PLUIE DE MAI
Comme de fraîches étincelles en buée,
La pluie, avec un bruit frileux et fin de soie.
Sur les fleurs du matin tombe d'une nuée
Que le soleil de ses fluides roses noie.
L'astre brille à travers l'averse épanouie.
Et le jardin de printemps et de vie
Boit ensemble les feux et l'onde et les confond,
Tant la pluie est rayon,
Tant les rayons sont pluie.
Et l'on voit dans les airs, qui de chatoiements sont grisés,
La pluie et le soleil s'inonder de baisers.
Au mois de mai, l'orale même est un baiser.
LE PRINTEMPS BLESSÉ
Oh ! bien que jeune encore, j'ai vécu trop de jours
Pour qu'au fond de ce soir où gémit un amour
Naissant dans le premier lilas qui vient de naître,
Son appel si touchant ne ravive en mon être,
Comme un essaim connu, tant d'anciennes saisons !
Tandis que dans les eaux, dans l'air et le gazon.
Les instincts fécondants tressaillent, s'émerveillent,
Je sens, tels que des dards tombés d'un vol d'abeilles.
Des printemps morts blesser ce printemps qui s'éveille.
Et c'est si doux et douloureux, ce dard profond
Entrant en nous, chargé de sucs, de miel vermeil,
De miel qu'au vif de la piqûre nous sentons.
Comme si nous mordaient, avec des bouches de soleil,
Nos fleurs des anciennes saisons !