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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai lu ce roman il y a quelques années, à l'occasion de mon travail de recherche autour du film magnifique qui s'en est inspiré, "Beau Travail" réalisé par la française Claire Denis. Billy Budd ne peut pas être du goût de tous je crois, du fait que Melville plante le décor de ce court roman dans l'univers 100% masculin de la Navy du 18ème siècle. L'action y est peu présente et se développe sous la forme d'une suite de micro-événements qui finissent par provoquer un drame. L'art de la manipulation perverse dirait-on, exercée par un homme vicieux, un gradé expérimenté, qui exploite à son avantage d'un côté la naïveté d'un jeune soldat tout juste enrôlé, et de l'autre l'intransigeance de la loi martiale qu'il connaît bien.


Les personnages et les actions sont un peu à l'image de ce corps d'armée : très codifiés. J'irais même jusqu'à dire qu'il y a un certain manichéisme ou un traitement assez caricatural non seulement dans la psychologie des personnages, mais aussi dans la manière qu' a Melville de nous les dépeindre ; la beauté pure, parfaite, candide et lumineuse du jeune Billy rencontre la noirceur, la perfidie, l'obscurité de son capitaine d'arme Claggart. L'un est la blanche colombe, l'autre, le Malin. Cet aspect du roman n'est peut-être pas d'une très grande subtilité, mais Melville maîtrise à merveille l'art d'obliger le lecteur à lire entre les lignes, développant un deuxième niveau d'analyse qui lui est au contraire très subtil.


Billy Budd offre une approche assez osée pour l'époque de la crainte de l'homosexualité dans l'armée. Certains passages du roman touche à une évidente sensualité, une complicité "excessive" partagée par un groupe d'hommes vivant en vase-clos, dans un microcosme isolé et éloigné de tout. L'arrivée du jeune gabier de misaine provoque de l'émoi, tant sa beauté intérieure comme extérieure chamboule l'atmosphère à bord du navire. Ce personnage très "féminisé" suscitera de l'amour autant que de la haine empreinte de jalousie, jusqu'à provoquer le drame. Il y a quelque chose de tragique chez Melville, dans la fatalité qui s'abat sur Billy Budd, et contre laquelle il ne peut rien. La question de la sexualité et de la sensualité au sein de l'armée ont toujours été tabou, et continuent de faire couler de l'encre, même à notre époque. La répression des instincts par le code et par la loi ne peut que faillir face à au caractère pulsionnel de la nature humaine. Dans ce roman, il est intéressant de voir comment la pulsion détourne la loi à son profit, et comment la loi, censée être juste, incarne la plus parfaite injustice.
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Histoire simple et fascinante, quand le désir ne peut même pas se penser et conduit à anéantir son objet, ici un marin innocent et inconscient, pris au piège. Plusieurs pages peuvent apparaître comme de longues digressions, le drame demeure et la tragédie ne se laisse pas oublier.
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Dans ce roman, il y a une abondance de références inconnus pour moi, mais je ne suis normalement jamais fâché d'en apprendre un peu plus sur l'univers. N'est-ce pas là la raison pour laquelle nous continuons à ouvrir des livres? Au travers des pages, les réflexions nagent en grand nombre. Billy Budd a un destin que l'on pourrait dire tragique. Il est né avec sa destinée imprimée dans les beaux traits de son visage. La mer, que trop souvent nous prenons pour synonyme de liberté, est un lieu où la mort est reine. L'on se heurte brutalement aux événements. Je me demande s'il n'est pas dans l'ordre des choses que l'innocence ne finisse pas toujours par périr de son innocence. (Innocent? Donc coupable) Billy Budd n'est-il pas une pureté absolument déplacée dans un monde comme celui-ci? J'ai souris en apprenant que Montaigne a eu une influence certaine chez Melville. Je pense qu'on voit bien cette influence dans le vagabondage que prend parfois ses réflexions dans ce roman.
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On comprend assez vite pour quelle raison profonde Melville a intitulé son dernier texte, fascinant, récit interne. Certes, la critique savante brodera sur le statut, complexe, du narrateur omniscient (à une exception près : le moment où le capitaine Vere communique à Billy Budd sa sentence de mort) qui semble se promener, avec nous, sur et dans (d'où le terme «interne», p. 45) un navire, le Bellipotent, où se déroule l'histoire mais les petits jeux de focalisation ne nous intéressent guère s'ils nous empêchent de voir l'essentiel, l'essentiel qui est occulté et qui pourtant, selon le mouvement propre à l'hermétisme démoniaque génialement décrit par Kierkegaard, ne demande qu'à jaillir à la vue de tous grâce à un mot, un acte, un cri, un geste, afin que les murs épais de la prison infernale soient enfin, au moins une fois, percés d'un jour, pour qu'un minuscule rai de lumière défasse les ténèbres dans lesquelles gémit le condamné, celui qui est emprisonné dans l'in pace du démoniaque, ici le capitaine d'armes Claggart.
Je renvoie mes lecteurs à ce long article paru dans lesÉtudes bernanosiennes et mis en ligne sur Knol, où j'ai tenté d'appliquer à Monsieur Ouine de Georges Bernanos le concept si brillamment exposé par le philosophe danois.
Dans le texte de Melville, c'est Claggart qui, bien davantage que Billy Budd, ce représentant du Beau Marin sur lequel, en raison de son innocence aveuglante (1), il n'y a rien à dire, doit retenir notre attention, puisque ce dernier est le malheureux enfermé dans le cachot hermétique du démoniaque.
Rien à dire ? Certes, Billy Budd peut nous sembler, à première vue, un roc inaltérable qu'aucun filet d'eau, fût-il microscopique, ne semble pouvoir pénétrer et encore moins désagréger et pourtant... Pourtant, il y a la voix du beau Budd, dont «certain accent musical» semble être «la véritable émanation de l'homme intérieur venue sans obstacle du fond de son être» (pp. 32-3). Billy Budd, illettré mais qui, grâce à sa voix donc, «comme cet autre illettré le rossignol», compose parfois «lui-même sa propre chanson» (p. 42).
Lien : http://stalker.hautetfort.co..
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A l'ombre de la loi prospère l'injustice...
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