L'île panorama

Ma lecture de "l'île panorama", le roman d'Edogawa Ranpo, remonte à un paquet d'années. Si je ne me souvenais pas de tous les détails, l'ambiance étrange et la perversité raffinée de l'oeuvre m'avaient séduite et durablement marquée. Ces éléments se retrouvent complètement dans l'adaptation dessinée de Suehiro Maruo.

L'auteur retranscrit à merveille les idées folles d'Edogawa Ranpo. L'île créée par le héros prend totalement vie ici, alors même que j'avais parfois eu du mal à m'en faire une représentation mentale lors de ma lecture du roman. Les paysages dessinés par Suehiro Maruo sont de toute beauté, l'auteur proposant des cases d'une profondeur de champ saisissante et des dessins extrêmement détaillés. La finesse et la précision de l'illustrateur sont bluffantes. Chaque feuille, chaque brin d'herbe est croqué par le dessinateur qui créé ainsi de véritables tableaux. C'est un véritable Eden décadent qui apparait aux yeux du lecteur, émerveillé et troublé par l'étrangeté à la fois sublime et angoissante qui s'en dégage.

Le scénario est fidèle à l'esprit du roman et happe le lecteur dans cette histoire dérangeante. On peut toutefois regretter la rapidité du dénouement, un peu expédié.

Ce manga superbe est enivrant et invite à la contemplation. J'avoue que je ne connaissais pas Suehiro Maruo et j'apprends qu'il est le maître de l'éro-guro, genre que je ne connais pas non plus. Voilà qui promet d'autres lectures poétiquement macabres.

Challenge B.D 2017 - 4

Il y a une quinzaine d'années, Suehiro Maruo a entrepris d'adapter le roman du grand Edogawa Ranpo, l'Île Panorama. le mangaka, maître de l‘ero-guro (érotique grotesque), est ici moins trash que dans ses oeuvres antérieures, qui en guise d'érotisme allient souvent la pornographie et le gore, dans de courtes histoires sans queue ni tête (ou avec les deux, comme on voudra !).

Ici, le scénario est construit, même si l'histoire est simple finalement : Hirosuke Hitomi est un écrivain laborieux, qui vit au début de l'ère Shôwa (à la veille de la première guerre mondale). Admirateur d'Edgar Allan Poe, il est en panne d'inspiration, a bien du mal à payer son loyer, et son éditeur s'inquiète. Il lui apprend que Genzaburô Komoda, un riche homme d'affaires, est décédé prématurément d'une crise d'asthme, à 38 ans. Hirosuke et lui était allés à l'école ensemble, et se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, on aurait dit des jumeaux ! Hirosuke a l'idée soudaine de se rendre à la préfecture de Mie, berceau de la famille de Komoda, pour usurper l'identité du mort : il y déterre le cadavre, lui prend sa bague d'époux, et, dans une scène douloureuse et sanglante, s'arrache une incisive pour la remplacer par la fausse dent de Komoda…

Dès lors, sa machination se met en marche, il s'arrange pour qu'on le trouve comme mort sur un chemin, mais ressuscité. L'incrédulité et la méfiance de quelques-uns est vite remplacée par la joie des « retrouvailles », notamment avec Chiyoko, la belle épouse. Mais elle doute, il le sent…En attendant, il va mobiliser à son service tout le réseau d'entrepreneurs de Komoda pour satisfaire la réalisation d'un projet de parc d'attraction en bord de mer, qui va s'avérer complètement mégalo.

Le parc devenu une île enchantée est un rêve éveillé aux yeux de Chiyoko, hypnotisée mais toujours inquiète, lorsque son époux lui fait visiter ces lieux où l'enchantement n'a pas de fin. Dans ce kaléidoscope, nous sommes chez les dieux grecs, dans les plus beaux palais et pièces d'eaux, en des jardins merveilleux qui se succèdent à perte de vue, entourés de statues érotiques, lascives, d'éphèbes et autres vénus langoureuses. Mais est-on dans un univers réel, dans un rêve, dans une perspective dimensionnelle tronquée ? Cette visite s'avère être une lente descente vers l'enfer pour Chiyoko, qui a compris depuis longtemps le piège…L'univers devient de plus en plus fou, des visions à la Jérôme Bosch surgissent bientôt, où les amis de Komoda enfourchent des passereaux géants, où cela fornique dans l'allégresse…Le faux Komoda devenu criminel va néanmoins tomber sur un os, une bien mauvaise surprise de type arroseur arrosé, qui va le forcer à expier ses fautes…

Bienvenue dans un univers luxuriant, baroque et coloré ! Malgré les plages en noir et blanc, Maruo nous livre dans le dernier tiers de l'ouvrage une série de 120 pages d'une esthétique flamboyante, à l'imagination débridée. L'érotisme est là, mais c'est beau, ce n'est pas grossier, c'est magistral, et c'est le clou de ce scénario intéressant.

Bref, c'est un bon opus de Maruo, idéal pour découvrir l'oeuvre immense de Ranpo si l'on a envie de s'alléger la lecture, entre deux romans plus roboratifs.

Ce manga grand format est l'adaptation d'un roman policier japonais de Ranpo Edogawa, lui-même admirateur de l'oeuvre d'Edgar Poe au point que son nom d'auteur en est une transcription phonétique.

Cette adaptation du mangaka Suehiro Maruo en est tellement fascinante que je ne sais plus si je dois lire le titre éponyme tant les images mettent parfaitement en scène l'atmosphère hypnotique.

Ce n'est pas tant la dimension policière qui saisit mais la tension fantasmagorique sur laquelle plane une ombre gothique et un goût de mort. Cette vision d'un l'esprit tourmenté est " fabuleuse ", cette aspiration à la création jusqu'à la profanation. Dès la première partie qui présente la mise en place du récit par le pourquoi et comment de l'usurpation d'identité et de la création de cette île panorama, malgré le réalisme, le trouble s'installe, la sensation d'étrangeté et de malaise s'insinue, déjà entre sensualité et morbidité.

En seconde partie, la visite de cette île relève de l'hallucination, d'un fantasme bien plus qu'érotique, une extravagance à ce point luxuriante qu'elle en est dérangeante, une débauche, oui. Un ensorcellement, la perversité d'une beauté obsédante et effrayante.

Le trait de Suehiro Maruo peut paraître classique. Pourtant, ce graphisme minutieux et fouillé - qui ne souffre pas de l'absence de couleur, au contraire - rend d'autant plus présent à la fois le contexte japonais que celui de cet univers d'illusions, de transgressions, entre rêve et cauchemar, " la folie de ce carnaval exceptionnel " ( R.Edogawa )


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Une adaptation qui aurait mérité de s'étendre, au moins, sur deux fois plus de pages, car le travail en terme d'illustration est très réussi mais la progression de l'histoire trop rapide, notamment pour toute la partie où le héros fait construire l'Ile paradisiaque. Ile magnifiquement décrite, grâce à un dessin mélangeant références à l'art déco et aux estampes japonaises érotiques. Tout y est à la fois parfait et factice: les jeunes filles, les hommes, les personnages grotesques qui y habitent, sélectionnés pour leur beauté ou leurs particularités physiques, passent le plus clair de leur temps à s'adonner aux plaisirs de la chair. Les paysages, conçus grâce à des effets optiques, semblent totalement démesurés. Mais l'effet que ce paradis produit est étrange: on est à la fois fascinés et on s'interroge sur ses limites. le héros, qui l'a conçu, a du commettre des actes irréparables pour arriver à ce summum du Beau: meurtre, automutilation dans le but d'usurper l'identité d'un mort, dilapidation de l'argent d'une famille. Une fois son objectif atteint, il se laissera totalement consumer par l'ivresse du lieu, jusqu'au dénouement brutal de l'histoire.

" L' ile panorama" est à l'origine un roman de EDOGAWA Ranpo, auteur fortement influencé par Edgard Allan Poe, qui touche souvent au macabre et au fantastique dans ses écrits . C'est le sulfureux Maruo qui adapte aujourd'hui ce récit en version dessinée. Ce dessinateur est un maitre de l'éro-guro, mouvement érotique grotesque, dont Edogawa est un des chefs de file. Maruo s'inscrit dans un courant undergound et ses dessins mélangent érotique, fantastique, déviance sexuelle,...
Aussi, on ne s'étonnera pas de voir ici réunis ces 2 auteurs.

Hirosuke est un écrivain raté. Il est fasciné par Edgar Allan Poe et notamment sa nouvelle : le domaine d'Arnheim ". A l'image du roman, il rêve de créer un paradis terrestre, lieu de perfection absolue.
Un espoir vain jusqu'au jour où il apprend la mort d'un ancien camarade de classe très fortuné, Komoda, avec qui il a une ressemblance frappante.
Hirosuke met alors en place un plan afin d'usurper l'identité du mort. Jouant à l'humain enterré vivant, qui arrive à ressortir de sa sépulture, Hirosuke se débarrasse du corps de Komoda et prend sa place auprès de sa femme. Désormais à la tête de la fortune familiale, plus rien ne s'oppose à la réalisation de son rêve : la création d'un paradis d'un terre.

Voilà l'histoire d'un homme idéaliste qui, par amour de la perfection et de la beauté, va sacrifier ses valeurs morales et plonger dans l'inhumanité. Hirosuke n'hésitera pas à transgresser l'ordre moral (profanation de sépulture, assassinat, usurpation d'identité) pour mieux parvenir à ses fins.
Le paradis, créé sur une ile, est une nature belle et parfaite mais fausse et artificielle, qui cache des mécanismes techniques en son sein. ( On pensera bien sûr aux paradis artificiels de Baudelaire, célèbre traducteur de Poe !)
Bref, une nature qui n'a plus rien de naturelle, à l'image de son créateur. L'ile est une pure illusion où les sirènes, les éphèbes et ses autres habitants sont de simples acteurs rémunérés qui profitent de ce faux paradis pour laisser libre cours à leurs instincts primaires.

" Ce monde n'est qu'une illusion, seuls les rêves de la nuit sont vérité. " .

Maruo a repris ici de façon linéaire le roman de son compatriote. Nous suivons Hirosuke dans sa déchéance morale : l'usurpation d'identité, la construction du paradis artificiel, sa présentation à la femme de Komoda, ses soupçons, qui entraineront une ultime déchéance de la part de Hirosuke.
Le récit devient peu à peu trouble et oppressant et tombe avec subtilité dans la folie du personnage.
Le summum de l'histoire étant la fameuse révélation de cette ile à sa femme (et par la même occasion au lecteur). Maruo y révèle tout son art par la diversité des décors et le souci du détail. Chaque lieu découvert est propice à de nouvelles merveilles.
Le manga dévoilera aussi sur la fin une touche érotique par l'intermédiaire de scènes de sexe très explicites mais qui reste néanmois très "soft", comparé à ce à quoi l'auteur nous avait habitué dans ses oeuvres précédentes (tout est relatif !). On est un maitre de l'éro guro ou on ne l'est pas !

Maruo réussit donc avec succès cette adaptation, tout en y intégrant ses propres éléments personnels. On y retrouve l'ambiance malsaine des 2 auteurs, sublimée par un dessin tout en finesse et en richesse.
On regrettera juste la chute un peu abrupte et quelque peu obscure qui laisse le lecteur libre d'interpréter la fin de l'histoire.

" L'ile panorama " est donc un manga atypique, pas forcément destiné au grand public, et qui plaira aux amateurs du genre...
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Hirosuké Hitomi est écrivain. Il a peu de succès et a pour rêve de créer une île étrange et paradisiaque. Lorsqu'il apprend que Komoda, riche homme d'affaires et ami d'enfance, est décédé, il a une idée plutôt machiavélique. En effet, les deux hommes se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Il décide donc de se faire passer pour mort et de déterrer le cadavre de son ancien ami pour se faire passer pour lui. Pour son plus grand bonheur, tout se passe exactement comme il l'a prévu et son projet voit le jour : l'île est un pur chef d'oeuvre, un vrai Paradis sur Terre.

J'ai été fascinée par cette histoire!

Les graphismes de Suehiro Maruo sont magnifiques, riches et raffinés, très détaillés et chaque tableau nous plonge sans difficulté dans cet univers étrange et déroutant. le lecteur est à la fois ébloui et mal à l'aise devant ce spectacle merveilleux et décadent, où l'on sent poindre la déchéance et la folie d'un esprit torturé.

Initialement, "l'île panorama" est un roman de Ranpo Edogawa, auteur fortement inspiré par Edgar Allan Poe, dont les écrits sont imprégnés de fantastique. Ranpo Edogawa est le chef de fil du mouvement égo-uro, érotique grotesque et Suehiro Maruo, le dessinateur, un des maîtres du mouvement. le lecteur ne devra donc pas être étonné de découvrir quelques scènes érotiques assez détaillées!

Cette lecture est une découverte totale pour moi car je ne connaissais ni l'auteur, ni le dessinateur, ni le mouvement et j'en ressors enchantée!

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L'adaptation en manga du roman de Ranpo Edogawa par le maître de l'ero guro, mélange d'érotisme et d'horreur. La première force du manga, c'est son dessin soigné à chaque case et d'une grande finesse.
Il y a aussi cette histoire qui tient en haleine car c'est une imposture formidable alliée à la réalisation d'un rêve d'enfant.
Hitomi est un écrivain qui ne rencontre pas le succès escompté. Comme chacun le sait, le malheur des uns fait le bonheur des autres : le décès subit d'un ancien compagnon de classe, richissime et qui présente la particularité de posséder une ressemblance frappante avec Hitomi, est l'occasion qui fait le larron. Hitomi se fait passer pour lui et engage la fortune familiale pour commencer un projet personnel : l'île Panorama, sorte de nouvel Eden dédié aux plaisirs. Bientôt, les soupçons pèsent sur Hitomi qui est cependant bien décidé à aller au bout de son rêve. Une lecture aussi poétique qu'inquiétante dans laquelle on passe des visions les plus sordides aux plus angéliques.

"L'Île Panorama," une adaptation manga du roman d'Edogawa Ranpo par le talentueux Maruo, plonge dans l'éro-guro, mêlant l'érotique, le fantastique et la déviance. Hirosuke, écrivain raté, embrasse l'inhumanité en usurpant l'identité de son ami défunt, sacrifiant ses valeurs pour créer un paradis artificiel.

Maruo est probablement l'auteur parfait pour cet exercice de haute voltige, d'autres s'y serait cassé les ailes.

La chute pourrait s'avérer fatale.

L'ILE PANORAMA, Adaptation du roman de Ranpo Edogawa par Suehiro Maruo

Ayant déjà lu le roman de Ranpo Edogawa je voulais découvrir une adaptation graphique car l'histoire très visuelle.

« Pour réaliser un rêve fabuleux, un étudiant, passionné par les oeuvres d'Edgar Poe, entreprend la construction d'une île idéale conforme à son imagination : usurpation d'identité, assassinat, délires mentaux, mystifications et mises en scène fantastiques nous entraînent dans un monde étrange et merveilleux, un paradis sur terre qui pourrait bien s'appeler aussi l'enfer. »

Les planches sont superbes et font honneur au récit, personnellement j'avais imaginé les choses un tout petit peu plus sombres. Ma scène préférée est celle dans le tunnel de vitre sous la mer…! J'ai bien aimé que certains éléments (souvent florales) sortent des cases.
Il a quelques scène érotiques et explicites
J'ai eu l'impression que finalement, après réflexions, Suehiro Maruo ou/et Ranpo Edogawa se sont (peut-être) inspirés des oeuvres de Bosch ( le Jardin des Délices)
bref la fin me semble un peu expédiée mais malgré cela je suis très satisfait de ma lecture !!!
Maintenant il faut que je me procure ce mangaaa

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N'ayant malheureusement pas lu Edogawa Ranpo, je ne pourrais donc pas comparer avec l'oeuvre originale pour le moment (même si je compte y remédier rapidement !). 😌
Le scénario a tellement été repris depuis qu'il vous paraitra peut-être familier : un jeune homme sans le sou usurpe l'identité d'un ancien camarade mort prématurément. Ce camarade avait le bon gout de beaucoup lui ressembler, d'être extrêmement riche et d'avoir une magnifique épouse. 😏
Étonnement, le stratagème fonctionne plutôt bien ! Et notre jeune utopiste entreprend donc de réaliser le rêve de sa vie, construire une île paradisiaque dédiée à tous les plaisirs. Mais le bonheur peut-il vraiment durer ? 🖤
Le dessin de Maruo nous permet de contempler cette île parfaitement fabuleuse, fantastique fantasme de son créateur en mettant en image les descriptions de Ranpo. Cette île semble pouvoir exister, tant de technologies et de richesses ont été déployées pour y parvenir ! 💛
Et pourtant, cela semble être un rêve étrange, tout cela est définitivement trop beau...