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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Adieu Poulet, le roman qui est devenu un film culte avec Lino Ventura et Patrick Dewaere, se situe à une période de transition de la société française, sociale, politique et économique.
La guerre n'est pas très loin, et tant dans le milieu que dans la police on trouve encore des hommes qui se sont battus côte à côte contre les nazis mais aussi contre ceux qui ont collaboré et sont toujours là.
Hélas, les temps changent, et ces valeurs partagées disparaissent.
Les politiques s'en mêlent et s'emmêlent, la justice est de plus en plus aux ordres du pouvoir, avec son corollaire de magistrats cherchant à acquérir plus d'indépendance et forcément proches de l'opposition.
Vergeat est un homme de valeurs qui ne cède rien et risque de le payer au prix fort, sa mise à pied ou l'obligation de fermer sa gueule s'il veut rester dans les rangs de la police.
Mais voilà, Vergeat n'en fait qu'à sa tête.
Il va même jusqu'à déclarer au juge Demesse, un jeune ambitieux instrumentalisé pour instruire à charge le dossier Vergeat :
« Il y a maintenant deux sortes de policiers ceux qui font de la politique et ceux qui n'en font pas. J'appartiens à la seconde catégorie (…) Les autres ne courent aucun danger (…) En douce ils préparent leurs dossiers sur les gens de la majorité. Ils n'ont pas le temps de chômer. Ils vous serviront cela tout chaud le jour où les vôtres arriveront au pouvoir. »
Le monde de Vergeat, celui dans lequel un policier se bat à la loyale contre les gangsters, sans dédaigner de tirer parti de la zone grise entre la loi et le milieu, disparait au profit d'un monde de juristes, d'avocats et de technocrates. Certains ont vite compris qu'il était préférable de faire de l'optimisation fiscale et du blanchiment d'argent légal plutôt que risquer sa peau à braquer des banques.
« Quand on est méchant, ce qui était son cas, la parfaite connaissance de la loi fait de vous un parfait bulldozer de la société. »
Jusqu'où Vergeat est-il capable d'aller pour mettre au point « (…) une machine qui va leur péter au fondement et les expédier à cinquante mètres en l'air. Je te jure qu'ils grimperont au mur. Ils ne s'en doutent pas. Salat est persuadé que je vais marcher dans ses combines d'étouffement. »
Faisons confiance à Vergeat qui, comme écrit Raf Vallet, « (…) se vengeait de tous ceux qui abîmaient l'image qu'il se faisait jadis de la société. le complexe du bon sheriff. »
Un roman qu'on lit avec plaisir et délectation. La force des phrases de Raf Vallet rend le film, malgré les performances des deux acteurs, un peu fade, plus politiquement correcte et démontre encore une fois s'il en était besoin que sans littérature le cinéma est peu de choses.
Avis personnel. Lisez Adieu Poulet, et faites-vous le DVD, mesurez la distance entre les mots et les images…

Lien : https://camalonga.wordpress...
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Laborde Jean (pseud. Raf Vallet) – "Adieu poulet !" – Gallimard /Série noire, réed. 2021 (ISBN 978-2-07-294448-2) – format 21cmx14cm, 262p.
– avec une préface (pp. 7-13) de Gilles Magniont
– réédition de l'original publié en 1974
– photo de couverture extraite du film tiré de ce roman, réalisé par Pierre Granier-Deferre et sorti en 1975, avec Lino Ventura et Patrick Dewaere.

Il s'agit tout d'abord d'un roman policier de grande qualité : un style sec et dépouillé, une intrigue rondement menée, des personnages bien campés, bref, un de ces récits de type "machine à lire" que le lecteur lit jusqu'au bout pratiquement d'une seule traite. Et ça se relit sans peine, le récit n'a pas pris une ride, bien au contraire.

L'auteur prend appui sur une affaire bien réelle – le limogeage, le "dézingage" à Lyon du commissaire Charles Javilliey – pour articuler toute l'intrigue sur une unique idée forte, à savoir l'irruption dans ces années post-soixante-huitardes d'une magistrature de petits juges se croyant "de gauche", avides de jouer les Zorro et d'affirmer leur petit pouvoir sur la police, tout en restant bien douillettement à l'abri dans leurs bureaux, leurs volumineux dossiers, leurs certitudes de petits bureaucrates... trouvant tout naturellement la complicité de journalistes tout aussi avides de jouer les justiciers purs et durs.

Nous sommes alors en pleine affaire dite "de Bruay-en-Artois" (1972), suivie des désastres comme les affaires Roland Agret (1973) et Christian Ranucci (1974) ; suivront bientôt les grandes catastrophes judiciaires comme celles mettant en cause Emile Louis (1981-2001), Guy Georges (1981-1997), Gregory Villemin (1984, toujours en cours), Francis Heaulme (1984-1992), Omar Raddad (1991), Patrick Dills (1987), Outreau (1997), sans oublier bien évidemment l'affaire Fourniret (merci à la police belge).
Le Syndicat de la Magistrature mène la danse, les politiques inventent "l'indépendance de la justice" (!!!).

Depuis, la magistrature a inexorablement poursuivi son objectif de sape systématique de toute idée de justice, en relâchant l'après-midi même les délinquants que la police a mis plusieurs mois à prendre la main dans le sac, ou en court-circuitant ses propres décisions par le biais de remises de peine et de jugements d'un laxisme confondant, ou encore en s'arrangeant pour faire traîner à l'infini les dossiers les plus épineux.

La magistrature assume son "engagement à gauche" : aucune charge contre Strauss-Kahn et son ami Dodo-la saumure, rien à redire sur les agissements d'un Darmanin, l'affaire Benalla soigneusement déconnectée de toute allusion à Macron, mais en revanche, un Fillon bénéficia d'une justice TGV époustouflante et Dominique Baudis d'un lynchage judiciaire exemplaire appelé à rester dans les annales.

Mais la chasse à courre la plus tenace est réservée à Sarkozy, qui osa – crime impardonnable – évoquer la responsabilité des juges lorsque l'un d'entre eux s'avéra avoir par négligence remis en liberté Tony Meilhon, un marginal "bien connu des services de police et de justice", qui, dès sa remise en liberté, s'empressa d'assassiner Laëtitia Perrais (janvier 2011). Sacrilège ! Sarkozy osait dire sans fard qu'un magistrat était un salarié comme un autre, devant rendre des comptes (comme tout un chacun) lorsqu'il commet une grave erreur professionnelle : absolument in-ad-mi-ssi-ble pour nos magistrats, qui descendirent immédiatement dans la rue pour protester et créèrent "le mur des cons".

Ces derniers temps, ces petit-e-s magistrat-e-s se font doubler par leurs ami-e-s journalistes : depuis "meetoo", le tribunal n'existe plus que sur les plateaux de télé, histoire de dézinguer un Baupin, un Hulot, un Poivre-d'Arvor.
Et les pôvres petit(e)s magistrat(e)s de réunir trois mille signatures au bas d'une pétition sensée apitoyer le brave justiciable de base, celle ou celui si bien décrit par Irène Frain dans son témoignage publié l'an dernier sous le titre "Un crime sans importance : récit", à lire absolument.

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