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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Dans les années 1930 et 1940, le Rwanda voit arriver des missionnaires blancs qui viennent apporter la vraie foi en Yézu et Maria. Ces deux divinités nouvelles pourront-elles enfin faire pleuvoir sur la plaine desséchée ? Ou bien faut-il pour cela prier Kibogo, enlevé par le ciel un soir d'orage ? Les croyances s'affrontent, mais finissent aussi par se superposer et développer de nouveaux motifs, au gré des personnes qui les racontent et de celles qui les écoutent.
Dans quatre récits qui se suivent et s'emmêlent, l'auteure, tout comme les "tisseuses de contes" qui filent ces histoires, recrée à la fois la langue orale des conteurs, mais campe aussi ses personnages représentatifs : vieillards que l'on veut croire séniles mais qui sont dépositaires de la mémoire du peuple bien plus que les livre des Blancs, missionnaires qui ne voient que des superstitions païennes à combattre absolument, puis étudiants et chercheurs à la recherche de traces de sacrifices humains qui ne voient et n'entendent que ce qu'ils veulent, et parmi tous ces gens, les malheureux croyants ne sachant plus qui prier et tentant de concilier les rites ancestraux et les nouvelles instructions dénuées de sens.
Le plus beau dans ce tissage, c'est que les croyances qui semblent pourtant totalement opposées en viennent à se compléter et à se ressembler. Ainsi le séminariste défroqué réfugié sur la colline aux esprits et offrant du pain aux enfants, l'éminent professeur poursuivi par les nuages d'orage pour le punir d'avoir profané cette même colline, et finalement, le petit garçon malin qui espère bien qu'en échange des mystères de son peuple, il pourra aller dans une vraie école. Mettre sur le même plan les croyances populaires et la religion chrétienne permet de voir comment elles se nourrissent les unes des autres et donnent ainsi de beaux motifs à ce tissu de contes, tout en faisant sourire le lecteur de parvenir à ces rapprochements inattendus.
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L'évangélisation du Rwanda a commencé avec les missionnaires d'Afrique au début du XXe siècle. Dans ce roman, Scholastique Mukasonga montre toute la difficulté d'imposer les dogmes catholiques aux Rwandais, profondément ancrés dans les croyances ancestrales.

Terrassés par une catastrophe naturelle, les Rwandais se tournent naturellement vers les offrandes païennes. Pendant la dernière guerre mondiale, une terrible période de sécheresse a installé la famine dans le pays. Kibogo est alors monté sur le mont Runani. Foudroyé, il est monté au ciel. Son sacrifice a amené la pluie. Seuls trois hommes du village ont assisté à la scène. Depuis, le mont Runani est une montagne païenne, interdite par les prêtres blancs.

« Vos contes pour les veillées, disaient les pères, nous les conservons pour vos enfants et surtout pour vos petits-enfants quand ils seront évolués, civilisés, lettrés. Alors nous leur expliquerons ce que vos histoires voulaient vraiment dire et que vous étiez incapables de comprendre parce qu'elles annonçaient notre venue pour vous révéler le vrai Dieu. »

Mais on ne dépouille pas aussi facilement un peuple de sa culture. Akayézu a un destin. Choisi par les missionnaires pour entrer au petit-séminaire, il connaît la Bible. Et il se l'approprie.

« Maintenant, Akayézu en était certain, ce n'était pas l'histoire des juifs que racontait la Bible, pas même celle de Yezu, mais celle des Rwandais.»

Venu officier dans sa colline, il adapte ses sermons avec les contes locaux. Il distribue le pain aux enfants, s'entoure d'une cour de femmes fidèles telles des apôtres et sa targue même de miracle. Son objectif est de réunir les esprits de Yezu et Kibogo en évangélisant sa dernière disciple, Mukamwezi. Lorsqu'ils montent sur le mont Rumani pour faire revenir Kibogo, un terrible orage frappe durement le bois et les païens. Une fois encore, trois garnements sont témoins du drame.

Les prêtres blancs veulent sauver le mont Runani avec une procession et une statue en l'honneur de Maria.

« On dirait, remarque le professeur, qu'on l'a érigée là pour interdire aux Rwandais de se réapproprier leur passé. »

Mais les tisseuses de conte continuent à croire en Kibogo. Chacun fait valoir son histoire, vieux témoins séniles de la montée au ciel de Kibogo ou jeunes garnements plus instruits, fiers de leur culture.

Un peu court, ce roman utilise l'humour pour montrer les conséquences de la colonisation et de l'évangélisation sur la culture d'un pays. Scholastique Mukasonga nous livre une satire, un conte riche en péripéties très agréable à lire. Et montre fort heureusement que les croyances ne meurent pas aussi facilement.

Lien : https://surlaroutedejostein...
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Un roman qui se lit comme une série de contes tissés autour d'un axe commun : le récit de Kibogo. Les différents chapitres dessinent en trame de fond l'histoire de la colonisation religieuse du Rwanda et son implantation progressive. Sans être subjuguée par ce livre, je l'ai trouvé plein d'originalité et d'intérêt.
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Je vous emmène au pays des mille collines, et plus particulièrement auprès de l'une d'entre elles, le mont Runani, au pied duquel se situe ce roman. En quatre tableaux d'époques différentes, de la Seconde guerre mondiale aux années 60, Scholastique Mukasonga nous fait vivre l'évolution de l'évangélisation au Rwanda, et de sa cohabitation avec les cultes et coutumes plus ancestraux.

Le fil rouge ? Kibogo, fils du roi Ndahiro, qui, en des temps lointains et selon ce qu'on raconte, monta au sommet du mont Runani pour sauver son peuple de la famine, y fut foudroyé et emporté au ciel, ce qui lui permit de faire tomber la pluie et arrêter la sécheresse qui sévissait alors. Les tableaux ? Ruzagayura (nom de  la grande famine de 1943), Akayezu, Mukamwezi et Kibogo. Les protagonistes ? Les padri, qui, du haut de leur supériorité, incitent cette population païenne à prier Yezu et Maria ; les anciens, qui connaissent les histoires qui se transmettent de génération en génération et sont plus enclins à invoquer l'aide de Kibogo ; Akayezu, séminariste dont les croyances font se rejoindre Bible et tradition ; Mukamwezi, vierge prêtresse consacrée à Kibogo ; un ethnologue passionné par les sacrifices humains… puis ces vieillards et enfants qui sont la voix des villageois…

Scholastique Mukasonga nous offre ici un beau conte, fait lui-même d'autres contes, comme ceux que l'on raconte lors des veillées. Si le début est assez dur (exploitation par les colons, sécheresse et famine), elle nous donne également, avec beaucoup d'humour et de tendresse pour ses personnages, un regard intéressant sur ce travail missionnaire de l'époque, et du recours à la religion chrétienne ou aux pratiques et coutumes locales au gré des intempéries et des besoins, et sur ce processus d'acculturation qu'Akayezu représente. Et de la grande famine aux récits au coin du feu, nous ne sommes pas plus avancés en refermant notre livre : finalement, qui, de Kibogo ou de Yezu et Maria, fait tomber la pluie ?

En résumé, un roman intéressant qui appréhende avec humour l'évangélisation du Rwanda.
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Lorsque la sécheresse s'abat sur le Rwanda ; vers qui peuvent se tourner les villageois : le Yesu des prêtres blancs et leur procession ou les croyances anciennes de la prêtresse de Kibogo, Mukamwesi que certains vont voir dans la montagne en cachette? Et lorsque la pluie tombe, à qui faut-il rendre grâce ? Qui a été plus puissant ?

Akayezu est un jeune rwandais éduqué par les pères blancs, qui revient dans son village comme « padri » pour « évangéliser » mais, au fil des pages, Akayesu s'éloigne de plus en plus de l'enseignement canonique de l'église. Quand il décide d'évangéliser Mukamwesi, la prêtresse de Kibogo, tout bascule. Qui est monté au ciel ?

Enfin, dans le dernier chapitre « Kibogo », un nouveau « Bazungu » est arrivé ; ni un padri , ni un agronome. Il veut écouter les histoires d'autrefois. L'anthropologue est reçu en grande pompe et les vieux doivent lui raconter les vieilles histoire comme celles de Kibogo, qui restent à leur mémoire. Pourquoi tout d'un coup les Blancs intéressent à Kibogo ? Mais si le vieux professeur blanc veut des histoires, on va lui en raconter...

L'évangélisation du Rwanda avec beaucoup d'humour.
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