Nous sommes assis autour de la grande table à rallonges, un soir de réveillon à Mårbacka.
Quand maman sort le dernier paquet de la hotte à cadeaux, je comprends à sa forme qu’il s’agit d’un livre. Il ne sera bien évidemment pas pour moi. On a sans doute décidé d’avance que je n’aurai pas de livre. Le paquet m’est adressé, pourtant et, dès que je le tiens entre mes mains, je sens qu’il s’agit bien d’un livre. Je rougis à l’instant et, dans ma précipitation pour emprunter des ciseaux, je pousse presque des cris. Je coupe la ficelle, j’arrache le papier à toute vitesse, et voilà devant mes yeux le plus joli des livres de contes de fées.
Recevoir un livre en français est presque pire que de ne pas recevoir de livre du tout. J'ai du mal à retenir mes larmes mais heureusement, j'aperçois une des planches illustrées.
Là, la plus charmante des petites princesses voyage dans une voiture attelée à deux autruches...
C'est en ce temps qu'un jour, alors que Notre-Seigneur se trouvait au paradis et peignait les oiseaux, que la peinture vint à manquer dans les pots de Notre-Seigneur, si bien que le chardonneret serait resté incolore si Notre-Seigneur n'avait sur ses plumes essuyé tous ses pinceaux.
Car de même qu'il n'est rien de plus pesant que de rester inactif et immobile quand on entend parler des malheurs des autres, le plus grand bonheur et un calme paisible sont donnés à ceux qui, fût-ce avec peu, essaient de leur porter assistance.
Rien ne peut surpasser le bonheur de se trouver là, avec dans les mains un livre plaisant reçu en cadeau de Noël, un livre que l'on n'avait jamais vu auparavant et que personne d'autre dans cette maison ne connaît non plus, et de savoir que l'on pourra en lire les pages l'une après l'autre, pour autant que l'on sache rester éveillé. Mais que faire durant la nuit de Noël si l'on n'a pas reçu de livre ?
Pourquoi sa femme devait-elle s'opposer à ce qui n'était qu'un désir innocent ? Il lui incombait d'être soumise à son époux. (...) Maintenant elle avait appris qui était le maître de la maison. Bonne trouvaille de lui tirer dessus !
Le réveillon auquel je pense en ce moment, je venais d'avoir dix ans et je suis assise à la table de Noël aussi impatiente et tendue qu'on peut l'être. Je sais si bien ce que j'aimerais recevoir. Il ne s'agit ni de beaux tissus pour confectionner des robes, ni de dentelles ou de broches, ni de patins à glace ou sachets de friandises ; non, il s'agit de tout autre chose. Pourvu que quelqu'un ait l'idée de me l'offrir !
Car il me faut expliquer comment les choses se passent à Måbarka le soir du réveillon. On a le droit de tirer une petite table au chevet de son lit et d'y poser une bougie, et puis l'on a le droit de lire aussi longtemps qu'on le désire. Et cela constitue un des plus grands plaisirs de Noël.
Car de même qu’il n’est rien de plus pesant que de rester inactif et immobile quand on entend parler des malheurs des autres, le plus grand bonheur et un calme paisible sont donnés à tous ceux qui, fût-ce avec peu, essaient de leur porter assistance.