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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« L'âge d'homme », une oeuvre autobiographique si l'on en croit l'ensemble de la critique ; certes, une oeuvre ou Michel Leiris parle de lui, exclusivement de lui. Autobiographique, donc … mais mieux que ça : une oeuvre autobiographique originale dans la mesure où, faisant fi de la chronologie, l'auteur se livre par thème.

Huit thèmes, et un ouvrage qui prend fin au moment où Michel Leiris prétend avoir atteint « l'âge d'homme » ; en fait, celui qui correspond, nous dit-il, à la naissance de sa vocation d'écrivain.

Publié en 1939, à la suite d'une expérience psychanalytique, « L'âge d'homme » en garde quelques scories ; un texte introspectif, parfois un peu jargonneux mais non dépourvu d'humour et d'autodérision écrit dans un style « classique » remarquable ; avec en filigrane ses personnages quasi-obsessionnels de Judith (la putain criminelle) et Lucrèce (la chaste suicidaire). Un texte brillant où Michel Leiris nous expose finalement la difficulté de s'accepter et de vivre avec soi-même.
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Ce livre qui interroge notre maturité — sous réserve que les hommes y parviennent – expose à une lecture grotesque. Après Augustin d'Hippone, Montaigne, Rousseau et quelques autres, Leiris annonce dans sa trop longue préface « De la littérature considérée comme une tauromachie » qu'il va produire une confession sincère, où il s'exposera comme le matador menacé par la corne qui n'a d'autre choix que de mourir ou de donner la mort. L'excès romanesque est doublé d'une obsession adolescente pour le nu académique que le jeune Leiris guette dans le Nouveau Larousse Illustré, dans les musées, puis dans une mauvaise reproduction de Cranach. Ce peintre prolifique représente toujours la même femme : déhanchement, torsion du cou, seins de fillette, demi-sourire ambigu, paupière lourde, oeil bridé et regard de dangereuse victime. Dans l'image qui obsède Leiris, Lucrèce et Judith dénudées portent un symbole phallique, le glaive, instrument du suicide de Lucrèce et de la décollation/castration d'Holopherne pour Judith. Cranach a peint les deux femmes à de multiples reprises ; Leiris s'et enflammé sur la mauvaise reproduction d'originaux perdus ; Gallimard « corrige » dans l'édition de poche par une image de Judith et sa servante richement vêtues. Enfant gâté puis jeune dandy, il rapporte par le menu ses flirts malheureux, ses cuites et ses virées au bordel, suivies de hontes qui l'entrainent au suicide ou à l'émasculation (mais il cherche le cyanure et le rasoir chez des amis qui vont le dissuader). Plus tard, voyageur en Afrique (il deviendra ethnologue), il ne rapporte à son lecteur que la crasse et l'image d'une femme dominante, excisée, doublée d'une esclave.

« Si je pense à l'amour absolu — cette conjonction, non de deux êtres (ou d'un être et du monde), mais bien plutôt de deux grands mots — il me semble qu'il ne saurait s'acquérir que moyennant une expiation, pareille à celle de Prométhée puni d'avoir volé le feu. Châtiment qu'on s'inflige afin d'avoir le droit de s'aimer trop soi-même, telle apparaît donc, en dernière analyse, la signification du suicide. Et si l'on considère maintenant Cléopâtre non plus seulement en tant que femme à la vie déréglée (en tant que femme bafouant ses amants) mais en qualité de créature se supprimant, l'on s'aperçoit qu'elle résume ces deux aspects de l'éternel féminin, ma Lucrèce et ma Judith, avers et revers d'une même médaille » (p 141). L'amour absolu, Prométhée, Cléopâtre, l'éternel féminin, ma Lucrèce, ma Judith : on n'y croit guère, ou, dans la position bienveillante du thérapeute, on s'agace de la verbosité.

Pourtant la panoplie surréaliste-analytique est surpassée par de grandes pages sur le rêve, la lassitude, la satiété, la convoitise, le sacré, qui méritent lecture, relecture et méditation (voir p 174-5), particulièrement le dernier chapitre, « Le Radeau de la Méduse », où Leiris acquiert la maturité de l'âge d'homme : « Je mesure mes actes et mes goûts à leur juste valeur, je ne me livre plus guère à ces burlesques incartades, mais tout se passe exactement comme si les constructions fallacieuses sur lesquelles je vivais avaient été sapées à la base sans que rien m'eût été donné qui puisse les remplacer. Il en résulte que j'agis, certes avec plus de sagacité, mais que le vide dans lequel je me meus en est d'autant plus accusé. Avec une amertume que je ne soupçonnais pas autrefois, j'en viens à m'apercevoir qu'il n'y aurait pour me sauver qu'une certaine ferveur mais que, décidément, ce monde manque d'une chose POUR QUOI JE SERAIS CAPABLE DE MOURIR » (p 200).
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J'étais un peu sur la défensive au moment d'ouvrir cette oeuvre autobiographique. Je crains, en effet, les romans trop psychanalytiques. Mais toutes mes réticences se sont dissipées dès les premières lignes du roman.
D'une part à cause de son originalité dans la structure formelle. Michel Leiris organise son récit selon plusieurs thématiques ce qui change des romans chronologiques. Ces thèmes sont principalement les mythes classiques, notamment ceux – je les découvrais au passage – de Judith et de Lucrèce. Je ne vais pas vous les présenter maintenant, lisez le roman, Michel Leiris prend le temps de nous éclairer sur ces modèles. Il est vrai que l'éducation bourgeoise de ce dernier est extrêmement prégnante, car il bénéficia d'une culture classique très riche, lui offrant ainsi la possibilité de se construire en tant qu'homme et d'élaborer une pensée cohérente et structurante à partir de ces références.
D'autre part à cause de son intégrité dans sa manière d'assumer son point de vue. Michel Leiris parle de lui, essentiellement de lui. Il ne s'appesantit donc pas, ni sur de quelconques descriptions de son environnement, ni sur les portraits de ses proches. Tout se concentre sur les réflexions de l'auteur, ses souvenirs intérieurs, ses rêves, ses phantasmes ou ses angoisses.
Michel Leiris n'hésite pas également à s'exposer en tant qu'écrivain. Les récits de ses souvenirs sont comme enchâssés dans un cadre plus large où l'auteur nous fait part de ses principes, de ses doutes et de ses hésitations. L'exigence formelle de cette oeuvre rend sa lecture passionnante, d'autant plus qu'elle se fait rare dans le tout venant de la littérature contemporaine.
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Ami de jeunesse. Leiris fabrique des vertiges avec presque rien: la découverte des règles du langage, l'écho infini du son des mots et de leur sens, les questions abyssales de l'enfance, la difficulté de vivre avec soi-même. On peut lui reprocher sa méticulosité , son jusqu'au-boutisme exacerbé et parfois agaçant. C'est quand même son regard lucide sur soi , les thèmes essentiels abordés: la sexualité, la mort, portés par son écriture classique et si personnelle, qui font de cet ouvrage un vade mecum pour ce roman d'apprentissage qu'est toute vie humaine.
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L'âge d'homme est un récit autobiographique axé très largement sur le rapport de l'auteur aux femmes, à la sexualité et plus généralement à la difficulté de vivre.

Remarquable est le soucis de franchise et d'authenticité, de marcher sur la corde raide de la confession en ne transigeant pas (cf de la littérature considérée comme une tauromachie) : Michel Leiris n'élude pas l'aveu de ces insuffisances, travers et autres actes manqués. Bien au contraire, il y trouve la justification de sa démarche.

La prose de Leiris est d'une précision peu commune, le style en est sûr et captivant, et le propos est servi par une bonne dose d'autodérision. Un bonheur de lecture anobli d'une érudition discrète.
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Il peut être compliqué d'entrer dans cette grande oeuvre autobiographique où Michel Leiris enchaîne les thématiques avec style tout en dévoilant le tréfonds de sa personnalité. La structure du livre révèle bien un maître de l'écriture peu approché aujourd'hui.
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Son livre a été écrit de 1935. Livre qui parle de lui-même avec le maximum de lucidité et de sincérité.
Il n'a pas souhaité que son livre soit dénué d'esthétique. C'est pourquoi dans son oeuvre il met à nu certaines obsessions d'ordre sentimental ou sexuel, qu'il confesse notamment après divers déboires remontant avant l'été 1929 (tentatives amoureuses régulièrement avortées ; ivresses scandaleuses).
Il a souhaité ici mentionner par sa volonté et nous livrer que des faits véridiques.

En lisant son oeuvre, je m'aperçois que la pudeur d'hier qui a fait à la sortie de son livre bien parlé de lui n'est plus celle d'aujourd'hui (les mots pornographiques sont plus utilisés et publiés).

Il pensait ainsi que son introspection lui permettrait d'être absous. Ces souvenirs d'enfance aux récits d'évènement réel, de rêves et d'impression éprouvée me font penser, par certains passages, à ceux de Marcel Pagnol notamment quand il raconte sa période d'enfance. Il a écrit ce livre, pour répondre à une psychanalyse laquelle il a fait appel.

Toute joie charnelle ne le touchait qu'accompagnée d'une terreur superstitieuse. Il lui était impossible de concevoir une vraie passion autrement que comme quelque chose qui engage pour la vie et la mort, et qui finit forcément mal…Cela vient en partie du fait qu'avec ses parents il allait apprécier des pièces de théâtre dont la finalité n'était pas celle qui finit par « et ils eurent beaucoup d'enfants ». Traumastisme, peur du sang, peur d'avoir mal, timidité, plongeons vertigineux dans un cafard, tel était ses démons. Il n'aimait pas se mêler aux autres et avec tant de blessures dans son enfance, tout était propice à refuser une vie normale et des sentiments normaux.

Ainsi entre mythologie et tableaux peints il s'accorde une importance prépondérante à son imaginaire à nous dévoiler sa vérité.

Livre très bien écrit qui fait plaisir à lire.
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C'est un curieux livre, d'une autre époque, d'un autre monde.
Michel Leiris est étonnant et L'âge d'homme est à son image, ou plutôt à l'image des mythes qui le hantent, qui le traverseront toute sa vie. Ce qui nous touche c'est la sensibilité avec laquelle il décrit des impressions pourtant fugaces de son enfance. On est au coeur de sa psyché, et il nous y emmène sans fausse pudeur, sans détours. Ni roman, ni essai, c'est une confession littéraire, un voyage plein de sincérité, qui nous bouleverse comme seule la vérité peut le faire.
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Trop de sciences, autrement c'est excellent. L'on y suit le bizarre personnage de Leiris, qui nous devient passionnant.
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