Il ne m'a manqué que d'être aimé pour être bon !
Il avait peur de la perdre, après l'avoir si étrangement retrouvée. Il ne sentait plus de haine contre elle. Il ne doutait même plus qu'elle dût "n'avoir rien à se reprocher", si bizarre et inexplicable qu'apparût sa conduite. Il était prêt à toutes les mansuétudes, à tous les pardons, à toutes les lâchetés. Il aimait.
Le fantôme de l’Opéra a existé. Ce ne fut point, comme on l’a cru longtemps, une inspiration d’artistes, une superstition de directeurs, la création falote des cervelles excitées de ces demoiselles du corps de ballet, de leurs mères, des ouvreuses, des employés du vestiaire et de la concierge.
Oui, il a existé, en chair et en os, bien qu’il se donnât toutes les apparences d’un vrai fantôme, c’est-à-dire d’une ombre
Car non seulement nous la voyions, l'eau, mais encore nous l'entendions! ... Nous l'entendions couler... clapoter! ... comprenez-vous ce mot "clapoter"? C'est un mot que l'on entend avec la langue! ... la langue se tire hors de la bouche pour mieux l'écouter!
Il y a une vertu dans la musique qui fait que rien n'existe plus du monde extérieur en dehors de ces sons qui viennent frapper le coeur.
Où finit le réel, où commence le fantastique?
Raoul vit alors son visage et ne put retenir une exclamation de surprise et d'effroi. Les fraîches couleurs d'autrefois avaient disparu. Une pâleur mortelle s'étendait sur ces traits qu'il avait connus si charmants et si doux, reflets de la grâce paisible et de la conscience sans combat. Comme ils étaient tourmentés maintenant! Le sillon de la douleur avait impitoyablement creusés et les beaux yeux clairs de Christine, autrefois limpides comme les lacs qui servaient d'yeux à la petite Lotte, apparaissaient ce soir d'une profondeur obscure, mystérieuse et insondable, et tout cernés d'une ombre effroyablement triste.
Pourquoi tenter d'entrer dans ma demeure ! Je ne t'ai pas invité. Je ne veux ni de toi, ni de personne au monde ! Ne m'as-tu sauvé la vie que pour me la rendre insupportable ? Si grand que soit le service rendu, Erik finira peut-être par l'oublier et tu sais que rien ne peut retenir Erik, pas même Erik lui-même.
Je criai. Ma voix seule emplissait les murs, car le chant et les violons s'étaient tus. Et voilà que soudain, dans le noir, une main se posait sur la mienne... ou plutôt quelque chose d'osseux et de glacé qui m'emprisonna le poignet et ne me lâcha plus. Je criai. Un bras m'emprisonna la taille et je fus soulevée... Je me débattis un instant dans de l'horreur; mes doigts glissèrent au long des pierres humides, où ils ne s'accrochèrent point. Et puis, je ne remuai plus, j'ai cru que j'allais mourir d'épouvante. On m'emportait vers la petite lueur rouge; nous entrâmes dans cette lueur et alors je vis que j'étais entre les mains d'un homme enveloppé d'un grand manteau noir et qui avait un masque qui lui cachait tout le visage... Je tentai un effort suprême: mes membres se raidirent, ma bouche s'ouvrit encore pour hurler mon effroi, mais une main la ferma, une main que je sentis sur mes lèvres, sur ma chair... et qui sentait la mort! Je m'évanouis.
Je revoyais le cahier aux notes rouges et j'imaginais facilement que cette musique avait été écrite avec du sang. Elle me promenait dans tout le détail du martyre ; elle me faisait entrer dans tous les coins de l'abîme, l'abîme habité par "l'homme laid" ; elle me montrait Erik heurtant atrocement sa pauvre hideuse tête aux parois funèbres de cet enfer, et y fuyant, pour ne les point épouvanter, les regards des hommes.