Il étale la crème. Je ressens un picotement et suis surprise par la chaleur qui envahit ma peau. Raffaele passe un peigne en ivoire dans mes cheveux. Parfois, ses doigts effleurent ma nuque et des frissons de plaisir descendent dans le creux de mon dos. Ses gestes précis trahissent son talent de consort. J'ai une vague idée de ce qu'éprouvent ses clients quand ils sentent sa peau contre la leur, ses lèvres sur leur cou, ses mains douces et expérimentées sur leurs corps.
Raffaele hausse un sourcil.
-Ce que tu es en train d'imaginer te coûtera cinq mille d'or, "mi" Adelinetta, se moque-t-il gentiment.
Il incline la tête sur le coté et je sens mes joues s'empourprer.
"Cinq mille talents d'or ?"
-Pour une nuit ? demandai-je dans un souffle.
-Pour une heure, corrige Raffaele en continuant à me peigner.
Cinq mille talents d'or en "une heure". En une nuit, Raffaele peut gagner ce que mon père gagnait en un an.
-Je suppose que, grâce à toi, la "Cour de Fortunata" est la plus prospère du pays.
Si tu me chasses des Dagues, je formerai ma propre bande. J'en ai assez de perdre. J'en ai assez d'être manipulée, blessée et abandonnée.
C'est mon tour de jouer les marionnettistes. C'est mon tour de faire du mal.
Mon tour.
- Tu fais une grave erreur, dis-je.
J'ai parlé d'une voix plate et glacée. La voix d'une personne nouvelle.
- Tu fais une grave erreur en ne me tuant pas maintenant.
- Non, dit Raffaele. Je ne crois pas.
Il se lève et sa main quitte la mienne. Il se dirige vers la porte de son pas gracieux. Il s'arrête soudain.
- Adelina, dit-il en se tournant vers moi. (J'ai l'impression que ses yeux vont me briser). Je l'aimais, moi aussi.
Il sort et je me retrouve seule. Toute seule.
À quoi bon croire en ce que vous voyez, si vous ne voyez que ce que vous voulez croire.
La destruction est un choix.
Le roi est aussi stupide qu'une chien, dit-il. Et les chiens ne font pas de bons roi.
Aimer, c'est avoir peur. On est terrifié, terrorisé, à l'idée que quelque chose puisse arriver aux êtres chers. Songez-y. Est-ce que votre cœur se serre à chaque pensée ? Si c'est le cas, mon ami, vous êtes amoureux. L'amour nous transforme en esclaves, car ils est indissociable de la peur.
Personne n'a envie d'être soi-même. Chacun veut incarner sa propre image de l'être idéal.
Une action insignifiante peut avoir des répercussions à l'autre bout du monde. En un sens, tu es déjà liée à chacun d'entre nous.
- La Peur donne le pouvoir, dit-elle.
Un nouveau-né respire pour la première fois et crée une tempête au court de laquelle la mort s'abat