Doté d’une libido hors du commun, Matt n’appréciait rien tant que la conquête – même si, le plus souvent, c’était le gibier qui effectuait les manœuvres d’approche. Et Dan n’avait pas aimé l’expression de son copain quand celui-ci avait aperçu la photographie dans le journal. Ce n’était pas exactement du désir qui s’était peint sur ses traits – en tout cas, pas le même genre de désir fasciné que celui qu’avait éprouvé Dan. Mais le visage de Matt avait trahi un besoin vieux comme le monde : celui qui poussait les hommes à prouver leur supériorité sur leurs semblables. Voitures puissantes, beaux appartements, carrières brillantes… autant de démonstrations de virilité. Or Dan n’avait aucune envie que les instincts ancestraux de Matt l’emportent sur leur amitié. Car, quand on en venait au sexe, Matt ne respectait plus aucune règle.
C’était un homme, Delilah en était convaincue, maintenant. Quelque chose dans l’écriture affirmée évoquait une main masculine. C’était le seul résultat auquel elles étaient arrivées après une demi-heure d’examen collectif. Delilah avait convoqué une cellule de crise dès qu’elle avait surmonté le choc que lui avait causé la découverte de cette carte, noyée parmi les factures et les prospectus qu’elle avait reçus ce jour-là à la boutique. Détail qui constituait leur premier indice, d’ailleurs : il s’agissait de toute évidence d’un individu qui ne la connaissait pas assez pour lui écrire chez elle.
Le célibat présentait d’incontestables avantages, et elle n’y renoncerait que pour un homme doté d’une véritable profondeur d’âme. Ou peut-être d’un stylo plume à pointe épaisse…