Dieu dans le désert, c'est l'eau et l'ombre.
Il n'y a que la mer. La mer qui devait apporter le salut et qui n'est plus qu'un cercle de feu mouillé. Un cœur noir.
Ça lui est égal de laisser son passé derrière lui. C'est un enfant, il est trop petit pour avoir conscience du temps qui passe. tout tient au creux d'une main, ce qu'il connaît comme ce qui l'attend.
S'il n'y avait pas eu cet or noir sous le désert aucun dictateur n'aurait eu envie d'imposer sa loi, et aucun étranger ne serait venu les défendre en lançant des missiles Cruise.
Mais ici-bas personne n'est un saint. Et le monde ne devrait pas avoir besoin de martyrs, seulement d'une plus grande égalité.
Il y a quelque chose qui n'appartient qu'au lieu où l'on est né. Tout le monde ne le sait pas. Il n'y a que ceux qui en sont arrachés de force qui le savent.
Un cordon enfoui dans le sable.
Une douleur qui te cloue et te fait haïr les pas que tu feras ensuite.
Ce n'est qu'à ce moment que Vito comprit ce que voulait dire Antonio, son grand-père, quand il affirmait " l'histoire de l'homme se confond avec celle de sa faim ".Des crèves-la-faim qui s'en vont ailleurs.La faim des pauvres,des colons, des réfugiés.La faim insatiable des puissants.
Vito s'était empiffré de couscous aux épices.
Traverser ce bras de mer dans un sens puis dans l'autre , c'est ça , l'histoire de sa famille.
Angelina lui a raconté comment on les avait chassés, le fusil sur les reins, en les poussant dans le dos. Cette vie arabe amputée, la plage des Bains sulfureux, le mûrier des la Sciara Derna, l'école Roma, les amis pour la vie.
Tout cela balayé en un matin de tempête.
Angelina ne savait pas que le jeune Kadhafi allait expulser jusqu'aux morts du cimetière d'Hammangi. Que l'Italie devrait ramener les dépouilles de milliers et milliers de soldats morts en Libye.
Les creux du sable étaient des lames et l'on se blessait à vouloir toucher le désert.
Les vieux étaient enterrées là où ils mourraient. Abandonnés au silence du sable.