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Après avoir croisé la route d'une petite délégation d'Indiens d'Amazonie venus chez les occidentaux défendre leur mode de vie et la préservation de leur territoire, Étienne Klein réalise qu'il existe des manières différentes d'appréhender notre monde et notre environnement, celle des Kayapo, privilégiant d'avantage l‘équilibre et l'harmonie entre l'Homme et la nature, mettant en avant une sorte de perception écologique et mystique de l'univers. La science occidentale, se dit alors Étienne Klein, soustrait l'homme de son milieu naturel, dont il n'est plus que l'observateur extérieur, tenant la nature à distance afin de pouvoir rester objectif dans la recherche de la vérité, mais aussi dans le but de pouvoir l'asservir. Et ce mode de fonctionnement, avance-t-il, nous le devons à Galilée.
Galilée a compris le premier que la nature obéissait à des lois qui existent en dehors de nous-mêmes, et que ces lois étaient de nature mathématique. Évidemment, une telle prise de position n'a pas eu l'heur de plaire au pouvoir religieux de l'époque, et Galilée a dû se désavouer et renoncer à quelques idées trop modernes et en avance sur son temps.
La démarche scientifique moderne initialisée par Galilée a permis le développement de la technologie, puis de la logique industrielle aboutissant à une mise en coupe réglée de la nature, n'obéissant plus qu'à des intérêts économiques, politiques ou militaires, à des exigences de profit immédiat, loin de la candeur initiale d'une science ne visant que la connaissance pour la connaissance.
Bien conscients des catastrophes annoncées (ou déjà produites) dues à la course au « progrès » (la catastrophe de Fukushima, les OGM, la pollution, le dérèglement climatique…), nous ne portons plus le même regard sur la science, considérée, à tort ou à raison, comme responsable, et le désamour de nos contemporains pour la science, nous dit Etienne Klein, est bien réel. La science par ailleurs sait se faire discrète derrière les innovations technologiques actuelles (le Smartphone, le Blue ray, le GPS…) et ses détracteurs, souvent friands de nouveautés high-tech, campent sur leur position consumériste et veulent rester des consommateurs et surtout ne pas comprendre au nom de quelle formule magique tout cela fonctionne.
Étienne Klein dénonce la course à la rentabilité immédiate, la priorité donnée au court terme, confisquant de facto la possibilité d'une réflexion dans la durée, de tâtonnements et d'explorations hasardeuses nécessaires à la recherche fondamentale. Il constate le changement de fond néfaste qui s'opère lorsque la question « Est-ce vrai ? » est progressivement remplacée par la question « A quoi cela va-t-il servir ? ». En science fondamentale, les grandes avancées du siècle passé permettant de mieux décrire notre monde (on peut citer, comme toujours, la physique quantique et la relativité) à aucun moment ne pouvaient déclencher chez leurs concepteurs l'intuition d'une retombée technologique quelconque telle que le laser, l'IRM ou le GPS, et les physiciens de l'époque, d'ailleurs, se gardaient bien de faire des pronostics en la matière.
L'auteur s'insurge avec raison contre la désaffection par les étudiants de filières scientifiques, dont les pouvoirs politiques n'ont sans doute pas encore mesuré toutes les conséquences sur notre avenir. Il déplore la perte de notoriété du « scientifique », qui cède aujourd'hui sa place au footballeur ou à l'artiste de variété.
Étienne Klein reste pantois devant l'un de ses étudiants qui « ne sent pas » les théories d'Einstein, pourtant vieilles d'un siècle et immanquablement en accord avec les preuves expérimentales qui se sont accumulées depuis, et constate avec stupéfaction que pour cet étudiant, le ressenti personnel se situe au même niveau de crédibilité que la théorie de la relativité ! On peut donc ne plus croire aux messages de la science, qui est aujourd'hui concurrencée par les thèses « relativistes » (rien à voir avec la relativité, il s'agit ici de promouvoir d'autres approches et de les hisser au niveau de la science : le vaudou, l'astrologie, la numérologie, l'intuition… la science n'étant qu'un point de vue parmi d'autres, ni plus louable, ni plus proche de la vérité que les autres).
Mais Étienne Klein fustige également le « scientisme », qui incite à croire béatement que la science permettra de résoudre tous les maux de notre époque (y compris apporter des réponses aux catastrophes provoquées par les technologies qu'elle a contribué à créer).
Enfin, l'auteur rappelle ce qui n'est pour moi qu'une évidence : la science ne peut être tenue pour responsable des aspects moraux de l'utilisation qui est faite de ses retombées technologiques. La science n'est pas plus responsable du drame de Fukushima que de la décision de larguer une bombe sur Hiroshima ou Nagasaki.
Dans ce petit ouvrage réactualisé par une préface inédite (et sans doute enrichi de quelques paragraphes ajoutés suite à la découverte récente du boson de Higgs…) le scientifique Étienne Klein pousse de nombreux cris d'alarme : c'est le blues de l'homme en blouse.
Tous les débats qu'il suscite dans cet essai sont intéressants et pertinents, et il les expose avec sa clarté et sa lucidité habituelle.
La science est-elle réellement en danger et allons-nous bientôt la « liquider » ?
On peut à mon avis nuancer ce pessimisme. En lisant cet essai, j'ai eu l'impression que l'auteur faisait l'amalgame entre « science » et « course à l'innovation technologique », et, pire encore, entre « profit » et « connaissance ». Pour moi, les dérapages du monde moderne (les catastrophes écologiques, la pollution…) proviennent surtout du culte de l'argent et du business, et non de la science. La science ne s'occupe en principe que d'enrichir nos connaissances, alors que c'est surtout l'innovation technologique et la production industrielle qui enrichissent le portefeuille des actionnaires, donc des décideurs, pas toujours éclairés, donnant lieu par là même aux excès et aux effets pervers cités plus haut. La science peut donc à mon avis rester pure et belle, et même porter des valeurs positives telles que la curiosité, le désintéressement, la rigueur et l'élégance (des démonstrations, des modèles…).
Mais en disant cela, je ne fais peut-être que déplacer le problème. Merci en tout cas à Étienne Klein pour ce bouillonnement d'idées, propice aux réflexions personnelles, qu'il parvient à faire tenir dans ce très court essai facilement lisible par tous.
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Très bon vulgarisateur et un discours très bien structuré. J'ai adoré l'idée de la science défendue dans ce petit livre. Etienne Klein nous débarasse de plusieurs préjugés tenaces ainsi que de quelques contradictions qui s'opposent injustement à la science. Une lecture qui fait plaisir et un bonhomme fort sympathique !
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Étienne Klein tente dans cet essai de dédiaboliser la science, trop souvent associée à la technologie, dont le capitalisme est friand. Il tente par un plaidoyer convaincant de replacer la science sur son piédestal et de la relier à ses vraies valeurs qui renvoient à une quête de la vérité, rompant avec l'image actuelle de la science, créatrice des armes des méchants de ce monde, toujours au service des magnats des hautes technologies qui se livrent un combat sans merci pour mieux duper le reste de la planète sans se soucier le moins du monde de la durabilité de cette dernière.

Avec un vocabulaire clair et précis, Étienne Klein entreprend de convaincre son lecteur par des remarques pertinentes et touchantes, on en viendrait presque à embrasser la science qui, il le rappelle pourtant avec clairvoyance, ne sera pas la solution à tous nos problèmes.

Réconcilier la science et l'humanisme ? Allons-nous liquider la science a le mérite de dresser le portrait d'un scientifique conscient des questions de notre société qui s'attire sans peine la sympathie de son lecteur.
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En 2008, Étienne Klein prit la plume pour écrire ce court essai afin de défendre ce qu'il appelle l'esprit de la science, qu'on se gardera de confondre avec un "scientisme" béat ou une confiance aveugle dans la technologie. Presque quinze ans plus tard, force est de constater que ce texte est plus que jamais d'actualité, tant le besoin de nuance est important sur cette question comme sur beaucoup d'autres. Un petit livre qu'on peut relire sans hésiter et qui sera une bonne base de discussion constructive.
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Un livre bien écris. Les idées d'Etienne Klein dans ce livre sont claires, sublimes, tantôt illustrées par des anecdotes indiennes tantôt par les histoires de peuple des îles ce qui reflète l'idée que M. Klein est non seulement un grand intelectuel de science mais aussi un giantesque globe-trotter.
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Excellent essai dans lequel l'auteur nous montre l'importance de la science dans notre quotidien et dans la compréhension de notre univers.
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