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EAN : 9782357793972
720 pages
Camion Blanc (16/10/2013)
5/5   3 notes
Résumé :
Être Casanova et être un moine. Être un plaisantin et un mélancolique. Être un poète, une star, un troubadour et un ange : être Leonard Cohen. Toute sa vie, l'éternel passant aura déplié sa trajectoire en amoureux du paradoxe, sans cesser de faire ce qu'il fait le mieux : aller de ville en ville, séduire les femmes et raviver nos coeurs. Entre New York, Montréal et l'île grecque d'Hydra, Leonard Cohen : L'Homme qui voyait tomber les anges suit à la trace cette vie c... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un pur régal. Un petit bijou, richement documenté et ciselé avec style. Une généreuse pépite, 675 pages illustrées, qui se lisent (trop) vite.


Tout, vraiment, me semble réussi : une écriture fluide, précise, pertinente et drôle. Une analyse du personnage et de son oeuvre au prisme de trois fils rouge : la chute des hommes, Dieu, les femmes.


Une connaissance encyclopédique, pas seulement musicale, minutieusement sourcée, du parcours cahotique de Leonard Cohen sur plusieurs décennies, avec en background l'évolution critique de l'industrie du spectacle, ses modes et ses excès.


Bouquin qui dispense une empathie contagieuse pour ce personnage si obscur et complexe, troubadourd dépressif, érotomane invétéré, Gainsbourg en version juif canadien.


Les analyses de Christophe Lebold des textes de Leonard Cohen sont lumineuses, sans jamais tomber dans la fascination du groupie, avec des incursions érudites dans ces religions qui hantaient ce parolier torturé : angéologie chrétienne, bouddhisme bodhisattva, mystères de la kabbale...


Un livre qui mériterait de devenir LA référence, le modèle, l'exemple à suivre, de toute future biographie.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Le génie, dit-on, est la capacité de voir les choses exactement comme elles sont. Si les leçons de métaphysique de Leonard Cohen ont rencontré le succès qu'on sait, c'est que le public a reconnu sa vision fondamentale - « l'homo cadentes », l'homme en chute - pour ce qu'elle est : l'expression d'un réalisme absolu. Nos cœurs sont irréparablement brisés, notre soif de gravité est inextinguible, nos vies sont tissées de chutes indécelables que seuls les prophètes, les saints-losers et les anges savent voir : c'est la réalité même.
On comprend donc une chose : l’œuvre de Leonard Cohen fonctionne selon la logique du don. En mettant nos défaites au centre de son propos, le chanteur nous restitue une chose très précieuse que la culture dominante, tissée de divertissements, de consommation et de communication nous refuse : nos cœurs brisés, la gravité de nos existences et le poids véritable de nos vies.

Sous la théologie de la chute donc, un geste artistique d'une infinie compassion : Leonard Cohen dit le grave pour nous affranchir de nos rêves de vies idéales afin que, ressaisis de la texture véritable de nos existences, nous puissions les vivre avec la légèreté qui n'appartient qu'aux cœurs vraiment brisés (pp. 21-22).
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[...] fondamentalement rien ne change, l'écriture restant pour Leonard ce lent processus alchimique qu'il avait désigné en 1979 avec cette merveilleuse expression : "le bégaiement continu du Verbe se faisant chair".

Rappel du principe : la vérité de ce qu'il cherche à dire doit être distillée à partir des slogans et des approximations qui viennent en premier. Le poète circule donc de pièce en pièce, ne répond plus au téléphone et se frappe la tête contre les tapis à la recherche d'une rime [...].

Explications du poète :
"J'ai tendance à m'écrouler quand je travaille sur un disque et je crois que c'est nécessaire. Pour atteindre ce stade où je pourrais défendre chaque vers et chaque mot, je dois me débarrasser de ces versions de moi-même qui essayent de m'imposer un slogan ou une opinion [...]. Il faut que j'annihile, que j' assassine, que je tue ces versions de moi-même qui murmurent des mensonges ou des solutions faciles. Et à chaque fois, c'est un carnage qui implique l'effondrement de la personnalité".

Nadel mentionne le récit d'une amie qui, après avoir forcé un jour le poète à prendre un café dans un bistrot, se rend compte une fois installée de l'étendue des dégâts : "un zombie ahuri qui marmonne dans sa barbe et récite des bribes de chansons les yeux dans le vague". Ambiance.

(pages 569-570)
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Et puis, en centre scène, Leonard Cohen. Un vieux guerrier reconverti en crooner : c'est à cela qu'il ressemble. Lorsque, par exemple, il s'incline à la japonaise devant ses musiciens, ou lorsque, les yeux fermés, il suit leurs solos, le chapeau feutre posé sur le cœur. On croirait voir un vieux samouraï qui écoute le croisement des sabres. Il faut le voir aussi chanter : les genoux ployés, le visage tourné vers le sol ou le ciel. Un homme en mission. En guerre, comme à chaque fois, contre l'obscurité de nos existences. Un alchimiste penché sur le creuset de la gravité où il reprend éternellement le même grand-œuvre : distiller de la lumière à partir du noir.

(page 657)
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Acteur, troubadour, griot ou jongleur, quiconque monte sur un plateau pour s'offrir aux regards s'offre : il offre à la foule son humanité et la donne en spectacle. Il n'a pas le choix, d'ailleurs : quoi qu'il fasse son humanité se verra puisque elle est dans la lumière. D'où cette responsabilité immense de l'artiste envers les spectateurs : il est le dépositaire de leur humanité commune et doit la rendre passionnante et mystérieuse tout le temps qu'il s'offre aux regards. Car un public ne se contente pas de regarder et d'écouter (ce n'est que son rôle apparent). Un public donne sa vie en gage par tranche de deux ou trois heures. Il dit à l'artiste : prenez et vivez, dites ou dansez maintenant ma vie mieux que je ne saurais moi-même la vivre, la dire ou la danser. Chantez-la, s'il le faut mais que le mystère de notre humanité soit un instant éclairé et que je quitte ces lieux instruit sur moi-même.
On a tort, donc, de croire qu'on va au spectacle pour se distraire. On va au spectacle pour être mis au contact intime avec cette chose précieuse, qui gît au fond de nous-même : ce cœur qui bat et qui va cesser de battre.

(page 318)
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Confronté à la misère de son désir et à des figures féminines archétypales (la femme-ange, la femme-mégère, le mannequin support de la beauté du monde, la femme en chaleur gorgée de désir, la déesse...), le séducteur découvre ce qu'il est de fait : un ridicule appendice finalement inutile du corps féminin.

(page 444)
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