J'ai toujours éprouvé une aversion très prononcée pour le style de Maylis de
Kerangal. Quelques pages d'elles à peine m'écoeurent et m'insupportent au plus haut point. Je n'ai lu qu'un seul de ses livres, le plus court, et quelques passages de ses romans, mais jamais je n'en lirai un en entier. Il y a dans ce style une enflure et une prolifération de jargons dont l'intérêt m'échappe totalement. Tout sonne faux. Ecrire est normalement une chose naturelle. du moins une phrase et un langage complexes peuvent être « simples » et « naturels » au sens où ils épousent parfaitement la sensibilité et l'idée qu'ils expriment. Par exemple, les phrases de
Proust sont complexes mais étonnamment vivantes, on perçoit en elles la sensibilité de l'écrivain. Pour avoir du style, j'estime qu'un auteur doit avant toute chose se connaître, savoir ce qu'il veut dire, comment, et pleinement assumer ce comment s'en s'embarrasser de paraître doué ou original. le grand écrivain, tout simplement, a trouvé dans l'écriture une expression authentique de soi, il comble son lecteur parce qu'il se donne en toute transparence sans chercher à lui plaire ; s'il veut lui plaire, c'est en ne lui donnant rien d'autre hormis ce qui compte à ses yeux, il ne voudra donc pas lui complaire. Maylis ne souhaite pas complaire au lecteur, je l'accorde, c'est plus grave, elle me semble vouloir le forcer, le contraindre à la voir comme un auteur. Elle ne me semble écrire que pour être écrivain, écrivain au sens professionnel, c'est-à-dire pour être vu comme tel, et donc connue. A l'opposé, il y a ceux qui sont écrivains par accident ; je veux dire : écrire est pour eux une nécessité, mais il se trouve, sans qu'ils l'aient nécessairement voulu, qu'écrivant, ils sont devenus écrivains du fait de leur succès littéraire. Seul leur importait en priorité, au travers de l'écriture, une sorte d'accomplissement de soi, ou d'approfondissement. Puis, il y a ceux qui, réussissant par la même occasion à tirer un profit régulier de leur inspiration, on trouvé une formule et sont devenus des auteurs prolifiques capable d'honorer des contrats auprès d'éditeurs tout en restant soi, sans trahir leur sensibilité originelle.