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3,67

sur 801 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Esthétiquement, ce livre est un bijou : papier glacé et magnifiques illustrations dans les tons bleu nuit, argent et blanc. Haruki Murakami m'a fait vivre les dix-sept nuits de totale insomnie d'une femme de trente ans, épouse d'un dentiste et mère d'un petit garçon tous deux inconscients de ce qu'elle ne dort plus du tout, une fois endormis, rien de peut les réveiller. C'est un cauchemar qui déclenche sa première nuit sans sommeil. Une histoire dont j'était impatiente de connaître le dénouement mais Haruki Murakami m'a surpris par une fin inachevée, à moi de l'imaginer.

Challenge Petits plaisirs 2016
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Ni une somnolence, ni un sommeil léger et encore moins un sommeil profond ou paradoxal, « Sommeil » d'Haruki Murakami est bien étrange.
Une nuit de pleine lune où habituellement Morphée n'est pas très accueillant, ce petit livre très agréable au toucher est une aubaine, un excellent dérivatif à des bâillements sans fin.

Une jeune maman au foyer perd le sommeil à la suite d'un cauchemar et raconte son insomnie de 17 jours que l'on à peine à imaginer tant la durée dépasse l'entendement. Personne, pas même son mari, ne s'aperçoit qu'elle ne dort plus d'autant qu'elle se garde bien de consulter un médecin.
Sa vie au quotidien, jusque là routinière, est bien sûr profondément perturbée.
Le lecteur, tout d'abord intrigué puis peu à peu captivé par la chronologie de cet état d'éveil permanent, se demande au fil des pages si une telle insomnie n'est pas le signe avant coureur de la folie.

Cette nouvelle très courte se lit en à peine plus d'une heure, l'auteur a bien fait les choses, comme s'il voulait éviter le moindre bâillement à ses lecteurs.
Souvent chez Murakami le réel et l'imaginaire se chevauchent, le rêve n'est jamais bien loin…

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Après les couloirs sinueux de « l'étrange bibliothèque », « Sommeil », m'a fait voyager dans un autre monde labyrinthique, celui des nuits sans sommeil.

*
Haruki Murakami n'a pas son pareil pour décrire un quotidien banal et mélancolique traversé d'étrangeté, de surréalisme et de mystère.
Ici, il raconte l'histoire d'une jeune trentenaire qui pour une raison inexpliquée, va vivre une expérience insolite : à la suite d'un rêve étrange, elle cesse tout simplement de dormir.

« Je me suis réveillée brusquement, en sursaut, comme si quelque chose m'avait arrachée au sommeil à l'instant le plus dangereux, le plus effrayant du rêve, au point de non-retour… comme si j'étais allongée, seule, au fond d'une grotte. »

Elle va restée éveillée pendant dix-sept jours et dix-sept nuits.
Sans jamais ressentir le manque de sommeil.
Sans que jamais personne ne s'en rende compte. Ni son mari, ni son fils.
La dix-septième nuit marquera une fin. Mais laquelle ?

Sans même s'en rendre compte, je me suis laissée surprendre et piéger dans la toile narrative que l'auteur tisse avec finesse et élégance.

*
Sa vie quotidienne est d'une monotonie affligeante et d'une solitude extrême : en journée, cette femme au foyer vaque à ses occupations familiales. Mais pendant ses nuits blanches, alors que tout sa famille dort, elle retrouve les plaisirs simples d'autrefois : elle se verse un verre de cognac, mange du chocolat tout en lisant et relisant Anna Karénine.

"… désormais tout ce temps m'appartenait. À moi et à personne d'autre. Rien qu'à moi. Et je pouvais l'utiliser comme je l'entendais. Personne ne viendrait me déranger. C'était un agrandissement de ma vie. Ma vie s'était agrandie d'un tiers."

Les seuls moments où elle semble revenir à la réalité est lorsqu'elle regarde son mari et son enfant dormir. C'est alors qu'elle se rend compte de l'enfermement dans lequel elle a doucement glissé au fil des années.

*
Haruki Murakami a sûrement dû se documenter sur le sommeil et le rêve.
Il exploite superbement leur fonction défensive et leur rôle de régulateur : il décrit d'une façon subtile les conflits intérieurs de la jeune femme qui s'est perdue dans une vie maritale insipide et insatisfaisante, faisant ressortir ses peurs, ses angoisses et ses désirs.

L'auteur évoque les expériences menées par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, privant de sommeil les prisonniers pour en voir les effets. Pourtant l'absence de sommeil n'inquiète pas la jeune femme et ne semble pas peser sur sa santé physique et mentale.

*
Tout doucement enchaînée à cette histoire et cet univers complexe dans lequel il est facile de s'égarer, je me suis interrogée sur le sens de ce texte avant d'écrire ce billet. Car, en plongeant dans les mécanismes du rêve, l'auteur nous entraîne dans son langage onirique et symbolique. Il nous invite également à réfléchir sur la nature de la réalité et du rêve, de la conscience et de l'inconscient, des conflits intimes et de l'harmonie entre le corps et l'esprit.

Le mystère qui entoure ces nuits blanches étend le champ des interprétations possibles. La fin ouverte et totalement inexpliquée m'a frustrée, mais après mûre réflexion, je trouve qu'elle laisse les lecteurs libres d'interpréter à leur façon les dernières pages de ce récit.

« Comme une série de boîtes, chaque monde en contenait un autre plus petit, et ainsi à l'infini. Et, tous ensemble, ces mondes formaient un univers entier, et cet univers était là, attendant d'être découvert par le lecteur. »

Sommes-nous dans les rêves et l'inconscient de la jeune femme, l'auteur décortiquant ses peurs les plus intimes ?
Sommes-nous au contraire dans une réalité qui se fragilise et se fendille, s'efface lentement et disparaît, l'auteur nous emportant aux frontières de la raison ?
Est-elle insomniaque ? Ou bien, vit-elle dans un rêve éveillé ?
En connaissant le destin d'Anna Karénine, faut-il voir dans le choix de ce roman un autre message, une nouvelle piste de réflexion ?

*
J'aime les beaux livres, j'y suis très sensible.
Les éditeurs ont porté une attention particulière à l'objet-livre. En effet, le récit est enrichi des magnifiques illustrations aux couleurs sombres et argentées de Kat Menschik. Elles sont à l'image du texte, poétiques et oniriques, chargées de symboles, totalement en symbiose avec l'écriture et l'atmosphère irréelle, sombre et envoûtante de cette nouvelle.

*
Pour conclure, même si l'épilogue m'a au départ déstabilisée et même un peu déçue, je suis à nouveau charmée par le monde instable, flottant et métaphorique de Haruki Murakami : l'auteur laisse en effet des portes ouvertes pour que le lecteur puisse parcourir les sinuosités et les recoins de l'âme humaine tout en redessinant à sa guise la réalité qui échappe à toute logique.
Une nouvelle de 80 pages surprenante à découvrir … par une nuit d'insomnie.
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Une nouvelle intrigante. On découvre les personnages tous le long des pages, le père, l'enfant.… Sa famille, sa vie. On découvre les problèmes d'insomnies de cette femme, la narratrice. Coupé de très jolies illustrations.
Et puis cette fin… Où l'on se dit « et puis quoi ??? ».
Je n'ai pas arrêté de me questionner.
Ça ne peut pas se finir comme ça ?
Et puis j'ai compris !
L'auteur aurait dû nous donner un peu plus d'indications. Un petit rappel peut-être !

Bonne lecture !
Lien : https://angelscath.blogspot...
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Livre qui distille goutte à goutte des univers dans nos pensées.
Une femme ne dort plus, comment est-ce possible ?
Une femme vit le double de la vie.
Une femme laisse remonter son ancien moi.
En quelques phrases, tout est dit.
Celle qu'elle fut.
Un mari dévoué et... d'une banalité quotidienne voire d'une laideur que le sommeil dans lequel elle le contemple fait apparaître des contours qu'elle n'a pas vu ou n'a pas voulu voir.
Un enfant aimé mais dont elle pressent l'incommunicabilité future puisque se dessine dans ses traits un autre qui représente tout ce qu'elle refuse.
La lecture retrouvée comme le Temps retrouvé : fuite, extase, découvertes.
La Nuit symbolique, la voiture (cage protectrice mais aussi tombeau) et la Mort dont les ténèbres se révèlent ni plus ni moins que celles de la Vie.
Où se situer : c'est en cela que la nouvelle de Murakami fascine et désarçonne : on s'y retrouve, on peut s'y perdre, c'est une contrée mystérieuse que de plonger dans cet être qui change sans que quiconque s'en aperçoive.
Les interprétations psychanalytiques foisonnent...
Les illustrations en deux couleurs sont expressives et confortent ce monde de la nuit absente et combien étrange où s'enfonce l'héroïne.
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Nouvelle dévorée en trois fois rien, acquise parce que Murakami et pour la beauté de l'édition illustrée (chez 10/18). Et comme d'habitude, l'auteur nous laisse en suspens : que deviendra la narratrice, cette femme qui ne dort plus depuis dix-sept nuits, dévorant Tolstoï et Dostoïevski en buvant du cognac et en mangeant du chocolat ? Etrange ambiance, finalement assez proche d'un Maupassant... D'autant plus qu'on ne sait dire si cette "pathologie" est un bien ou un mal : qui n'a pas rêvé de pouvoir passer des heures et des nuits entières à lire des livres sans tomber de fatigue, sans faillir dans l'attention ? Or, on sait bien, la narratrice aussi sans doute, que cet enchantement soudain aura son revers de médaille, sombre, dans les 'ténèbres éveillées' qui préfigurent la mort.
Voilà donc un bon petit moment, qui sous ses allures anodines, interroge aussi sur notre routine quotidienne et sur ses mécanismes inconscients construits sur la répétition d'actions et d'attitudes qui peu à peu nous déshumanisent.
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Une nouvelle troublante
La narratrice est une trentenaire au foyer. Elle semble se contenter de mener une vie très routinière avec son mari et son fils. Mais une nuit, le sommeil ne vient pas. Elle a une vision...Cela fait à présent dix-sept nuits qu'elle ne dort plus et elle n'est toujours pas fatiguée. Elle se met à dévorer Anna Karénine, s'active, sort, s'évade dans un monde intérieur parallèle...
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle, troublante, bien construite et riche en références. J'ai bien apprécié la fin, ouverte.


L'édition est très jolie mais, pour le même prix, on peut se procurer L'Eléphant s'évapore, qui comprend bien d'autres récits en plus de celui-ci.
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"Voilà dix-sept nuits que je ne dors plus".
Ainsi commence cette étrange et fascinante nouvelle de Haruki Murakami, auteur que je ne connaissais pas jusqu'à présent.
Cette nouvelle, sous couvert d'une histoire assez simple d'une femme ne dormant plus depuis dix-sept jours, est intrigante du début à la fin et soulève de nombreuses questions.
Est-ce un cauchemar éveillé ou une nuit sans fin que vit l'héroïne ? Quelle est la symbolique de ce non-sommeil : trouver un sens à sa vie ou bien annoncer une mort prochaine ? Est-cela traduction d'une lassitude, d'un ennui de sa vie quotidienne ou bien une démonstration de son égoïsme ?
Beaucoup de questions et au final pas vraiment de réponses.
Je me demande même si l'état de cette femme ne correspond pas à l'état de plénitude, de bien-être, de sérénité, que peuvent ressentir les personnes juste avant de mourir.

Cette femme s'ennuie, sa vie est routinière et ne lui apporte rien sur le plan personnel, ou alors si peu, et puis survient ce non-sommeil qui lui ouvre les portes d'un univers insoupçonné. Elle a du temps pour elle, se remet à lire des livres, à réfléchir, mais se détache de plus en plus de son entourage.
J'ai beaucoup aimé le parallèle avec sa lecture d'"Anna Karénine", au fond j'ai eu l'impression que c'est ce que vit l'héroïne du livre que cette femme voudrait vivre : une folle passion qui fait tout oublier, qui donne un sens à sa vie, même si c'est pour la perdre au final : "Je ne pouvais plus penser à rien, à cause des scènes du roman qui me restaient dans la tête et d'une faim violente qui venait de m'assaillir. Ma conscience vivait une chose, quelque part, et mon corps une autre, ailleurs".

Finalement je cherche et je m'interroge encore sur le sens de cette nouvelle, mais elle ne peut que soulever beaucoup de questions et amène donc à réfléchir, à s'interroger sur sa vie, mais aussi sur sa relation avec les livres, car il est beaucoup question de littérature dans ce récit.
L'auteur flirte en permanence entre le réel et l'irréel.
Il détient les clés du mystère et a choisi de laisser son lecteur s'interroger et interpréter l'histoire à sa manière.
J'ai été moi-même hypnotisée par la lecture de ce livre que j'ai d'ailleurs lu d'une seule traite.

C'était ma première lecture de Haruki Murakami et j'avoue avoir aimé le style de l'auteur.
C'est à mon avis une bonne façon d'aborder son style littéraire.
De plus, le livre est illustré par Kat Menschik (édition 10/18).
Ses dessins sont très beaux, dans des tons de gris argent qui illustrent bien le thème dominant de la nuit (ils se reflètent d'ailleurs selon l'orientation de la lumière), ainsi qu'une forme de folie sous-jacente dans cette oeuvre.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Une histoire de prime abord plutôt banale, une femme trentenaire qui s'enfonce dans un état dépressif, une insomnie de dix-sept nuits.
Pendant ces espaces de liberté nocturne cette femme s'active et une autre vie s'exprime.

Mais il s'agit de beaucoup plus que des errances d'une desesperate housewife, car cette « autre » vie s'appuie en premier lieu sur un retour avec les mots, la lecture avec Anna Karénine de Tolstoï.
Cette femme avait par le passé une relation privilégiée avec les livres, les mots étaient le sel de son quotidien.
Et puis après sa période étudiante en lettres, le mariage, la vie familiale, une vie affective et matérielle confortable rythment avec une régularité de montre suisse le quotidien.
Cette femme ne lisait plus, ne vivait plus avec les mots.
Et fatalement, l'acuité dynamisée par la profondeur de la nuit éclaire son existence diurne avec une distanciation ; son mari, sa vie se minéralisent dans un quotidien où elle n'est plus sure de se retrouver, d'être elle-même.
Une fièvre conjointement maitrisée et irrésistiblement transgressive l'habitent  ; s'agit-il d'une fêlure accidentellement ouverte ou d'un retour sur soi ? C'est toute la qualité de ce livre de jouer sur les deux tableaux.

Difficile de ne pas établir le rapprochement avec ce célèbre extrait de la pensée du sage taoiste Tchouang Tseu
« Tchouang Tseu rêva qu'il était un paillon, voletant de ci d e là, insouciant, n'ayant aucune conscience d'un Tchouang Tseu
Puis il s'éveilla et à nouveau il était Tchouang Tseu sans l'ombre d'un doute.
Mais était-il Thouang Tseu qui avait rêvé qu'il était un papillon ou un papillon rêvant en cet instant qu'il était Tchouang Tseu ? »

La nuit les mots de Tolstoï deviennent plus vivants que le mari momifié dans son sommeil.
Murakami joue ainsi avec subtilité sur les frontières des apparences et du réel
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Les éditions 10-18 nous sortent un écrin graphiquement superbe, papier glacé, un support bien luxueux pour présenter cette nouvelle de Murakami.

La narratrice perd totalement le sommeil et profite de ces instants à elle pour porter un nouveau regard sur sa vie, sur son mari et son fils.
Cette nouvelle nous interroge sur la routine, le quotidien, la répétition d'actions banales et systématiques qui peuvent au fil du temps mécaniser nos vies.

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