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Critique de Lamifranz


Dans la série « Comment ! Un tel auteur existait et je n'en savais rien ! », voici Gustave le Rouge. Longtemps méconnu, et aujourd'hui encore mal connu et en tous cas peu connu, il ne doit sa résurrection qu'à deux hommes, importants dans le monde des lettres (à des titres différents) : Blaise Cendrars et Francis Lacassin. le premier est l'écrivain qu'on connaît, poète, romancier et essayiste, ami et confrère d'Apollinaire (se situant un peu dans le même créneau) ; le second, immense défricheur de la littérature populaire, qui a fait redécouvrir un pan entier de la littérature plus ou moins écartée du canon classique, avec des auteurs comme Maurice Leblanc, Gaston Leroux, Maurice Renard, Gustave le Rouge et des dizaines d'autres, responsable d'édition, et auteur de préfaces lumineuses chez 10-18 et chez Bouquins (entre autres). C'était également un grand spécialiste de la bande dessinée.
Gustave le Rouge (1867-1938) est donc encore assez peu connu, et pourtant le bonhomme vaut le détour : d'abord auteur de romans d'aventures « à la Jules Verne » (« La Conspiration de milliardaires » – 1899 ; « le sous-marin Jules-Verne » – 1902 ; « La Princesse des airs » – 1902), il s'oriente vers une veine fantastico-ésotérique avec le somptueux diptyque « le Prisonnier de la planète Mars » (1908) et « La Guerre des Vampires (1909) avant de nous livrer son chef-d'oeuvre « le Mystérieux Docteur Cornélius » (1911-1912).
« le Mystérieux Docteur Cornélius », c'est d'abord un roman-feuilleton. Dans la lignée des Paul Féval ou Ponson du Terrail, et plus récemment de Gaston Leroux ou Maurice Leblanc, ou encore de Pierre Souvestre et Marcel Allain (les créateurs de « Fantômas »), c'est une longue série de dix-huit épisodes, chacun subdivisé en six ou sept chapitres. L'originalité, par rapport aux auteurs précités, c'est que le Rouge ne se borne pas à un genre précis : le point de départ est policier : les frères Kramm sont à la tête d'une entreprise criminelle internationale (« La Main Rouge ») qu'ils dirigent de main de maître : Fritz est la cheville ouvrière, le « parrain » en quelque sorte. Mais la tête pensante est Cornélius, un scientifique qui consacre ses études au service du mal : il a mis au point une science nouvelle, la « carnoplastie » (ancêtre de la chirurgie esthétique) qui permet de donner aux criminels un nouveau visage. Un réseau de complices les assiste sur le Vieux Continent comme sur le Nouveau. Ils ont beau jeu, tant les administrations sont molles ou pires corrompues. le clan du bien, lui, est mené par un naturaliste, Prosper Bondonnat, qui n'a de cesse de combattre son mystérieux et invisible adversaire : ils ne se rencontreront qu'au quatorzième épisode, et Bondonnat n'identifie Cornélius qu'au début du dix-huitieme et dernier !
Sur cette trame policière, le Rouge calque une aventure où le scientifique voisine avec l'horreur : la « carnoplastie » n'est pas la seule invention du feuilleton, d'autres fourmillent d'inventivité (synthèse des diamants, accélération de la croissance des céréales, canons antigrêle, utilisation des nuages comme écran cinématographique, etc.) On peut parler ici de « merveilleux-scientifique » (celui incarné également par Maurice Renard).
Et bien entendu, ce thème (policier + aventure + fantastique) doit croiser à un moment ou un autre celui de l'amour (ou de la femme). C'est ici que le Rouge diffère de Jules Verne : le Rouge n'est pas politiquement correct : ses héroïnes sont pour la plupart chastes et pures, blondes et diaphanes, comme dans la tradition du roman-feuilleton, mais elles peuvent être beaucoup plus tentatrices, aux contours sensuels, et parfois dotées d'une intimité très… accueillante.
Leroux, Leblanc, le Rouge… Décidément ces auteurs de la Belle Epoque nous en font voir de toutes les couleurs ! Mais c'est pour notre plus grand plaisir !
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