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Citations sur Ravages (43)

Etre désespérée ne veut pas dire qu'on n'espère plus.
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Je répondis oui avec mes paupières : j'aime faire l'amour avec des regards.
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« Il y a un homme dans la maison », me dis-je avec satisfaction. Qu’il est petit quand il est assis. Je le dépasserais si je m’agenouillais derrière lui. J’empoignerais ses cheveux, je renverserais son visage, je verrais sa grimace d’homme, d’homme que j’aurais dérangé. Il a beau être assis avec ses mille métiers qui se débinent. Du haut de sa tour, il boit et il regarde les chariots d’étoiles. Il prend son temps. C’est un homme, c’est un fournisseur. Il a le passé et l’avenir à lui. Le ciel semble plus inquiet que lui. Même plié en deux sur la pierre, il est svelte et fluet. Une taille de jeune fille. Une vraie taille de jeune fille. Des mains romantiques d’adolescent. Ce n’est pas une bête, ce n’est pas un objet. C’est un homme dont je veux disposer.
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Un homme. Quelqu’un qui met son innocence dans ses actes.
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Toute la ville m’affama. Je l’avais devant moi. Comment s’y prenait-il pour s’éclipser et réapparaître ? Il ne m’avait pas quittée : nous allions sans commencement, sans fin. Je ralentis, je le détaillai, je sacralisai le col graisseux de son imperméable, ses cheveux ingrats, sa nuque pauvre, ses oreilles décollées. J’eus des frémissements dans les bras et dans les mains, frémissements de sa taille fine, de la ceinture de son imperméable serrée comme la mienne jusqu’au dernier œillet. Il avançait à petits pas rapides, évitant par temps sec des ruisselets sur le macadam.
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Ce samedi-là, je fus prête une heure à l'avance. J'éteignis, je m'assis à côté du poêle, j'attendis. Ce qui ne s'écoutaient pas vivre furent toute ma vie: la locataire qui piquait à la machine, la concierge qui prenait quelques fois de l'eau à la fontaine, les enfants qui parlaient entre une cuisine et une chambre à coucher. J'attendais: je recueillais les instants des autres, mon cœur s'épanchait sur le rebord des fenêtres. La sereine escarbille tombait, le temps pour les inquiets soupirait. J'entendis des pas dans la cour: un parterre d'alouettes devant le lit s'éveilla, il illumina la chambre. Ce ne sera pas Marc comme avant. Je ne ressusciterai pas les oiseaux morts de froid. Ce n'était pas Marc. Le temps avec sa crosse, sa mitre et ses pompes passa sur les fouillis et les ronces des terrains incultes, un chien aboya où l'air se raréfie, un volet de fer retomba.
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La serviette-éponge tomba de ses reins. Marc commença de se raser avec la lame enveloppée d’un côté dans du papier journal. Il me vit dans le miroir.
-Ne regarde pas ! dit Marc.
[…] Je regardai. J’espérais que je le ranimerais et que je l’intéresserais à distance ; j’espérais que Marc me dirait : « Je ne pars plus, viens. » Je le regardai longtemps, je réchauffai sans le toucher le petit tombé du nid. Je levai les yeux. Nos regards se croisèrent encore dans le miroir. Marc voyait ce que je faisais avec mes yeux. Il s’éclaircit la voix, il faillit se couper. Je baissais toujours les yeux. Je le ranimai, je le réchauffai, je le flattai encore plus bas. Marc jeta se lame de rasoir sur la tablette de verre. Il saisit mes poignets :
-Non, Thérèse, non ! Avec ton régime nous serons cinglés avant six mois.
-Nous serons cinglés, dis-je sans lever les yeux.
Je sentis que Marc aussi baissait les yeux et se regardait. Il serra les poings, il reprit sa lame de rasoir sur la tablette.
-Nus à dix heures du matin dans ce trou, dit Marc.
Je regardai : il se rasait et il regardait dans le miroir si je baissais les yeux pour voir plus bas. Je vins dans son dos, je lui frôlai lentement les hanches. Il ne me repoussa pas.
Nos regards se croisaient toujours dans le miroir, nos yeux brillaient. La main de Marc trembla, la lame de rasoir tomba dans l’évier. Je la pris, je l’essuyai et la rendis à Marc. Il haussa les épaules, il s’approcha du miroir. Je revins derrière lui, je l’enlaçai. Ma main suivit le chemin rêvé depuis le transparent de cheveux argent jusqu’à l’aine.
-Je te le donne, je te le donne ! dit Marc avec désespoir.
Le bouton d’iris que j’enfermais dans ma main avait une douceur d’apôtre.
La main de Marc trembla plus fort. Il cessa de se raser.
-Il n’y a pas que cela au monde, dit Marc.
Je le serrais, je le fortifiais, mon âme remerciait, les murs ruisselaient. Marc lança la lame dans l’évier, il enleva ma main avec des doigts contractés.
Je le suivis dans la chambre.
Il se jeta à plat ventre sur le lit, il serra l’oreiller dans ses bras.
Il souffre : j’ai la paix. Il souffre : je vais et je viens dans la chambre. Il souffre : je ne suis plus la vague qui se brise contre le rocher.
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Partir, ne pas partir, je n'en peux plus, dis-je à la feuille de géranium que je serrais dans ma main. Son parfum austère m'attrista. J'étais triste de ma tristesse des jours précédents.
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J'ai honte sur la plage du poids de leur sexe sous le jersey du maillot de bain. Les hommes en robe me rassurent, un prêtre qui surveille la baignade d'une colonie de vacances me ravit. Je touche, je comprime ce qui me faisait honte, ce que j'évitais de regarder. Je ne lui fais rien, il ne me fera rien et c'est dangereux. Je veux tout de suite une règle de vie, je veux devenir un mannequin de pureté. Me lever à six heures du matin, me coucher à huit heures du soir. Je ne peux pas l'abandonner. Je suis allée le chercher, je lui ai donné de l'appétit. Je ne peux pas le reléguer.
Je suis soulagée quand ils s'élancent vers la vague, quand ils entrent dans l'eau, quand ils me tournent le dos, quand ils font demi-tour dans l'eau et que je ne vois que leur buste, leur visage. Je lis avec tranquillité lorsque la vague les habille amplement.
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Il y a deux privilégiés et un malheureux quand on est trois.
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