Ici, le cerf-volant était plus qu'un jeu. C'était le reflet d'une civilisation, le bonheur de se laisser porter, guider, dominer par les forces de la nature. C'était un art, une religion, une philosophie. Les lambeaux des centaines de cerfs-volants qui pendaient aux fils électriques du slum étaient les oriflammes du peuple de la Cité de la joie.
C'est à ras de terre que sont vraiment efficaces et appréciés comme tels les gestes de solidarité. Un simple sourire peut avoir autant de valeur que tous les dollars du monde.
L'article 24 de la Constitution indienne stipule que : « Aucun enfant ne peut être mis au travail dans une fabrique ou une mine, ni occupé à aucun autre poste dangereux. » Mais, pour des raisons de rendement et de docilité, une grande partie de la main-d'œuvre était extrêmement jeune. Au moment de l'embauche, un enfant avait en effet presque toujours la préférence : ses petits doigts étaient plus habiles et il se contentait d'un salaire minime.
Combien de fois ces paies de misère gagnées par des enfants avec tant de fierté faisaient la différence dans une famille entre la famine et la survie !
nous réclamions le droit de gagner notre riz comme tout le monde. Les passants nous regardaient défiler avec étonnement. Ils n'avaient jamais vu autant de rickshaws à la fois. Us étaient surtout surpris. D'habitude, c'étaient les fonctionnaires de la municipalité qui descendaient dans la rue, ou les employés des chemins de fer ou les conducteurs de trams, bref ceux qui avaient la chance d'avoir un vrai emploi et qui touchaient de bonnes payes. Que des gueux qu'ils considéraient comme des bêtes de somme, qu'ils ne voyaient jamais autrement que le dos courbé, osent eux aussi manifester, cela semblait les dépasser.
Ici, tu ne peux rien cacher. Même pas la couleur de ton âme.
Mais la grève est une arme pour les riches, reconnaîtra douloureusement Hasari Pal. Les plus belles résolutions ne tiennent pas longtemps quand vous avez un ventre tordu de crampes par la faim et la tête aussi vide que la peau d'un cobra qui vient de muer. Ces brutes de propriétaires le savaient bien. Ils savaient que nous craquerions très vite.
Il avait appris une rude leçon cet après-midi-là.
"Puisque dans cette ville inhumaine des hommes se tuent à la tâche, ce serait bien le diable si je ne parviens pas un jour à prendre la place d'un mort."
Il est facile à tout homme de reconnaître et de glorifier les richesses du monde, dit-il en cherchant du regard les visages noyés d'ombre, mais seul un pauvre peut connaître la richesse qu'est la pauvreté. Seul un pauvre peut connaître la richesse qu'est la souffrance...
Malgré la malédiction qui semble l'accabler, ce bidonville était en effet une cathédrale de joie, de vitalité, d'espérance...
J'ai découvert le vrai sens des mots courage, amour, dignité, compassion, foi, espérance.
C'est là, sans aucun doute, l'une des expériences les plus enrichissantes que puisse vivre un homme.