AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Un chant dans l'épaisseur du temps (60)

POÈME


À l'aube, à tes côtés, la mer
s'est ouverte comme la fleur d'un regard
que septembre fait pâlir. La mer :
quand encore le brouillard l'étreint et l'obs-
curcit, elle rêve de tant de lumière, déjà…
et si, dans les éclairs blancs de l'horizon,
la nuit sanglote un bref adieu,
tu chantes avec elle, un instant,
dans une rumeur voilée par le matin. Toi,
que j'ai vue sous le cèdre mélancolique,
les lèvres noircies, brûler le nid
vide de plumes et de mémoire : si tu
m'enseignais le geste qui vit solitaire
d'un adieu sans avenir ni passé…
J'entendrais ta voix lourde, sur
la voix des vents et des vagues ; rappelant
quelle légende, ensevelie dans le mois obscur,
à laquelle tu as donné un nom d'étoile (Vénus,
l'antique Vénus qui agonise dans le matin
céleste) ? Ce mois, qui est passé
comme une heure incertaine, a conduit tes pas de
ténèbres, tes épaules ailées : âme
que la flamme consume dans les espaces, quand
un frisson de soleil entrouvre les nuages ;
rire d'eau dans un vers de mousse, qui
corrode la pierre d'une douleur ancienne.

p.116-117
Commenter  J’apprécie          50
SERPENT



La mélancolie enseigne que le trait définit tout,
depuis l’émotion du visage
jusqu’à la montagne au soleil couchant.

/Traduction Michel Chandeigne
Commenter  J’apprécie          40
LE BOIS

Les ténèbres du bois sont
vertes (bien qu'elles soient
des ténèbres).

Il faut comprendre :
tout ce qui brille, sans
se voir,
dans le secret des bois.

Je traverse le bois
en un songe
aussi vert que la ténèbre
qui l'entoure.

p.118
Commenter  J’apprécie          40
ZOOLOGIE :
LES GRENOUILLES DE MATEUS

Quand les grenouilles coassent,
dans le lac, l'eau se réchauffe.
C'est comme si un moteur
sonore
se mettait à travailler ;

et que la monotonie
âpre
d'une consonne

expulsait l'hiver.

p.86
Commenter  J’apprécie          40
Poème

« Le vent a soufflé avec trop de force, as-tu dit,
c'était comme si un dieu avait soufflé depuis l'horizon » ;
et ce souffle a emporté les feuilles des arbres,
chassé les nuages, pénétré les fenêtres du rêve,
bousculant les images et les phrases. Je ne sais pas,
de fait, si la voix qui nous réveille, la nuit, a
un destinataire en particulier. Bien que je me lève,
guette le couloir, entrouvre les volets de bois,
nul n'apparaît depuis la ténèbre. Les vieilles maisons, en province,
ont des habitants inattendus : des visages qui se confondent
avec le brouillard des miroirs ; des bras que la mousse
de l'ombre a corrodés.

p.101
Commenter  J’apprécie          40
L'ORDRE DU MONDE

Le matin, je cueille les herbes du jardin. La terre,
encore fraîche, sort avec les racines, et se mélange
au brouillard de l’aube. Alors le monde
s’inverse : le ciel, que je ne vois pas, est
sous la terre ; et les racines montent
en suivant une direction invisible. De
la maison, pourtant, m’appelle une odeur
de café : comme si quelqu’un me disait
de me réveiller, une seconde fois,
pour que les racines croissent dans
la terre et que le brouillard, se dissipant, laisse voir le bleu.

Recueil Méditation sur des ruines ( 1994 )
Commenter  J’apprécie          40
PLUIE



Il pleut comme toujours.
Et, comme toujours quand il pleut, les gens s’abritent
(ceux qui ne s’attendaient pas à ce qu’il pleuve) ;
ou ils ouvrent, simplement, leur parapluie —
de préférence à ouverture automatique.

Parce que, quand il pleut, nous devons tous faire quelque chose :
même nous, qui sommes à l’intérieur de la maison.
Les uns vont à la fenêtre, en commentant : « Quel hiver ! » ;
les autres s’assoient, un papier devant eux :
et ils écrivent un poème, comme celui-ci.

/Traduction Michel Chandeigne
Commenter  J’apprécie          30
Vénus -

Elle est là depuis toujours, l'étoile que même
la lumière du matin n'éteint pas; et elle parle avec le premier bleu,
encore moucheté de brouillard nocturne.
"Enseigne-moi moi la couleur de midi, dit-elle, l'éclat exact
de la mer sous l'aplomb des équinoxes ; décris-moi
le fond des yeux qui fixent le soleil quand
un nuage de passage occulte son feu."
Mais le bleu est une couleur muette. Fixe
à l'extrémité de l'atmosphère, son rôle
de frontière entre les mondes d'en bas
et d'en haut le contraint au silence. Alors,
l'étoile se dilue avec le jour qui croît. On
la confond avec une vague lueur, avec
une erreur dans la définition de l'espace ; et l'on s'en remet
à la montée de l'azur qui, au coeur des chaleurs,
s'emparera de l'infini pour le garder
dans une poche illusoire de ténèbre.

(extrait de "Méditation sur les ruines") - p.200
Commenter  J’apprécie          30
RIME INTERNE
Ceux qui aiment la terre obscure
en été, ne savent pas que
la vie ne dure, lorsque
en cette terre, reste mûr
le fruit qui ne perdure
que sur le sol sec de la figure.

p.227

Commenter  J’apprécie          30
Dans un coin du café, ce que tu recherches, c’est que le poème
te dise qui tu es, pourquoi tu te caches, quel est le nom
de la fille qui t’a regardé fixement.
Et tu n’as pas de réponse.
La réponse était sur les lèvres de cette fille
que ton silence n’a pas su interroger;
et dans le vent qui balayait l’esplanade,
emportant feuilles et papiers.
L’automne : une image, celle de ta propre vie,
que tu n’as pas su ignorer;
pour que d’une banale conversation avec l’inconnue,
surgisse une image, cette autre,
de la vie que tu aurais aimé ne pas perdre,
à chaque instant, entre tes doigts et tes vers.
Commenter  J’apprécie          30






    Lecteurs (38) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

    Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

    Paris
    Marseille
    Bruxelles
    Londres

    10 questions
    1221 lecteurs ont répondu
    Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

    {* *}