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sur 309 notes
Chirurgien à Lyon et passionné de chasse, François, la cinquantaine, passe tout son temps libre à traquer et à tirer le gros gibier autour de sa résidence secondaire, isolée à l'écart de la commune de Lanslebourg, en Savoie. Par un jour neigeux de Novembre, son quotidien bascule brutalement : alors que s'impose intolérablement à son esprit l'abîme d'incompréhension creusé au fil du temps entre lui, son épouse de plus en plus absorbée par ses crises mystiques et ses retraites monacales, son fils qui mène grand train du haut de sa réussite dans la finance, et sa fille éperdument amoureuse d'un drôle de type aux affaires pas bien nettes, il en perd même l'envie d'ajouter à sa collection de trophées le grand cerf qu'il traquait depuis quelque temps. Encore est-il loin de se douter qu'il ne se trouve qu'aux prémices d'un véritable tsunami dans son existence et dans celle des siens…


L'histoire prend son temps pour laisser appréhender peu à peu par le lecteur le terreau des malentendus qui s'est accumulé dans cette famille depuis des décennies, un insidieux pourrissement amorcé il y a bien longtemps qui pourrait bien s'avérer une véritable bombe à retardement. Jusqu'ici plein de certitudes et fort de sa toute-puissance, lui qui partage son existence à sauver ou à prendre la vie d'autres êtres vivants, François doit bien s'avouer que le monde lui échappe et que ses enfants lui sont devenus étrangers. Bientôt, le doute et le désarroi vont laisser la place à une soudaine accélération et au rythme palpitant d'une tragédie cauchemardesque.


L'écriture est précise, voire experte quand elle aborde la chasse, la taxidermie ou la chirurgie. Elle réserve de beaux passages sur le cocon de nature en noir et blanc qui enserre l'intrigue jusqu'à l'étouffement, tandis que le mode narratif, souvent constitué des seuls dialogues, sans commentaires et avec leurs blancs, tels la restitution d'un enregistrement audio, donne aux personnages une profondeur et un réalisme réussis. le texte revient parfois audacieusement sur les mêmes passages, les faisant redécouvrir à la lumière des réflexions survenues entre temps dans la tête de François comme dans celle du lecteur, renforçant encore l'impression d'originalité déjà générée.


Curieusement aussi méditatif qu'haletant, ce noir polar sur fond de paysages glacés livre un implacable tableau familial, aux personnages désespérément englués dans un attachement délétère et mortifère.

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Je suis encore sous le charme de cette lecture et j'ai du mal à parler de cette histoire comme si j'avais peur de l'abîmer !

François Rey est chirurgien orthopédiste dans une clinique qu'il a créée à Lyon. Il est connu pour sa technique rigoureuse, sa dextérité et le respect du patient, de la déontologie qui ont fait sa notoriété.

Côté famille, c'est plus compliqué : son épouse passe sa vie en retraite dans différents monastères et les séjours ont tendance à se prolonger. Son fils Mathieu a abandonné ses études de médecine pour se consacrer à la finance et s'enrichir sur le dos des autres.

Sa fille Mathilde continue les siennes mais jusqu'à quand car elle vient de tomber amoureuse d'un financier un peu glauque.

François vient passer les vacances de Toussaint dans son relais de chasse, dans les Alpes et rencontre un cerf magnifique, majestueux selon ses termes. Il l'ajouterait bien à son tableau de chasse, mais une seconde de réflexion, une fascination pour l'animal, il rate sa cible et le blesse.

On est médecin ou on ne l'est pas : il va chercher du matériel et opère l'animal…

J'ai adoré ce roman, avec presque une identification avec François, un des derniers dinosaures de ce monde en train de s'écrouler, où on respectait le travail, l'argent bien gagné, car il a un patrimoine important, des parts dans sa clinique… Son face à face avec le cerf est extraordinaire, deux forces de la nature qui s'observent et se « respectent ».

Reconnaissez que le cerf a de la classe (de la gueule) quand même sur la couverture!

Son sens des valeurs, le respect de l'autre, le fait d'être là pour ses enfants malgré tout m'ont plu, et je connais bien son milieu professionnel. Solidarité par le travail ou par la génération ? Entre dinosaures peut-être simplement.

Par contre, ses enfants sont imbuvables, seul l'argent les intéresse, en le piquant aux autres de préférence. Une phrase pour illustrer la vision du monde de Mathieu quand son père lui dit que ses mains valent de l'or, et sont assurées : « Aujourd'hui, on ne gagne plus d'argent avec son métier, avec son travail. On le gagne avec de l'argent. » Ou bientôt ce seront les robots qui feront les interventions chirurgicales…

J'ai aimé la manière d'écrire de Luc Lang, de tenter de semer le lecteur, démarrant en douceur pour s'emballer, avec les requiem ou messe que François écoute en boucle. J'avais déjà été emballée par « L'autoroute » il y a quelques années.

Coup de coeur donc ! et pourtant la chasse me hérisse… C'est dire à quel point l'histoire et l'écriture peuvent faire plonger dans un roman!

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock qui ont bien voulu de faire confiance…

#LaTentation #NetGalleyFrance
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Me voilà ébloui et désemparé. Je ferme le roman incertain quant au sens à lui donner. Une interprétation se dégage mais elle reste trop fragile. Commençons par résumer l’intrigue en quelques lignes. François Rey est un grand chirurgien qui possède une clinique à Lyon. Il passe le week-end de la Toussaint dans sa résidence secondaire située dans le massif du Mont-Cenis en Savoie. Il souhaite profiter de ses jours de repos pour s’adonner à sa passion : la chasse. Mais son entourage familial le tracasse. Son épouse Maria multiplie les retraites dans des couvents où elle peut donner libre cours à ses crises mystiques. Son fils Mathieu s’est installé à New York où il a fait fortune dans la finance internationale. Mais c’est Mathilde, sa fille, qui lui donne le plus de soucis. Alors qu’il s’apprête à abattre un cerf doté de seize corps, il est pris d’un doute. Il manque son tir et blesse l’animal. Il suit sa trace mais lorsqu’il traverse une route, il croit apercevoir sa fille dans une voiture qui évite de justesse la bête blessée. C’est le début d’une série d’événements qui vont s’enchainer vers une conclusion brutale.

L’écriture de Luc Lang revêt plusieurs tournures. L’auteur est avant tout un styliste qui éblouit par la beauté de sa prose poétique. Il dresse de nombreuses correspondances avec l’art pictural ou la musique classique. Mais il sait également se faire descriptif pour détailler une série d’actions, chargeant le texte de nombreux termes techniques. L’auteur dépeint ainsi une opération de la main ou un combat de cerfs. L’auteur sait aussi créer un récit haletant en enchainant des phrases courtes, rythmées, dictées par l’angoisse. Le roman peut déstabiliser par sa construction. Des glissements temporels brisent la linéarité du récit. Et le lecteur se demande si les pages qui ont précédé n’étaient pas le fruit d’un mauvais rêve.

Les références au Christianisme sont permanentes. On les retrouve dans le titre, le choix des prénoms des personnages, les citations extraites de la Bible, les renvois à l’art ou à la musique liturgiques. J’ai peiné à retrouver le sens qu’elles apportaient au texte pêchant par un manque de culture religieuse. Cependant, j’ai saisi que l’auteur opposait un monde de chaos dominé par la rapacité et la violence à une nature majestueuse, incarnée par ce cerf rayonnant de calme et de dignité, qui offre à qui l'observe un apaisement salutaire.

Le roman se clôt sur ses mystères. Je vais me laisser le temps de digérer ma lecture. Y revenir dans quelques semaines. Le relire pour profiter de la beauté de certains passages et pour tenter d’en pénétrer le sens. Je compte suivre les entrevues de l’auteur et les comptes rendus de lecteurs plus avisés qui pourront m’aider à l’interpréter.

Je remercie Netgalley et les éditions Stock pour ce beau partage.
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C'est l'histoire d'un monde qui bascule, un ouvrage à l'intensité rare, sur fond sonore quasi permanent d'opéras et de musique classique, au coeur de la splendeur des décors magnifiquement décrits de la nature savoyarde !

« La-tentation » mais quelle tentation: celle du désespoir? de l'échec? , du renoncement? de la rédemption ? de l'amour ? ..

François, la cinquantaine, chirurgien lyonnais chasse seul—
Il n'a même plus de chien, mort il y a trois ans ——, se réfugie dés qu'il le peut dans la vieille demeure familiale au coeur des Alpes.

Le voilà face à un cerf seize cors, altier, majestueux, repéré depuis longtemps , révélant sa puissance et sa splendeur .
Il ne désire pas le tuer, décide de la ramener chez lui pour le soigner, l'opérer.
Survient son fils Mathieu ,banquier à New- York, : «  Les masses d'argent que je fais fructifier, c'est l'énergie divine qui circule entre les êtres. La vérité de Dieu enfin révélée. L'argent , c'est la Grâce, qui nous cimente ensemble... »

François n'a pas de nouvelles de sa fille Mathilde, Elle ne répond plus à ses messages....
Soudain , le récit semble basculer: François qui se croyait tout puissant vivra de très cruelles épreuves , entre Thriller et Western enflammé , vibrant, haletant , lors de fulgurantes descriptions magnifiant la nature glacée , sauvage, et précis de chirurgie orthopédique , plus des références christiques sans cesse présentes.

Les deux enfants ont rompu leurs études médicales. Ils ne perpétueront pas la tradition familiale .
Entre eux et Maria, épouse , mère et belle- mère hystérique, coutumière de frasques mystiques qui court retraites religieuses de couvent en couvent , François est pris dans une spirale d'échec ...

Enfin, que transmet - on à ses enfants ?

Quelles valeurs humaines, culturelles et sociales ?
Qui trahira qui ?
Le père ne se reconnaît plus en ses enfants, spirale de l'argent fou, apparences et superficialité pour Mathieu , folie amoureuse de bête traquée qu'est devenue sa fille Mathilde ?

C'est un livre à la passion dévorante, aux phrases souvent non terminées, qui dépeint la violence des noeuds inextricables des liens sacrés du sang,au rythme soutenu, ample , puissant, brillant ...


J'ai été emportée malgré moi par l'âpreté de ces relations d'amour contrarié , une sorte «  de mur de verre »entre un fils que François ne comprend plus, et une fille «  obsédée » obnubilée par son Loïc ...

Récit initiatique noir , haletant , où l'auteur explore brillamment les abîmes familiaux dans une société en vrac , le désarroi d'une génération parentale complètement dépassée, qui pardonne tout , au fond ...

Tour de force littéraire, langue précise , quête de rédemption!

Un nouveau monde qui survient, un ancien monde qui s'embrase !
Féroce et difficile à critiquer car tellement riche !

A relire , certainement ....

«  C'est commode. Faire des affaires. Ça évite d'entrer dans les détails. Acheter, vendre, fusionner , absorber, assécher, ruiner, ouvrir, fermer , démembrer, revendre... C'est dur comme métier .
T'es dépassé , mon pauvre papa » .....
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« Il me faut une journée pour faire l'histoire d'une seconde… »

À l'instant de tirer sur le cerf François hésite. Et s'il…

La tentation.

« Il me faut une année pour faire l'histoire d'une minute… »

Son fils Mathieu débarque au relais de chasse familial. Il bouscule les convictions, écorche la trame d'une vie, soulève les ombres.
La vision de sa fille en danger accable François. Est-ce une hallucination ? Elle ne répond pas à ses appels. L'angoisse monte d'un cran.
Sa femme est folle. Sa toile de folie empoisonne le foyer. Emprisonne les non-dits.
L'argent envenime les enfants élevés dans ce milieu bourgeois, où jusque-là on soignait et réparait les corps. Une famille de médecins et de chasseurs.
Ils refusent la voie de leurs aïeux, cassent les codes, humilient l'art du travail, l'argent gagné avec les mains.
Ils font de l'argent avec l'argent, peu importe s'il est sale.
Il neige. Le temps dérape, il s'étire. L'histoire revient sur ses pas. Le présent empiète le passé, le futur se refuse, il ralentit, fait demi-tour. Tout s'emmêle.

« Il me faut une vie pour faire l'histoire d'un jour… »

Sa fille devenue proie se réfugie dans le relais de chasse familial. La toile se resserre. Tout vole en éclat.

À l'instant d'injecter l'anesthésiant, François hésite. Et s'il…

La tentation.

François cherche encore une explication, il cherche la première balle qui a impacté son futur et chamboulé sa vie. Il ne voit pas comment raccrocher l'image de ses enfants adultes à celle de leur enfance lorsqu'ils marchaient dans ses pas. Désormais ses enfants l'abandonnent, le trahissent, l'humilient. Le train va trop vite, il déraille, les wagons se détachent. François n'est plus la locomotive.

La construction de ce roman est originale, déroutante, envoûtante. François, chirurgien, dissèque les instants cherche l'anomalie, le point de départ. Le geste est précis. Ces instants sont comme en suspens dans ce paysage de montagne où la neige arrête le temps. Recouvre les traces. François fouille sa mémoire et les instants s'éparpillent, se mélangent. Les dialogues se mêlent aux descriptions. Les sons des voix sont assourdis par la neige. Tout se mêle au décor. La neige se colore de sang. Les fusillades éclatent le silence de la forêt. Le chasseur devient proie. Les enfants des fauves.

On se sent un peu perdu dans la trame de ce thriller. Comme au ralenti, en arrêt sur image, il nous invite à chercher les indices de cette violence familiale. On devine tout au long de ces longues phrases l'avalanche qui va bientôt se déclencher. Elles décortiquent chaque moment, le répètent, le tournent et le retournent jusqu'à l'asphyxie. Jusqu'à la mort.

« Que serait-ce quand il faut dans un livre, dans du livre, mettre de la réalité. Qu'arrive-t-il toujours. […] Il me faut une journée pour faire l'histoire d'une seconde. Il me faut une année pour faire l'histoire d'une minute. Il me faut une vie pour faire l'histoire d'un jour. On peut tout faire, excepté l'histoire de ce que l'on fait. »
Péguy
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Incroyable ! Ce livre m'a ferrée, je me suis sentie hameçon, complètement accrochée à ses lignes. J'ai découvert une nouvelle forme d'écriture, pointilleuse et exigeante dans tous ses menus détails, riche et passionnée dans toutes ses descriptions de la nature, simple ou tourmentée dans tous les faits qu'elle relate. Et surtout, une écriture extrêmement vivante, qui nous fait même retenir notre souffle et lire en apnée de longues phrases où les évènements s'enchaînent et nous happent. Vivante également dans son originalité de fins de phrases en suspens, traduisant l'impossibilité ou l'inutilité de poursuivre…

Une infime pression sur la détente et François éteindra à tout jamais le regard du cerf, ce cerf seize cors, au port altier, sa puissance sauvage, sa splendeur. Une hésitation, une blessure à la place de la mort, et François, qui soudainement remet en question le rapport de force face à l'animal, va sauver au lieu de faucher cette vie.
François est chirurgien orthopédiste à Lyon et passe seul ce week-end de la Toussaint dans son relais de chasse niché dans les Alpes, en Savoie. En cette toute fin d'octobre, un hiver précoce s'installe avec des flocons de neige qui s'invitent, un souffle glacé, un vent mordant.
Son fils, Mathieu, vient en coup de vent. Il a choisi le monde de la finance à New York « Aujourd'hui, on ne gagne plus d'argent avec son métier, avec son travail. On le gagne avec de l'argent. »
François a bien cru apercevoir sa fille Mathilde, terrorisée, dans une voiture poursuivie par un scooter. Mathilde, aveuglée par l'amour, et qui fait abstraction de tout danger, pour enfin s'éveiller à la vie.
Une longue chaîne pour actionner la cloche et aller chercher sa femme au carmel. Maria se retire régulièrement dans ces lieux de silence, en quête de retraites spirituelles. Maria, une mère aux agissements énigmatiques et tortueux, à l'amour délétère.

C'est pour le moins une famille ténébreuse. Dans sa présentation, l'auteur diffuse la menace sous-jacente qui couve.
François est désemparé face aux devenirs de ses enfants. Y a-t-il des explications à chercher dans le passé pour justifier leurs comportements, cette évolution, leurs choix de vies adultes ? Comme le stipule son fils, le monde du chirurgien est désormais obsolète, la toute puissance et l'exaltation des actionnaires ont écrasé la richesse des propriétaires d'hier. La coexistence est impossible, un mur s'est dressé entre ces deux mondes, seule l'amertume de ce constat demeure entre eux deux.

La blancheur de la neige qui recouvre peu à peu les lieux vient s'opposer à la noirceur des faits qui vont s'emparer de cette journée. L'incompréhension de la tragédie à venir est retranscrite singulièrement et avec une originalité qui m'a séduite : en lien avec la brutalité des évènements qui vont entacher ce week-end, Luc Lang joue avec la tentation de revenir en boucle sur les heures précédant l'inéluctable et ce, jusqu'au final.

Passion dévorante, puissance financière du nouveau monde, paysage alpin grandiose mais oppressant, amour filial démesuré et douloureux, monde animal sauvage et domestique, neige souillée, la traque du cerf se meut en tragédie humaine.
Avec un fond sonore presque permanent de musique classique et d'opéras, l'auteur a réussi brillamment à m'embarquer dans sa spirale littéraire éblouissante.
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François, chirurgien quinquagénaire, part pour une partie de chasse dans sa maison de campagne. Il est rejoint par son fils Mathieu, financier avec qui il entretient des relations assez distendues. Alors qu'il poursuit un cerf, il a l'impression d'apercevoir sa fille Mathilde, passagère d'une voiture qui évite de justesse le cervidé blessé...Cela va être le début pour François (et le lecteur) d'un week-end mouvementé...Voilà un récit qui m'a beaucoup plu : tout d’abord par son histoire, inattendue, entre crise familiale, roman noir et western ; puis par sa langue, littéraire et intrigante, très précise dans les descriptions de chasse et de chirurgie ; enfin, par sa temporalité étonnante, qui permet de redécouvrir l'intrigue (et de nombreux détails) dans chaque grande partie. Une lecture passionnante et un auteur dont je vais m'empresser de lire les précédents ouvrages. Merci à Netgalley et à Stock pour ce partage. #LaTentation #NetGalleyFrance
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Quelle que soit sa position sociale, le parcours de l'homme peut être apparenté à celui du vin. Jeune, il a sa période de progression vigoureuse puis il profite d'une phase de plateau plus ou moins longue suivant son caractère, les années s'écoulent et s'ensuit une descente fatale où il perd de sa superbe, son attrait s'efface cruellement et il ne tient plus franchement ses promesses.
Pour l'homme, malheureusement, la déchéance ne se cantonne pas à ces seuls critères car il est conscient de sa déliquescence et se recroqueville dans ses certitudes dépassées.

Dans ce roman classieux mais inquiétant, Luc Lang, m'entraine dans les traumatismes d'une famille très aisée. François, le père chirurgien à l'orgueil aussi démesuré que sa passion pour la chasse m'exaspère autant que je le plains. Il est l'archétype de l'aristocrate bouffi des ambitions de deux générations de grands saigneurs. Son épouse Maria, asservie par sa beauté éparpillée dans des réceptions imposées par sa charge maritale, finira de se consumer dans de nombreuses retraites mystiques et ambigües.

François est à l'issue de sa phase de plateau, l'amorce de sa descente se vérifiera dès les premières pages lorsqu'il lui sera impossible d'achever le cerf à seize cors de ses rêves. Ses convictions flageoleront en même temps que ses mains.
« L'explication du déséquilibre ne préserve pas de la chute »

Son arrogance partira en lambeaux dans le comportement impertinent de sa propre engeance dans leur phase ascendante mordante. Son monde à lui n'est plus assez vaste pour contenir Mathilde et Mathieu, ses enfants qui évoluent avec aisance et sans scrupule dans le nouveau monde de la haute finance.

La densité de l'intrigue atteint son paroxysme dans un huis-clos cruel et sanglant à l'écriture acérée et imagée d'un western jubilatoire. Un règlement de compte familial.
Bien que ce roman soit sans cesse auréolé de messes et de « Stabat Mater » que le parvenu François écoute pour se détourner de la trahison des siens, j'ai de la peine à assister à sa crucifixion psychologique.

« Était-ce l'histoire d'une fin, d'un commencement ? » Et si c'était un éternel renouvèlement.

A découvrir.
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Week-end de chasse en Vanoise

Le nouveau roman de Luc Lang met en scène un chirurgien confronté à épouse prise de crise mystique, un fils qui a refusé de suivre son projet pour devenir financier et une fille qui s'est acoquiné avec un malfrat. Un drame d'une précision chirurgicale.

Un léger trouble au moment de tirer et François voit s'échapper le grand cerf qu'il avait en joue. le chasseur aguerri s'est soudain rendu compte que le combat était inégal, que l'animal n'avait aucune chance. Les gouttes de sang à l'endroit où le cervidé a pris la fuite semblent le confirmer. Rattrapé et chargé dans son pick-up, il va démontrer qu'il n'a rien perdu de ses qualités de chirurgien en décidant d'opérer la cuisse du cerf et d'en extraire les éclats de la balle qui l'a atteinte.
Son fils Mathieu, qui l'a rejoint dans le relais de chasse familial, ne comprend pas cette décision bizarre.
La suite du nouveau roman de Luc Lang va se poursuivre sur ce même registre, l'incompréhension. François n'a pas compris que son fils interrompe ses études de médecine et un avenir tout tracé dans sa clinique pour se lancer dans la finance et devenir en quelques années un as de la finance à New York. C'est aussi outre-Atlantique qu'il a épousé le mannequin Jennifer Lilianson avec laquelle il est venu passer quelques jours de vacances.
François ne comprend pas non plus comment sa fille Mathilde, pourtant restée fidèle à la tradition en enchaînant les années de médecine, fréquente un homme aussi détestable qu'arrogant. Celui qui l'a «révélée à elle-même» nage dans des eaux troubles et fait de Mathilde la complice de ses trafics.
François enfin, ne comprend pas que son épouse soit prise d'une crise mystique et effectue des séjours de plus en plus prolongés au carmel. En allant la chercher pour la ramener dans leur appartement lyonnais, on lui annonce qu'elle a déjà quitté l'établissement.
Avec un sens aigu de la tension dramatique qui avait déjà fait merveille dans Au commencement du septième jourLuc Lang va nous conduire crescendo vers une scène de carnage autour de ce relais de chasse enneigé.
On y retrouve le grand cerf, le chirurgien qui va à nouveau devoir agir, les trahisons de ses enfants, une femme tout à la fois présente et absente, des gendarmes, un ami naturaliste et quelques cadavres...
N'est-ce pas quand on a tout, lorsqu'on a assuré son aisance financière et celle de ses enfants que tout se dérègle? Que l'envie de sortir du parcours tracé se fait de plus en plus pressante? Avec maestria, le romancier nous entraîne dans ces remises en cause parallèles qui vont virer au drame. Un livre à l'unisson de la météo ambiante du côté de la Vanoise: froid, âpre, traître.

Lien : https://collectiondelivres.w..
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François , chirurgien de 56 ans , espère bien rajouter à ses trophées le magnifique cerf qu'il avait repéré l'an dernier mais lorsqu' au bout de sa traque il a l'animal en ligne de mire , il hésite et ne fait que blesser la bête et plutôt que de l'achever, il décide de le soigner dans le relai de chasse qu'il a hérité de son grand-père .
C'est le moment choisi par son fils Mathieu, banquier vivant aux États-Unis pour débarquer dans ce lieu isolé alors que la neige se met à tomber et que François est persuadé d'avoir croisé sa fille Mathilde passagère d'une voiture de sport sur ces petites routes de montagne ...

Paradoxalement, alors que je n'aime pas la chasse, c'est le début de ce roman que j'ai préféré , la description de l'instant où le chasseur va tirer avec ce sentiment de toute puissance , tenir la vie de l'animal au bout de sa lunette et décider de la vie ou de la mort, un peu comme le métier de François où , au bloc opératoire lorsque le patient est endormi, tout dépend de son habileté, de sa vigilance.
Bien sûr, le questionnement ultime sur ce droit à retirer une vie rend l'homme plus "humain" et cette vulnérabilité le rapproche de la sensibilité du non-chasseur .
C'est cette faille qui au long du livre va s'agrandir avec la confrontation avec ses enfants devenus grands et ne correspondants plus à l'image que le père avait désiré, fabriqué , tout en gardant , surtout vis à vis de sa fille une anxiété que d'aucuns trouveraient maladives .

Mais le retour en arrière au bout de quelques pages sur ce qui vient de se passer juste avant et l'impression de tourner en rond en relisant les mêmes passages rendent la lecture laborieuse , ce que n'arrangent pas certaines descriptions fort longues , et l'histoire finalement est bien ténue avec une intrigue alambiquée et peu crédible et une fin qui est restée totalement énigmatique pour moi .

Donc , au final , un roman qui m'a semblé inabouti ... Dommage j'avais bien aimé Au commencement du septième jour du même auteur .
En remerciant NetGalley et les Éditions Stock

#LaTentation #NetGalleyFrance


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