Pierre Lemaître est un formidable conteur, comme certains, je me disais qu'il pourrait écrire l'annuaire téléphonique et que ça fonctionnerait toujours.
Ben non… Autant où sa trilogie précédente, sur l'entre deux guerres, m'avait emporté très loin, autant le premier tome de cette nouvelle trilogie, consacrée à l'après Seconde Guerre Mondiale, m'a fait l'effet de montagnes russes.
Après des ascensions qui m'emportaient dans un plaisir livresque, je subissais des descentes où le plaisir de lecture n'y était plus.
Durant certains passages, j'en suis même venue à penser aux courses à faire, au ménage qu'il me restait et à l'unique t-shirt qui je n'avais pas repassé, prête à tout lâcher pour aller le faire, alors qu'il faisait encore lourd dehors et que je déteste repasser.
Oui, c'est vous dire que durant ma lecture, toutes les émotions y sont passées : du plaisir à l'ennui. Pourtant,
Pierre Lemaître, je connais, j'avais déjà vécu quelques expériences livresques avec lui, ne connaissant que le plaisir pur et dur. Qu'est-ce qui se passait, alors ? Aurait-il oublié quelques chose ou n'étais-je pas dans mon état normal ?
Le début du roman avant bien commencé, j'avais fait connaissance de la famille Pelletier, français expatriés à Beyrouth, les parents propriétaires d'une savonnerie, possédant 4 enfants, tous différents les uns des autres.
Si j'ai accroché assez vite avec Etienne, le plus sensible, si j'ai aimé le François, futur journaliste, j'ai un peu bugué avec les autres, sauf avec Joseph, qui n'a pas de dialogues puisque c'est un chat.
Mince alors, où étaient les portraits flamboyants de la précédente trilogie ? Les femmes m'ont semblé stéréotypées, caricaturales (bon, nous sommes dans les années 50, d'accord, mais tout de même), la matriarche me semblant juste un poil moins chiante et insipide que sa belle-fille (qui est à assassiner, elle). La mère s'est bien rattrapée sur la fin, je l'ai approuvée à cent pour cent…
Quant à leurs histoires, leur vie, si une partie m'a conquise, notamment en Indochine, avec les trafics d'argent, ou en France, avec notre journaliste en herbe, le reste m'a paru sans saveur.
Pire, à un moment donné, ce qu'il se passait en Indochine à commencer par ne plus avoir de goût… C'est terrible quand même d'éprouver de tels sentiments, avec un roman de monsieur
Lemaître.
Ma lecture est devenue longue, à un moment donné, comme si le tout manquait de cohésion, particulièrement avec un des personnages de la fratrie, assassin à ses heures perdues.
Malgré tout, ma découverte ne fut pas si laborieuse que ça, j'ai tout de mis pris du plaisir avec une bonne moitié du roman (on se console comme on peut), j'ai appris des choses (j'adore quand il nous cause de magouilles) et eu un grand éclat de rire lorsque j'ai croisé un des personnages de "
Au revoir là-haut", ainsi qu'un du "
Miroir de nos peines" et cela m'a fait plaisir.
Le côté historique est très bien rendu, sans pour autant en devenir indigeste.
Lemaître nous plonge dans le Paris d'après-guerre, avec ses restrictions alimentaires, ses pénuries, ses grèves, ses flics qui tabassent…
Idem pour Saïgon, en Indochine, avec le conflit, les Viêt-minh, la ville, la moiteur du climat. Les atmosphères étaient parfaitement bien rendues et j'ai voyagé, grâce à cette lecture. Au sens propre comme au figuré, avec ce voyage dans le temps et l'Histoire peu glorieuse, bien entendu. Les placards sont remplis de squelettes à déterrer.
Hélas, j'ai un peu foiré ma lecture. Malgré tout, j'ai bien envie d'être au rendez-vous suivant afin de poursuivre ma visite des Trente Glorieuses et de connaître le cheminement de la famille Pelletier. Et puis, je pourrais trouver du plaisir dans les suivants… Qui sait ?
PS :
Pierre Lemaître a dû avoir peur de se retrouver sur ma kill-list car il n'arrive rien de grave à Joseph, le chat. Ou alors, l'auteur n'a rien contre les chats… Et c'est tant mieux.
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