The French writer Irene Frain presents her last novel L'Allégresse de la Femme Solitaire » ( Lone Woman's Rejoice ») based on the true story of a woman left in the wild island of San Nicolas, California, where she lived alone during 18 years. In very mysterious circumstances, a captain, Goerge Nidever, led her to Santa Barbara in 1851, where some people tried to decipher her language and understand what happened in the island when she was abandoned.
Les morts sont très puissants, ils ont le don de s’inviter dans votre vie quand vous croyez avoir tourné la page.
Le classement du dossier de Denise ? Serait-ce que nos modernes tribunaux s'inspirent des hypermarchés qui ceinturent nos villes ? Qu'ils se sont transformés en machines à distribuer de la justice de masse et fonctionnent sur le même principe que le monde de la marchandise : quand un produit, lors d'un arrivage, s'avère bizarroïde ou mal fichu, pas de sentiment, direct à la benne à déchets ?
Ensuite, un bon jet de Javel par là-dessus, on n'en parle plus. Il se trouvera évidemment quelques excités pour crier au gâchis mais ils se lasseront vite.
De fait, il ne me semble pas que les vieilles femmes trucidées aient jamais suscité pareilles et contagieuses démonstrations populaires. Ou ça m’a échappé. En cas d'assassinat sauvage, à moins d'être une enfant, il faut être jeune et belle pour mériter ces processions indignées. Le plus souvent, les meurtres de « retraitées », selon l'expression consacrée, ne passionnent ni les foules ni les média, sauf quand le sexe et l'argent viennent pimenter l'affaire. Un gros héritage, par exemple, ou un gigolo - si on dispose des deux ingrédients, jackpot assure.
Il n'était pas glamour, le meurtre de ma sœur. Aucune prise pour l'imaginaire. Rien que de la réalité à l’état brut. Du pas beau à voir, comme avait dit un des flics le dimanche où on l’avait trouvée.
Recommençons, comme avant, à nous mettre à l’écoute du ciel, des animaux, des nuages, des arbres, des insectes, des serpents, des fleurs, des plantes. Et puisque la vie et l’eau sont les seules vérités qui tiennent, occupons nous de la vie et de l’eau
Les morts vivent constamment à nos côtés, nous accompagnent au quotidien ; leur dernière demeure, davantage que leur tombe, est notre mémoire.
« Ne parlons même pas du crime lui-même, ceux qui sont censés avoir enquêté se taisent toujours. Et le Mastodonte n’est toujours pas sorti de son coma estival. »
Déferle alors la rage. Je jette le livre, je balance le carnet, je me claquemure dans ma cuisine ou mon bureau, j'y crache tout ce que je sais d'injures. Ça ne sert évidemment à rien. Je regagne mon lit, où fatalement, le sabbat des questions reprend : « Sept agressions en un an, qu'est-ce qu'il leur faut de plus ? De nouveaux morts ? »
Et pour une raison qui a échappé à tous : la haine, comme l'amour, se nourrit de paroles. Elle a besoin de mots, c'est sa faille, il faut qu'elle se raconte, nul ne peut se soustraire à cette loi, pas même les êtres les plus dissimulés.
Ils s'étaient pourtant promis une alliance éternelle: ils seraient l'un à l'autre "l'amour nécessaire", avait proclamé Sartre, et leurs autres attachements, des amours "contingentes". A eux deux, ils allaient réinventer l'amour; ils engageraient leur corps ailleurs sans jamais engager leur tête. A une seule condition: tout se dire.
- années 1920 -
Depuis qu'il va à l'école, il est régulièrement assailli par l'angoisse du rejet. Ça a commencé dès la petite classe ici même, dans le périmètre sacro-saint de l'école : un matin, au beau milieu d'une phrase en français, il a lâché, sans même s'en rendre compte, trois ou quatre mots de breton. Le maître a fondu sur lui puis l'a affublé d'un sautoir auquel pendait une queue de vache.
« A toi le symbole ! »
Pas besoin de se creuser la tête pour comprendre de quelle infamie le symbole est la marque : la vie à ras de la terre et des pierres qui fut celle de ses aïeux. Puis le maître lui apprend qu'il ne pourra s'en défaire qu'en dénonçant un camarade qui, comme lui, aura laissé échapper un mot de la « langue des arriérés ».
(p. 95)
Oui, il faut qu'ils soient là, les esprits, à rôder, à chercher à s'emparer des âmes des vivants, car voici qu'en plus de la lettre qu'il lui demande de leur traduire, Castellan est saisi d'une nouvelle inspiration : il lui demande aussi de jurer aux Noirs, dans leur langue, qu'il ne les abandonnera pas. De leur faire le serment que lui, le capitaine blanc, reviendra les chercher.