Vous ne pourrez pas dire que personne ne vous avait prévenu. Ce livre est un énorme pavé qui nécessite du temps et de la disponibilité.
Et pourquoi donc me direz vous ?
Ce n'est pas par le style qui est agréable.
Ce ne sont pas par les personnages que nous découvrons avec sympathie.
Ce ne sont pas les lieux qui bien qu'inhospitaliers, attirent notre curiosité.
Ce n'est pas l'histoire qui ne fait que refléter la vie d'un homme bien que son destin soit fort riche.
Ce ne sont pas les commentaires des chapitres avec des citations religieuses qui nous semblent parfois un peu obscures, mais il s'agit de la vie d'un pasteur alors pourquoi pas !
C'est la chronologie du récit qui m'a obligé à me poser et à effectuer des retours arrière.
De plus, les excuses ou les explications bibliques qui accompagnent les actes décrits m'ont énervées. L'époque me rend allergique à ces sentences allégoriques, quel connerie, mais quelle connerie !
On commence très très fort, nous sommes le 14 aout 1793, nous faisons connaissance avec la veuve, enfin pas pour très longtemps, car "Jésus Christ, notre seigneur, que ta grâce soit avec nous pour les siècles des siècles. Amen".
Commencer un livre par un prologue qui aurait pu s'insérer au cours de la narration. Opération réussie, nous sommes happés par le récit et on veut comprendre.
Des temps très marqués, l'apprentissage de la vie, le voyage initiatique et le récit du constat d'un certain échec. Pas très habituel comme plan car l'explication viendra petit à petit, et nous l'entrapercevrons au travers de rencontres de personnages secondaires qui bien mieux que le pasteur nous feront ressentir le décalage inéluctable entre la théorie de la foi et la réalité de la vie sous des latitudes soient disant inhospitalières.
Ballade glaçante dans une époque et un monde marqués par le colonialisme et ses dégâts collatéraux.
La dernière page du livre refermée j'ai très envie de parodier
Charles Trenet, et j'espère qu'il ne m'en voudra pas :
"Longtemps, longtemps, longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leurs livres courent encore dans les rues
La foule les lit un peu distraite
En ignorant le nom de l'auteur
Sans savoir pour qui battait son coeur
Parfois on change un mot, une phrase
Et quand on est à court d'idées
On fait la la la la la la
La la la la la lé"
On ne ressort pas indemne de cette promenade dans le fjord de l'éternité et quand on ferme les yeux, on ressent cette brume légère qui enveloppe cette vallée et on devine encore ces pierres tombales qui ont su conserver leurs secrets et leurs mystères.