Presque mille pages sur
Susan Sontag, l'une des intellectuelles les plus flamboyantes du XXème siècle et, nous dit l'auteur
Benjamin Moser : « la dernière grande star de la littérature américaine ». Autrice, entre autres, d'essais comme
Sur la photographie, sur le style « camp », sur Barthes, sur
Walter Benjamin (à une époque où il n'était pas encore très à la mode), elle fut aussi engagée sur des questions féministes. Cette biographie revient de manière très documentée sur son parcours intellectuel mais aussi privé, sur son côté « snob » (elle ne se déplaçait qu'en taxi), ses relations amicales ou amoureuses avec
Annie Leibovitz, Josef Brodsky, etc. ce qui tourne parfois au potin digne de Paris-Match lorsqu'elle entretient une liaison intéressée avec un tout proche collaborateur de la Maison Blanche. Heureusement, la biographie, souvent passionnante, est sauvée par l'intérêt et l'engagement que porte
Sontag sur presque tout : les poètes russes, le journal de
Gombrowicz, le cinéma, l'oeuvre de
Danilo Kis ou celle d'
Elias Canetti, de
Cioran, de
Robert Walser ou encore
De W.G. Sebald, la musique - des Doors à Wagner -, aux chorégraphies de Lucinda Child, à la tragédie bosniaque et la liste est très très longue. On s'étonne quand même de lire, sous la plume du biographe, que
Jean Genet fut un « résistant de toujours » (sic) ou que
George Bataille est un « médiocre scribouillard » (sic) ! Je regrette aussi qu'il n'y ait nul passage sur ses visites au club CBGB de New York et son intérêt pour les punks, ni un mot sa collaboration (pour dénoncer la guerre contre l'Irak) avec le groupe Fischerspooner, sur le titre We need a war. Vous l'aurez sans doute deviné, on est, à la lecture de cette imposante biographie, sans cesse balloté entre le plaisir et la déception, l'étonnement et le mécontentement parfois. Ce tangage est mal aisé. Reste que
Susan Sontag (injustement oubliée, au vu des ventes très maigres de ce livre) reste une figure intellectuelle très importante du XXème siècle et que cette biographie révèle une multitude de visages
différents de celle qui croyait au « pouvoir d'auto transformation » pour se soustraire à une enfance malheureuse ou encore être acceptée (voir adulée) par les autres. Brillant, avec des zones d'ombres.