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221 pages
Éditions Eugène Figuière (01/06/1934)
5/5   1 notes
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une oeuvre injustement méconnue que cette pièce de théâtre étrange et à peu près impossible à mettre en scène, publiée aux très farfelues éditions Eugène Figuière par un auteur marginal, dont on ne sait à peu près rien. Thomas Mureçay était le pseudonyme d'un certain Maurice Thomas (peut-être le même qui signa en 1957 un roman intitulé "Harmonie des Couleurs"). Mis à part cela, ses dates de naissance et d emort demeurent inconnues, tant il est vrai que ce cher Eugène Figuière n'était pas du genre à aller porter ses manuscrits à la Bibliothèque Nationale.
"La Fin du Monde" semble en tout cas la toute première publication de ce Maurice Thomas, et autant dire qu'il n'y avait qu'Eugène Figuière pour publier une pièce pareille. Découpée en trois actes et quatre tableaux, "La Fin du Monde" se déroule en grande partie au Paradis, mais un Paradis pas très catholique, qui gère comme des colonies une centaine de planètes dont la Terre ne représente que le monde n°87. Dieu y est une espèce de gros bonhomme mal embouché, excédé par sa tâche, volontiers anarchiste, qui se contente de recevoir les âmes des décédés et de leur offrir une postérité diamétralement opposée à ce que fut leur existence sur Terre. C'est ainsi que la reine Cléopâtre et Ninon de Lenclos sont devenues les secrétaires particulière de Dieu, chargées de préparer les tisanes et de donner un peu d'affection à ceux qui en ont besoin, tandis que Jules César et Alexandre le Grand sont reconvertis en jardiniers-fleuristes, et que Saint-François d'Assise gère le fichier des Terriens.
Un jour où le Seigneur rend jugement des dernières âmes terriennes arrivées au Ciel, un grand désespoir le saisit quant à cette race humaine incapable de s'améliorer, et il décide abruptement de détruire la Terre. Saint-François d'Assise qui est resté très attaché aux Terriens, le supplie de changer d'avis, mais Dieu reste inflexible. Toutefois, il veut bien confier une mission à Saint-François : il lui donne 48 heures d'avance pour prévenir les hommes de leur fin prochaine et les inviter à se repentir de leurs péchés. Par le biais de songes prémonitoires, Dieu avertit les quatre sommités françaises des médias de l'époque (Radio, Presse, Télécommunications et Finances) de se tenir un certain matin dans la cafétéria du siège central de la T.S.F. Là, Saint-François les rejoint et leur annonce la prochaine fin du monde, et la nécessité de faire une communication internationale à ce sujet. Au début, évidemment, les quatre hommes se moquent de lui, mais grâce au Seigneur qui fait trembler l'édifice où ils se trouvent, ils sont rapidement convaincus du sérieux de la menace,. Cependant, en vrais professionnels, ils songent avant tout à tirer profit de ce scoop exclusif. Tous se mettent en branle pour transmettre dans le monde entier le message de repentance de Saint-François d'Assise. Celui-ci, quelque peu naïf et enchanté du résultat, se retire pour prier Dieu et le supplier de laisser encore une chance à l'humanité. Dieu se laisse alors fléchir, et le jour et l'heure où le monde doit disparaître, alors que l'humanité toute entière attend angoissée sa fin, rien ne se passe... Aussitôt, l'autorité cléricale, qui a toujours émis des doutes sur la véritable identité de Saint-François d'Assise, et la Justice, qui l'accuse de trouble à l'ordre public, procèdent à l'arrestation et la mise au cachot de Saint-François d'Assise. Interrogé et torturé par des policiers d'une incapable cruauté, il est rappelé par Dieu au Paradis, qui le met ainsi en face de la corruption désespérante et de la cruauté sauvage des Terriens. Aussi après avoir envoyé au repos son malheureux émissaire, Dieu se prépare, avec l'aide d'Alexandre le Grand, à détruire la Terre une bonne fois pour toutes. Néanmoins, il hésite, louvoie, et finalement, incapable de le faire lui-même, il demande à Alexandre de le seconder dans sa tâche. Une énorme fusée magnétique est ainsi envoyée du Paradis jusqu'à la Terre, qui éclate en millions de morceaux sous son impact. C'est la fin de notre monde, et par conséquent de la pièce.
"La Fin du Monde", comme on le voit, porte bien son titre, mais contrairement à l'impression que peut en donner le résumé que je fais, c'est une pièce de théâtre plutôt joyeuse, remplie d'anecdotes ironiques et de dialogues absurdes qui préfigurent, avec un demi-siècle d'avance, l'humour caustique et humaniste de Jean-Michel Ribes. Néanmoins, ce n'est pas à proprement parler une oeuvre athée ou blasphématoire, même si la pièce ne cache pas son anticléricalisme militant ainsi qu'une certaine défiance pour toutes les formes terrestres d'autorité et de justice. Au final, il s'agit d'un procès de l'humanité par un Dieu assez opposé à l'idée que l'on s'en fait, un Créateur-Destructeur qui associe un tempérament caractériel inspiré des Dieux de l'Olympe, et le pragmatisme d'un homme d'affaires des années 30. Un Dieu droit dans ses bottes, qui défend l'idéal biblique comme un bon sens du terroir et conspue l'humanité comme si elle n'était qu'un ramassis de têtes folles qui ne songent qu'à se faire du mal. La modernité et la technologie y sont d'ailleurs assez vertement critiquées. "La Fin du Monde" est avant tout le récit d'un Dieu déçu par les hommes, signé par un homme vraisemblablement déçu par Dieu, mais qui y a certainement cru lui-même à une époque.
La pièce n'a pas été montée à sa sortie, il y avait des difficultés techniques alors indépassables : il fallait une scène tournante, permettant d'alterner les trois décors principaux de l'histoire. Il y a aussi un personnage décapité qui parle avec la tête sous le bras, mais la remet de temps en temps sur son cou tout en continuant à parler, puis au bout d'un moment s'en fait greffer une nouvelle, tandis que l'on suspend l'ancienne au cou du juge qui l'a fait condamner. Ces détails fort cocasses seraient encore aujourd'hui difficiles à reproduire sur scène.
Toutefois, Thomas Mureçay semble avoir réécrit ou remanié cette pièce sous un titre moins catastrophiste : "Le Pois Chiche", et l'avoir lui-même mise en scène au Théâtre du Châtelet en 1947. Hélas, rien ne semble subsister de cette deuxième mouture, pas même l'avis des critiques.
Trop à l'avant-garde de son temps, "La Fin du Monde" n'en demeure pas moins, presque un siècle après sa publication, une curiosité littéraire qui a fort bien vieilli, et où l'indéniable influence d'Alfred Jarry et celle plus discrète de Robert Desnos peuvent se faire agréablement sentir.
Un joyau insolite à redécouvrir et - pourquoi pas ? - à adapter sur les planches, un jour ou l'autre...
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