Les juifs ne sont pas expulsés des Évangiles ni des autres textes du Nouveau Testament. Ils y demeurent comme la part maudite,comme la personnification du mal, comme le pôle négatif du monothéisme.
Lorsqu'il va être transporté hors de Palestine, l’anti judaïsme primitif des juifs chrétiens va être lentement mais irrémédiablement déconnecté de ses raisons historiques, de son contexte d'opposition à la Judée puis d'opposition au judaïsme pharisien. Il va devenir un anti-judaïsme en soi, un anti-judaïsme ontologique.La fixation puis la canonisation des textes chrétiens vont l'entériner définitivement,lui donner force de loi.
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Après le schisme, les chrétiens auraient pu se détourner définitivement des juifs, les abandonner à une religion qui, jamais plus,ne serait la leur. Au contraire, ils feront de l'anti-judaïsme un des éléments constitutifs de leur propre identité. L'anti-judaïsme sera un signe de reconnaissance. Les chrétiens se définiront comme ceux qui ne sont pas juifs, comme ceux qui se sont démarqués d'eux, comme leurs adversaires ou plutôt leurs ennemis les plus intimes.