Les beaux jours reviennent et avec eux les lectures de grandes sagas et de romans historiques. Ayant un faible pour l'Espagne médiévale, les romances de la frontière andalouse, les imaginaires hispano-mauresque et judéo-espagnol, rien de m'enchante plus que les histoires d'amour contrariées, les prisonnières chrétiennes qui soupirent dans les jardins de l'Alhambra, les Mozarabes à l'honneur pointilleux et les conversos chevaleresques. L'histoire et l'Inquisition sabotent les amourettes depuis des siècles dans les romans pour notre plus grand plaisir, et je me réjouissais par avance de lire cette épopée judéo-conversa. La calle de la juderia de Toti Martinez de Lezea, nous emmène dans le quartier juif de Vitoria-Gasteiz au XVème siècle. Grande saga de plus d'un siècle, elle met en scène la famille Sahadia, dont l'un des fils, Yehuda, choisit de se convertir au catholicisme et devient Fray Anselmo, alors que son frère David, qui est médecin, reste fidèle à la foi de ses ancêtres. Nous suivons ainsi la destinée de tous les Sahadia, de ceux qui ont choisi le baptême à ceux qui pratiquent le judaïsme, conscients de la menace qui pèse sur les non-chrétiens, et ce jusqu'à l'expulsion des juifs et des musulmans d'Espagne. Hélas, un siècle, c'est long, et on se perd souvent dans les liens de parenté et les différents patronymes, qui changent lors des conversions. Difficile également d'éprouver de l'empathie pour de si nombreux personnages. La description de la ville de Vitoria, ainsi que le contexte historique et politique de l'époque sont une réussite, on sent que Toti Martinez de Lezea, romancière prolifique spécialisée dans le genre, s'est appuyée sur une solide documentation. Refusant tout manichéisme, elle représente bien les trois religions et la cohabitation des communautés dans le nord du royaume, région souvent délaissée dans les romans au profit d'Al-Andalus par exemple. C'est la première fois pour ma part que je trouve des mots en basque, en hébreu et en arabe dans un même roman.
Malgré ces qualités rédactionnelles, la lecture de la calle de la juderia s'est révélée plutôt laborieuse, peut-être manquait-il une pincée de passion et un peu de soleil pour me perdre dans ses ruelles.
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