Puisse mon entreprise être aussi bien comprise par les esthètes qui peinent à considérer la photographie comme un art nouveau, que par les scientifiques qui ne jurent que par la retranscription exacte de la réalité.
Je veux montrer des êtres humains, fiers et dignes, habités par des sentiments aussi beaux, complexes et contradictoires que la compassion, la colère, le regret, le mépris, l'insouciance et la mélancolie.
Je ne montrerai pas de Peaux-Rouges sauvages, sanguinaires ou alcooliques. Je n'en ai rencontré aucun sur ces Grandes Plaines, si loin de nos préjugés...
J'ai le devoir impérieux d'éviter la médiocrité du premier jet, d'effacer la laideur accidentelle de la prise de vue, d'élever mon sujet, de corriger le disgracieux, afin que les Indiens ressemblent à eux-mêmes et non aux idées reçues que les Blancs ont fabriquées.
Grâce au bichromate de potassium, j'ai réussi à obtenir des épreuves allant d'un brun pourpre profond jusqu'aux tonalités les plus délicates.
Je ne m'interdis aucune retouche, aucun recadrage. J'accentue les profondeurs de champ en retravaillant la lumière comme un peintre.
Mais celui qui ment tue son âme.
Le corps est le temple de l'esprit...
Je tente en vain de percer les arcanes de la création de l'Univers...
Je vis maintenant parmi eux. Leurs danses et leurs chants me transportent au-delà de l'inexplicable... Je partage leurs joies, leurs inquiétudes et parfois leurs rites sacrés.