Ce tome est le dernier après (1) Daydream Believer et (2) Maestro ; il contient les épisodes 13 à 18.
Quand le tome commence, Danny Noonan est en train de s'envoyer en l'air avec Loreli (la soeur de Saddie Browning) dans la cuisine et il jette une tasse à travers la fenêtre pour repousser un voyeur qui n'est autre que l'un des membres de son groupe de rock. La situation a bien évolué : Danny est devenu une star du rock, il possède une belle maison de banlieue et un gros 4*4, il peut même incendier sa maison le matin et la retrouver en parfait état le soir. Il peut même survivre à l'explosion d'une bombe qu'il a lui-même fabriqué et fait exploser à ses cotés.
Dans le second épisode, Danny baise une autre femme dans les chambres d'hôpital à coté de malades endormis, il s'envoie autant de drogues qu'il peut en consommer, mais il reste hanté par des cauchemars d'araignée et il ne peut s'empêcher de faire porter une perruque brune à Loreli pour qu'elle ressemble à Saddie. Et à eux deux, ils n'arrivent pas à sortir de la ville de province dans laquelle ils se trouvent. Et puis il y a ces mystérieux hommes en blouse blanche avec des masques leur cachant le visage qui interviennent sur les personnes qui entourent Danny. Puis il commence une nouvelle vie dans un bled vraiment paumé, avec une mère atteinte de diabète avancé ; il est propriétaire d'un établissement dans lequel il vend des sandwichs excellents.
Après avoir lu les 2 premiers tomes (il faut absolument les lire dans l'ordre), une seule question se posait : comment
David Lapham pouvait-il clore son récit ? Depuis le début, il est évident que le voyage est plus important que la destination. Ne reculant devant aucune difficulté, Lapham poursuit son récit en se privant lui-même de son plus grand atout : Saddie Browning ne revient qu'à la toute fin du récit. Et pourtant les situations déjantées, invraisemblables et dangereuses continuent de se succéder à un rythme effréné. Danny Noonan ne cesse de se retrouver confronté à des réalités différentes comprenant des éléments semblables sans être identiques (à commencer par ses potes dont CC et Annie X) dont il est toujours le centre. Mais Lapham ne se contente pas de réarranger toujours les mêmes ingrédients, il continue également de faire planer la menace des araignées venues de Mars et il distille au compte goutte des informations supplémentaires complétant les relations qui existent entre Saddie et Danny. Évidemment le lecteur retrouve tout ce faisait le sel des premiers tomes : une vie rock'n'roll (avec des variations dans la signification de ce terme), des relations sexuelles malsaines, des araignées, une volonté de comprendre ce qui se cache de l'autre du coté du miroir et un complot mal défini qui pèse sur Danny, sans oublier des personnages qui n'arrêtent pas de mentir.
David Lapham a illustré ces épisodes, comme tous les autres de la série. En tant que scénariste et dessinateur il se ménage quelques pages bien rentre dedans : Danny en proie à une remontée intense de souvenirs, Saddie en femme canon, un gros plan sans concession sur un club sandwich, une belle blonde en bikini dans une décapotable, etc. Mais Lapham n'abuse pas de ces pleines pages ; en tant que dessinateur il est entièrement au service de l'histoire. Son objectif est de décrire de façon assez détaillée et réaliste chaque scène pour que le lecteur puisse s'y projeter. Et croyez-moi j'aurai préféré ne pas être avec Annie X dans la salle de bain quand elle se fait vomir. Par contre, j'aurai bien aimé être à coté de Danny la fois où il voit sa première paire de seins. Dans ce tome, les protagonistes éprouvent des sentiments très proches de ceux des héros de sitcom (sauf que les situations ne s'apparentent à aucune sitcom connue) et Lapham prouve qu'il sait transcrire des émotions variées sur des visages.
Est-ce que la fin est satisfaisante ? Pour moi, oui elle l'est.
David Lapham livre enfin le fin mot de la culpabilité de Danny et la dernière page clôt le récit sur Danny se mentant à lui-même. Est-ce une fin cartésienne ? Non !
David Lapham a construit une mécanique logique lui permettant d'enchaîner les situations tordues, les mensonges, les revirements de situation à 180°, les nouvelles souffrances des personnages, le tout sur fond d'aventures, de rébellion et de conspiration, avec un hommage appuyé à la série le Prisonnier. Mais charge au lecteur de choisir entre le vrai et le faux, pour la version qui lui plaît le plus entre 2 extrêmes (Danny a tout inventé sous l'influence de substances psychoactives, ou les araignées ont tout manigancé). Je vous recommande chaudement la lecture de cette série sans prétention qui titille les neurones et l'affectif d'une manière aussi provocante qu'intelligente et dans laquelle les clowns font vraiment peur.