Citations sur Les braises (176)
-Ce n'est plus notre guerre, dit Conrad. Nous sommes vieux. C'est maintenant la guerre des hommes nouveaux.
-Non, c'est toujours la même guerre, objecte le général. Le monde est encore une fois en feu et des millions d'individus sont sacrifiés.
Le pire, c'est de refouler les passions que la solitude a accumulées en nous.
Ce qui agitait notre coeur avec une violence insupportable, ce qui nous semblait raison suffisante pour mourir ou tuer aura moins de valeur que fétus de paille emporté par le vent.
ce qui donne un sens à notre vie c'est uniquement la passion, qui s'empare un jour de notre corps et, quoi qu'il arrive entre-temps, le brûle jusqu'à la mort (...) Peut-être la passion ne consiste-t-elle pas à désirer une certaine personne, mais à ressentir, en général, un désir nostalgique.
- A nous deux. Je me suis souvent demandé si la véritable essence de tous les liens humains n'est pas le désintéressement qui n'attend ni ne veut rien, mais absolument rien de l'autre et réclame d'autant moins qu'il donne davantage. Lorsque l'on fait don de ce bien suprême qu'un homme peut donner à un autre homme, je veux dire la confiance absolue et passionnée, et lorsqu'on doit constater qu'on n'est payé que d'infidélité et de bassesse... a-t-on le droit d'être blessé et de crier vengeance?
Conrad reste immobile dans son fauteuil et demande d'une voix enrouée:
- Tu parles de vengeance?...
Exiger la fidélité n’est-ce pas agir en égoïste et en présomptueux ? Voulons-nous réellement le bonheur de l’être aimé quand nous lui réclamons sa fidélité ?
Les hommes leur rendraient toujours volontiers une partie de leur joie, car les dieux jaloux, quand ils accordent à un mortel le bonheur pendant une année, inscrivent aussitôt, en contrepartie, une dette qu'ils réclament à la fin de la vie avec des intérêts usuraires.
C'est exact, dit Conrad. Il faut toujours payer, finalement.
Souffrir est la destinée des hommes, répondit la mère d'Henri d'un ton sentencieux. Assise devant son miroir, elle observait sa beauté qui se fanait. Un jour ou l'autre, nous devons perdre l'être que nous aimons. Celui qui ne peut supporter cela n'est pas intéressant, parce qu'il n'est pas un vrai homme.
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"Souffrir est la destinée des hommes", répondit la mère d'Henri d'un ton sentencieux. Assise devant son miroir, elle observait sa beauté qui se fânait. "Un jour ou l'autre nous devons perdre l'être que nous aimons. Celui qui ne peut supporter cela n'est pas intéressant, parce qu'il n'est pas un vrai homme."
Dans le temps qui s'écoule, rien ne se perd. Mais petit à petit, comme ces très vieilles photographies faites sur une plaque métallique, la lumière et le temps effacent leurs traits nets et caractéristiques. Pour reconnaître par la suite le portrait sur la surface devenue floue, il faut le placer sous un certain angle de réflexion. Ainsi pâlissent nos souvenirs avec le temps. Cependant, un jour, la lumière tombe par hasard sous l'angle voulu et nous retrouvons soudain le visage effacé.