En roue libre

Où est Gilles, dans les albums de Rochier ?
Généralement dans une banlieue avec des barres d'immeubles, visibles dès la première de couverture.
La seule différence notable ici avec ses autres BD : les personnages sont tout ronds, tout mignons.
C'est Nicolas Moog qui est au dessin, cette fois.
Mais s'il change d'apparence, celui qu'on suppose être l'auteur reste égal à lui-même : sympa, cool et attentionné - le bon copain, le compagnon et le papa dont on rêve.
Et un truc fait partie de sa vie : les Granola.

Ici, il est au chômage, s'occupe de ses filles et glande dans la journée dans la cité avec un pote.
Le pote, c'est Tonio, unijambiste alcoolique, forte tête, amer, provocateur et grinçant :
« Bon alors, les Bamboulas ! Va falloir sauter plus haut si vous voulez jouer en NBA.
- Ha, le con ! Tu vas te faire défoncer, un jour, à leur parler comme ça.
- Oh, t'inquiète, ils frappent pas les infirmes. J'en profite. de toute façon, ils pensent que je suis barjot. »

La patience du bon copain semble sans limites. Il aurait quelque chose à se reprocher par rapport au handicap de Tonio, ou quoi ? On ne le saura pas, malgré quelques flash-back :
« Rappelle-toi, bon sang... / Je ne me rappelle plus. / Je ne me souviens pas. / Non vraiment, je ne me souviens pas. »

Encore une réussite de Rochier, cette fois à 4 mains (+ 2 pour la couleur) où l'on retrouve ses sujets de prédilection, traités avec douceur, naïveté, honnêteté, tendresse : dépression, mecs sympas, amitié entre hommes, entraide... servis avec quelques Granola et beaucoup d'humour.

Les albums de Gilles Rochier se ressemblent, les histoires sont proches, mais j'adore retrouver ses ambiances, ses personnages sur le fil.
Je me faisais la même réflexion hier soir à propos de Patrick Dewaere en revoyant 'Coup de tête' (Jean-Jacques Annaud, 1979).

Il est dur de vivre au milieu des tours d'une banlieue populaire. Il est difficile aussi de vivre en fauteuil roulant. C'est ce que fait Tonio, du moins si ressasser la médiocrité de son existence peut s'appeler vivre ! Même son ami d'enfance, toujours prêt à l'aider, lui est devenu insupportable.

Le graphisme est simple, et le noir et blanc restitue bien la morosité ambiante.

Vous l'aurez compris, cette bande dessinée n'est pas gaie.
D'autres albums de Gilles Rochier, même si le cadre est le même, m'ont parus nettement plus inspirés.

J'avoue avoir été particulièrement choqué par la fin. Voilà un jeune homme d'un quartier qui se lie d'amitié avec un unijambiste en fauteuil roulant qui lui crachera dessus toute sa haine. Cela ne donne pas vraiment envie d'être gentil avec les handicapés ou d'avoir un peu de compassion en les emmenant à la mer pour se changer les idées. J'avoue ne pas comprendre cette crise existentialiste.

Par ailleurs, dans le cas présent, la personne concernée l'a vraiment un peu cherché à force de jouer avec la mort dans des jeux débiles pour prouver sa virilité. Voilà où cela peut mener sans être particulièrement moralisateur. Mais bon, on ne peut pas se taire devant tant de cynisme. Une bd presque malsaine.

Une BD en noir et blanc, avec parfois de la couleur. Des dessins simples mais expressifs, on pense à L'Arabe du futur, sauf que l'histoire est tout de même moins légère. Tonio, handicapé, traine ça et là, se laisse aller. Il doit se faire amputé de la seconde jambe. Un chef de famille, ami d'enfance, tente de l'aider, au delà du raisonnable...
La fin de la BD est surprenante, assez abrupt. Pour le reste, c'est une belle lecture, qui donne à réfléchir.

Rappelle toi, bon sang. Je ne me rappelle plus. Je ne me souviens pas. Non vraiment je ne me souviens pas. Pourquoi Tonio est en fauteuil roulant, pourquoi il a été amputé d'une jambe ? Tonio c'est le plus mariole de la bande de copains, celui qui relève les défis les plus cons et les plus dangereux. Et qui une fois adulte plaisante de son handicap et cherche à rester debout au sens propre comme au figuré.

Les moments que Tonio passe avec son copain d'enfance sont entrecoupés par des souvenirs des quatre cent coups de leur jeunesse et chacun de ces chapitres commencent par "je ne me souviens pas" ou équivalent. Une manière de mieux cerner ce Tonio.
Là encore Nicolas Moog raconte une histoire pleine de sensibilité, sensibilité ne voulant pas dire misérabilisme.

En Roue libre raconte l'histoire de Tonio et d'un de ses amis d'enfance, vivant depuis toujours dans leur quartier de banlieue.

Tonio est en situation de handicap, en fauteuil roulant depuis un accident qui a marqué un tournant dans sa vie mais dont le lecteur ignore tout au début du livre.

On suit donc ces deux hommes dans leurs problématiques quotidiennes au sein de leur famille, les démarches administratives, mais surtout au sein de leur relation d'amitié.

Rapidement dans l'histoire, leur relation semble déséquilibrée. Tonio a un grand sens de l'humour, beaucoup d'autodérision sur sa situation mais semble pourtant cacher une certaine détresse. Son ami lui, dont on ne connaît pas le nom, paraît souvent mal à l'aise en sa présence, bien qu'il veuille sans cesse lui rendre service et l'aider, quitte à l'infantiliser. On sent Tonio agacé par son comportement, quand lui tient à bien faire.

En Roue libre est une histoire entière guidée par la culpabilité et les regrets des personnages, les non-dits, et comment cela peut dégrader une relation, quelle qu'elle soit.

Le personnage principal tente par tous les moyens de renouer ce lien d'amitié, mais il le fait avec maladresse, cherche à trop bien faire, quand Tonio le pousse dans ses retranchements et attend simplement d'être traité « normalement ». Au cours de la lecture, on oscille entre scènes d'amitié tendres et un malaise subtil et ambigu.

Bien au-delà du handicap, En Roue libre amène le lecteur à s'interroger sur certaines attitudes au sein d'une relation, qui peuvent paraître amicales et bénéfiques et qui sont pourtant être ressenties comme dévalorisantes et envahissantes.

Un livre aux personnages attachants, sur la marginalisation, l'amitié, la culpabilité …
Lien : http://www.culture-handicap...

(NG971) Graphisme et scénario efficaces pour dénoncer le cumul du handicap et de la pauvreté. Glaçant. Si on cherche à changer les regards, oui pour une sélection Lycée mais ce nouveau regard ne sera pas "bien pensant".

L'histoire touchante d'une amitié un peu particulière entre Ali et Tony, qui a perdu une jambe dans un accident et va bientôt perdre la deuxième. Ali ressent un besoin de s'occuper de lui et de lui faire vivre quelques bons moments. Mais est-ce vraiment désintéressé? Est-ce vraiment pour le bien de Tony ? Peut-il vraiment se permettre de lui dire ce qu'il doit faire. J'ai été très touchée parce le dialogue entre ces 2 personnages.