Il y a peu de témoignages sur le système concentrationnaire chinois, même si en ce moment on en parle plus dans le cadre de la répression contre la minorité Ouigour. Mais personne n'en parlait pas avant le massacre de Tien An Men en 1989. En 1953 les soit-disant "intellectuels de gauche" soutenaient les dictatures communistes, les Lettres Françaises écrivaient que "les camps de rééducation soviétiques sont le parachèvement de la suppression complète de l'exploitation de l'homme par l'homme". Pendant ce temps le gouvernement chinois envoyait des millions de personnes en esclavage dans ses propres camps.
Lau Sanching est un activiste de Hong-Kong, il était membre de la Ligue Marxiste Révolutionnaire, et il a fait plusieurs voyages en Chine pour soutenir les mouvements démocratiques. Il sera arrêté en 1981 lors du 14ème, accusé "d'activités contre-révolutionnaires dans le but de renverser le pouvoir de la dictature démocratique populaire", et condamné à 10 ans de camp.
Ce livre est le récit de la période précédant son arrestation, et des dix années de camp, dont une grande partie en isolement car il refusait d'avouer "son crime". On y découvre la brutalité, la corruption, le lavage de cerveau qui doit amener le prisonnier à remercier le gouvernement de sa clémence pour l'avoir laissé en vie. Toute la palette de l'arbitraire est utilisée pour atteindre ce but, de la bastonnade à la prolongation de peine, les autocritiques, et surtout la délation qui est institutionnalisée pour que les détenus ne puissent faire confiance à personne.
Il existe quelques passages surréalistes, lorsque l'auteur est condamné à l'isolement mais qu'il peut s'abonner aux principaux journaux du pays. L'auteur soit-disant isolé, discute avec son ami de la meilleure attitude à adopter pour le mouvement étudiant afin de faire plier le gouvernement. Ca parait incroyable, malheureusement ça se terminera par Tian Anmen.
On peut regretter la partie dialectique où l'auteur raconte son engagement politique, d'une part parce que c'est un peu hors sujet, d'autre part parce que c'est très difficile à suivre, cette partie faisant référence à des personnages et des évènements inconnus en Occident.
Pour un témoignage sur les camps de concentration en Chine, je vous conseille la lecture de "Prisonnier de Mao", le récit de
Jean Pasqualini, un franco-chinois qui y a passé 7 ans (1957-1964). Son crime était de parler anglais, et son récit est bouleversant car les conditions de détention de l'époque étaient absolument horribles.