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Citations sur Enfer (8)

Lecteur disait tout le temps qu'il fallait en finir avec cette mascarade de "pénalisation de la drogue", il citait et récitait sans cesse à ses amis des extraits d'un livre qu'il venait de lire à ce sujet : est-ce que le haschisch est nuisible ? Et la boxe ? Et l'alpinisme ? Et les courses de voitures autour de la lagune ? Pourquoi ce n'est pas interdit ? Pourquoi est-ce qu'on n'interdit pas l'obésité, qui tue des millions de gens dans le monde ? On veut que les citoyens ne se foutent pas en l'air et on légalise la cigarette et l'alcool. Ça a autant de bon sens que de mettre un calibre .38 entre les mains d'un suicidaire. On fume jusqu'à crever d'un cancer. On boit jusqu'à crever d'une cirrhose. Le tabac et l'alcool, eux, oui, ils tuent. Les hypocrites. Je comprends qu'un pays comme les États-Unis adopte cette politique, avec tous les puritains qu'il y a là-bas, ces péquenots de l'Ohio, qui à seize ans portent des tee-shirts marqués "I Love Jesus", mais ici ? Les filles d'ici apprennent toutes jeunes, à la télé, que tout ce qui compte c'est d'avoir les cheveux blonds et les fesses dures. Rien d'autre. Et on ne pourrait pas fumer un joint ? Ni sniffer de la coke ? C'est trop hypocrite, disait-il. L'alcool, on a le droit, le tabac, on a le droit. On peut se bourrer de pilules coupe-faim, de pilules qui nous foutent la chiasse à longueur de journée, encore et toujours des pilules, des pilules pour se réveiller, pour dormir, on est accros, c'est bien connu, à la télé, à la bouffe, au sexe et au lithium, mais la coke et l'herbe sont interdites sous prétexte qu'elles rendent accro. Elles rendent accro ?
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Arrivé aux grilles de la Promenade publique, Fake ouvrit sa braguette et pissa, en regardant le ciel. Ah, pisser à la belle étoile, c'est le bonheur. Depuis qu'il était sorti de prison, deux jours plus tôt, il n'avait que cette phrase à la bouche. Je sais pas ce qui me prend, Petit Roi, mais j'ai des pensées philosophiques dès que je me mets à pisser à la belle étoile. Je pisse et je pense à des trucs super-sérieux, c'est comme ça que je pisse en méditant. Le Bonheur.
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Boum. 9 heures du matin. Ciel noir, tempête à l'horizon. Feu rouge. Maria Emilia, en route vers le coiffeur, fut dépouillée par un gamin qui la menaça avec un tesson de bouteille. Quelques minutes plus tard, Simone, secrétaire dans une multinationale, se mettait du rouge à lèvres en se regardant dans le rétroviseur lorsque surgit un garçon, menaçant, un tesson de bouteille à la main. Si tu cries, tu passes à la trappe. Ana, étudiante en droit, filez-moi votre sac madame, dit le gamin, filez-moi votre sac, madame, et pas un geste. Tesson de bouteille à la main. Amélia, cinquante-quatre ans, au téléphone, racontait à son fils qu'elle avait été agressée dans la matinée, je n'avais rien sur moi, un coup de chance, mon garçon. Il ne m'a pris que ma montre. Ce que je voudrais, dit Simone, en parlant encore avec son amie, au bureau, du vol dont elle avait été victime, ce que je voudrais c'est attraper un de ces gamins et le frapper, le frapper, lui donner une raclée telle qu'il serait bon pour l'hosto le malheureux. Ceci est un hold-up, dit le gamin à Angélica, dix-huit ans, jeune fille hystérique qui rentrait tout juste de ses vacances aux États-Unis. Tesson de bouteille à la main. Je rentre de Miami, et, la première fois que je prends ma voiture, je me fais agresser. Voilà le Brésil, dit elle. Aucune des victimes n'a porté plainte.
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J'ai tué un homme, chers fidèles. Alléluia. Et ce n'était pas une vengeance, ou à cause d'une discorde, d'une rancœur ou d'une dispute. C'est triste à dire, et c'est ce qui m'achève. Je l'ai tué pour de l'argent. Alléluia, Dieu est notre père.
Un homme d'un certain âge, trapu et tout en muscles, pathétique dans ses expressions, faisait le récit de son drame devant une assemblée de pauvres, de souffreteux, de vieillards désemparés, d'infirmes avec leurs béquilles, de veuves, de mères dont l'enfant était mort, de paralytiques sur des fauteuils roulants, de femmes abandonnées par leur mari, de jeunes au chômage, d'ex-alcooliques, d'ex-prostituées, habitant tous la favela et vêtus de leurs meilleurs habits.
Je me souviens, messieurs-dames, poursuivit l'homme qui prêchait, je me souviens que lorsque j'étais dans ma cachette, guettant le pauvre gars que j'allais tuer de sang-froid, alléluia, ce malheureux qui ne m'avait rien fait, j'ai vu, messieurs-dames, de ma cachette, j'ai vu l'image de la Vierge Marie, alléluia, je l'ai vue, messieurs-dames, j'étais sur le perron d'une maison modeste, la maison d'un travailleur, j'ai vu cette petite statue qu'on avait placée là pour qu'elle veille sur la famille, comme c'est la coutume dans beaucoup de maisons par ici, j'ai vu, chers fidèles, la Vierge avec son petit enfant dans les bras, un bébé, et à ce moment-là, chers fidèles, moi, mon revolver à la main, alléluia, je n'ai pas compris, messieurs-dames, que Dieu m'envoyait un signe, en plaçant la Vierge sous mes yeux, les pleurs du bébé, je ne voyais rien, chers fidèles, je ne remarquais pas ces signes du ciel, parce que j'étais bras dessus bras dessous avec le démon.
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Lecteur toujours des bouquins sous le bras, une cigarette à la main, en compagnie de femmes bien en chair, je vais te dire une chose, puisque tu es là, je vais te dire une chose, ce qui lui plaît à Lecteur c'est une bonne grosse louloute de quatre-vingts kilos, lui raconta Onofre. Une bonne grosse. Tu es en âge de comprendre, pas vrai ? il lui demandait d'un air malicieux, avec des gestes obscènes pour mimer l'acte. Hein ? Tu l'as déjà fait ? Baiser. Les femmes. Leurs petites chattes. Leurs bonnes petites founes, hein ? Toutes mouillées. Hum. Les sucer. Lecteur lui, Petit Roi, il adore faire la queue à la banque, à l'hôpital, au centre des impôts, ce genre de queues. Il reste là, à observer les employées, les filles des guichets, les hôtesses d'accueil, et quand il tombe sur la grassouillette de service, le genre jeune molle, noire ou blanche, noire le plus souvent, quand il tombe sur la fille, le genre qui n'a jamais eu de mec, la fille seule qui n'a jamais vu une bonne bite, en manque quoi, il lui fait sa fête, Lecteur. Il déverse ses sornettes d'amour sur la fille et en deux temps trois mouvements elle se retrouve dans sa piaule. Lecteur, celui-là, dit Onofre, en se penchant sur la table, à l'oreille de Petit Roi, celui-là c'est un baiseur de grosses. Il paraît que c'est quelque chose, une grosse au plumard. Un truc hallucinant. Le ciel qui vous tombe sur la tête. Tu y crois, toi, Petit Roi ? Il paraît qu'ils le font même sur la gazinière. Allumée, la gazinière.
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Soleil, poux, magouilles, braves gens, lambeaux, mouches, télévisions, usuriers, soleil, plastique, tempêtes, toutes sortes de débris, funk, soleil, ordures et escrocs infestent l'endroit. Le gamin qui grimpe sur la butte c'est José Luís Reis, Petit Roi. A part Petit Roi, personne là-bas n'est José, Luís, Pedro, Antônio, Joaquim, Maria, Sebastiana. Ce sont des Gisele, des Alexis, Karina, Washington, Christian, Van, Daiana, Kleber et Elton, des noms tout droit sortis des feuilletons et des émissions de télé, de la jet-set internationale, des magazines de salon de coiffure et des produits étrangers qui envahissent la favela.
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Cette honte qu’elle avait ressentie, votre fils a commis un vol, on lui avait dit, fils maudit, voler, jamais, une honte, une humiliation, espèce de rat, elle, Alzira, qui avait même du mal à accepter qu’on lui offre quoi que ce soit, avait accouché d’un voleur, elle aurait préféré accoucher d’un cul-de-jatte, d’un débile mental, mon Dieu, d’un mongol, toute sa vie à travailler, à nettoyer et à frotter la maison des autres, même dans les moments durs, elle n’avait pris ne serait-ce qu’une poire dans le frigo des patrons, toute sa vie comme ça, à vouloir et ne pas pouvoir, et maintenant cette racaille, un rat, un voleur, oh là là mon Dieu.
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Remercie le bon Dieu. D’ailleurs, ce qui l’avait conduit à se désintéresser de Dieu, c’était précisément cette attitude de sa mère face à toutes les adversités, la faim, le manque d’argent, le froid, la misère, remerciez le bon Dieu, elle leur disait. Putain. Il fallait remercier le bon Dieu pour leur toit percé. Pour leurs chaussures bousillées. Pour leurs vêtements rapiécés. Pour la viande qui manquait. Il ne remerciait jamais. Jamais de la vie.
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