pas né d'un volcan,
n'a pas formé d'île,
n'a pas fait bouillonner la mer à grands jets
vers le ciel.
L'homme, comme la plante,
ploie au passage du cyclone,
tremble lors des changements de
temps — comme maintenant,
où les nuages apportent déjà
un frisson d'automne.
Cet homme a le fond gris
de ces nuages, le même regard de menace,
leur insistance à rester — bien qu'il
sache que le premier souffle
le chassera de l'horizon.

p.111
Commenter  J’apprécie          20
ZOOLOGIE : LE CHAT

Un chat, à la maison, seul, monte
sur le rebord de la fenêtre pour, de la rue,
être vu.

Le soleil frappe les vitres et
réchauffe le chat qui, immobile,
semble un objet.

Il reste ainsi pour susciter
l'envie — indifférent
même si on l'appelle.

Par je ne sais quel privilège,
les chats connaissent
l'éternité.

p.87
Commenter  J’apprécie          20
POÉSIE

D'où vient-elle – la voix qui
nous déchira de l'intérieur, qui
apporta la pluie noire
de l'automne, et s'enfuit parmi
les brouillards et les champs
dévorés par les herbes ?

Elle était ici – ici à l'intérieur
de nous, comme si elle s'était toujours
trouvée là ; et nous ne
l'entendons pas, comme si elle ne nous
parlait pas depuis toujours,
là, à l'intérieur de nous.

Et maintenant que nous voulons l'entendre,
comme si nous l'avions re-
connue jadis, où est-elle ? La voix
qui danse la nuit, en hiver,
sans lumière ni écho, tandis qu'elle
prend de sa main le fil
obscur de l'horizon.

Elle dit : « Ne pleure pas ce qui t'attend,
ne descends plus la rive
du fleuve ultime. Respire,
d'un trait bref, l'odeur
de la résine, dans le bois, et
le souffle humide du poème. »


Comme si nous l'entendions.

p.205-206
Commenter  J’apprécie          20
« ULYSSE », UNE PAGE

Ayant écrit les mots qui, pensait-il,
seraient les derniers, il revint au début
du poème ; et ainsi, il s'obligea à poursuivre jusqu'à
la fin de la strophe, sans interruption. La grammaire
le forçait à suivre les règles anciennes, l'esprit
ne parvint pas à fuir la contingence de la forme – et
l'attachant à la matière verbale du poème, il le libéra
de la pensée, de l'abstraction, de la propre idée
qui le gouvernait – navigateur du sublime. Mais
ce ne fut pas cela qu'il rêva, un jour, quand il s'aperçut
que le langage pouvait exprimer son trouble ;
et il ne trouva pas d'autres manières de traduire
le doute qui l'empêchait désormais de classer
comme « poétique » ou « lyrique » ce qu'il écrivait.
« Le chant ne me satisfait pas, je cherche la totalité. »
Cependant, cette voix n'était pas la sienne. En elle, il entendait
l'écho que l'humidité étouffe en automne ; et le cri
lointain d'un oiseau inquiet ; et le murmure
des lèvres qui répètent le commandement incomplet :
« dieu...qui est dieu ? » Lui, s'il le savait, occuperait
le vide de cette voix. Aucune certitude ne remplace
la conviction du néant ; nul ressac ne blanchit
les cheveux de l'aube. « Croyez au rythme »,
disait-il, comme si quelqu'un l'entendait. La mort est une
femme nue parmi les statues du parc ; une
femme nue à cheval sur une machine à écrire ;
le sexe d'algues que la marée découvre,
entre les derniers mots du poème et le corps,
qui les entend, enchaîné à la mâture du vers.

p.32-33
Commenter  J’apprécie          20
Il bâtissait des chimères; et les laissait partir en fumée sans se préoccuper d’en fixer l’image - finalement, ce dont les poèmes sont faits…
Commenter  J’apprécie          20
PHOTOGRAPHIE (extérieur)



Auparavant la vérité
descendait la colline sur les paroles du berger ;
et les brebis n’étaient pas seules à les saisir. Je me
souviens
de ces collines vertes
sous les pluies du printemps, glaciales par vent
d’avril et lumineuses comme le soleil du nord. C’était
un matin. Les femmes préparaient encore le
four à pain — et déjà un rythme obscur annonçait
la naissance des fruits, c’est-à-dire,
l’équivoque de la faux au moment
de la récolte.
C’étaient bien ses paroles. Un
mouvement qui parcourait la surface
des rizières, qui ridait l’échine
des dunes, qui repoussait les mouettes vers
l’estuaire. Cependant, les vieux
le comprenaient; et quelques innocents, dont
l’esprit se confondait à la transparence
de l’eau, répétaient ce qu’il disait en un murmure
de ruisseau. Mais ce n’était pas à eux qu’il
s’adressait.
Il évita l’ambiguïté, les sens complexes
de la philosophie, le fond noir
du poème. De fait, il n’allait jamais jusqu’au bout
de ses histoires — comme s’il ne pouvait pas
les terminer...ou qu’il ne savait plus rien, au-delà
de ce que nous savons, maintenant que nous sommes peu
à se souvenir de lui. Moi, pourtant, je l’ai revu —
assis sur ce banc de gare, feuilletant un vieux
journal et suçant un vieux mégot —
avec le souffle avide d’un apprenti
en hésitations.

/Traduction Michel Chandeigne
Commenter  J’apprécie          10
FRAGMENTS



Extrait 2

4
Seul le bruit de la nuit survit à la
lumière et la fureur matinales.

5
(Si ces nuages, à l’horizon,
parvenaient jusqu’à moi…)

6
Le fragment, néanmoins, exprime
l’éclatement de l’intensité.

7
Dans l’ultime fragment, fixe
l’éphémère et repose.
Commenter  J’apprécie          10
Alors, nous dit-on, à quoi sert de garder,
dans un tiroir fermé, la vie même ?
(Dans PLATON)
Commenter  J’apprécie          10






    Lecteurs (38) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

    Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

    Paris
    Marseille
    Bruxelles
    Londres

    10 questions
    1221 lecteurs ont répondu
    Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

    {* *}