Elle n'expose pas seulement une oeuvre elle expose un homme qui a fait une oeuvre.
La littérature, la philosophie, ce sont des traces trop explicites de l'éternel recommencement. Lire, c'est s'apercevoir que tout a déjà été dit.
Ils sont assommés par cet échange qui les ramène à ce qu'ils sont : des indociles. Des marcheurs de côté. Des êtres qui échappent à la définition. Ils ne se sont jamais pliés à une seule loi, une seule façon d'aller au monde. Ils sont conventionnels, puis ne le sont plus. Réactionnaires puis profondément ancrés dans leur époque. Ils ne pensent pas en ''école'' en ''tendance'' en 'famille''. Ils ne veulent entraîner personne derrière eux, ni créer des courants qui seraient des courants d'air. Si on les suit, c'est une fête, dont on sait qu'elle finira tout à l'heure. Ils dansent sur les fils de leurs émotions, et de leur intelligence, passant de l'un à l'autre quand on les attend ailleurs. Il s'enthousiasment et s'indignent sans que l'on puisse savoir vraiment quand ni pourquoi, car ils n'en font pas une spécialité. Les indociles n'ont pas d'âge, ni de classe sociale. Ils sont instruits ou ne le sont pas, et dans ce dernier cas, ils sont ébaubis quand ils découvrent au détour d'un texte, d'un article de presse, que d'autres ont si bien exprimé ces choses qu'ils se sentaient seuls à penser. Leurs succès ou leurs échecs ne sont que les rebondissements d'une vie qui s'écrit chaque jour. Les tiroirs dans lesquels on voudrait les ranger ne ferment pas. Les indociles débordent. Calmement réfractaires. Rarement militants. Souvent discrets. Ils font dans l'ombre ou la lumière un chemin qui échappe à ceux qui ont besoin de repères. Leurs choix ne sont jamais dictés par la morale. Parfois par la gentillesse. Parfois par l'égoïsme ou l'orgueil. Mais jamais par la doxa qui n'a aucune prise sur eux. Ou de façon passagère. Comme un égarement.
Il se sentait libre avec Emmanuelle, sa vie de famille, ses enfants. Il se sentait libre et un papillon de nuit est venu exécuter une danse ensorceleuse sous ses fenêtres. Il l’a suivi, et désormais, aux côtés de cette femme sans entraves, sans responsabilité familiale, sans certitude, il se sent prisonnier, mais traversé par une intensité de vie qu’il avait oubliée. La Prisonnière ne lui est jamais autant apparue comme un portrait prophétique de lui-même, et il éprouve à la fois une blessure et un émerveillement.
Rien n'est loin. Rien n'est vraiment incontournable. Tout, ou presque, est à portée.
Quelqu'un était là et quelqu'un n'est plus là. Quelquefois cela arrive en douceur. Un lent éloignement et l'être cher, un jour, nous apparaît comme un petit point au lointain d'une route, on le regrette sans le distinguer clairement. On se résout à cette mort lente du lien. Quelquefois, c'est brutal.
Pragmatique, la galeriste répond qu'organiser une exposition, ça n'est pas seulement suspendre des tableaux contre un mur, le sait-il ? Cela se pense, se rêve, se conçoit. C'est une mise en scène, une stratégie, un soupçon de bluff, du savoir-faire.
Olympe n'appartient à personne, et si l'on y pense elle n'a pas d'addiction si ce n'est celle qui fait sa gloire : l'art.
Olympe n'a pas grandi. Elle est née grande.
C'est sa mère qui ne l'était pas.
"Ce n'est pas une romance", pense Olympe. On ne voit rien d'elle que ses mains, et pourtant on a la sensation de son emprise sur lui. Pas de l'amour ; du pouvoir.