Du luxe et de l'impuissance et autres textes

On peut écrire sans écrire, tricher, mais aussi rester là en silence, inutile ou impuissant. Quelque texte essentiel se construit dans la tête sans plus aucun désir de le voir sur papier, sans plus aucune force de le donner, ne serait-ce qu’à soi-même.

(p. 38)

Avec l’ordinateur, ont disparu encore le brouillon, la rature et le remords.

(p. 37)

[…] et de temps à autre, pour se maintenir en forme, pousser quelques hurlements salutaires.

(p. 31)

[…] s’offrir ce petit luxe d’affirmer quelques hargnes de temps à autre.

(p. 28)

[...] noyer ses démons, garder le sourire.

(p. 25)

Une société, une cité, une civilisation qui renonce à l’Art, qui s’en éloigne, au nom de la lâcheté, la fainéantise inavouée, le recul sur soi, qui s’endort sur elle-même, qui renonce au patrimoine de demain, au patrimoine en devenir pour se contenter, dans l’autosatisfaction béate, des valeurs qu’elle croit s’être forgées et dont elle se contentera d’hériter, cette société-là renonce au risque, elle s’éloigne de sa seule vérité, elle oublie par avance de se construire un avenir, elle renonce à sa force, à sa parole, elle ne dit plus rien aux autres et à elle-même.

(p. 19)

Me mets plutôt au travail quand ça ne va pas très bien, quand ça va bien, quelle idée, on reste heureux, on s'occupe de ce bonheur-là, lorsque cela va moins bien, on se met au travail, ce que je dis, on essaie d'y voir clair. Quand on est totalement désespéré, on ne fait rien, on tente de se maintenir en vie.
Là, c'est juste l'entre-deux. La trace.

(p. 9)

Garder en réserve, toujours, au milieu des défaites, la légère et nécessaire ironie de la victoire.

(p. 8)

Nous serons amoureux, évidemment, le moins qu'on puisse. Et pas toujours en silence, pénibles et envahissants, et indignes, c'est bien et pas toujours mélancoliques et pas toujours fidèles et purs et pas toujours, je ne sais plus, mais amoureux, ça oui !

Parfois, encore, nous serons des guerriers, nous aurions tant voulu, nous irons notre route ainsi, rien ne nous arrêtera, ce que nous croyons. Des guerriers, oui et lorsque la tristesse nous prendra, lorsque nous serons seuls sans combat à conduire, nos ennemis enfuis, ou lorsque nous aurons perdu la bataille, nous serons à nouveau des enfants, enfants égarés ou enfants tristes, ne sachant plus à qui se vouer, regrettant qu'on ne se soucie plus de nous, livrés à nous-mêmes.