Dans
Une partie rouge,
Maggie Nelson racontait les ramifications du meurtre de sa tante Jane en 1969, quatre ans avant sa naissance : comment son grand-père, sa mère, sa soeur et elle en ont été affectés, dans la vie en général (les comportements adoptés, l'intrusion dans les rêves…), de même que dans l'expérience difficile d'un procès. Dans Jane, un meurtre, un document qu'on pourrait qualifier d'ouvrage poétique, publié avant
Une partie rouge, elle fait revivre sa tante à l'aide entre autres d'extraits du journal intime de cette dernière, de coupures de journaux, de conversations avec sa mère (la soeur de Jane), lui prêtant une voix qu'elle imagine, évidemment, être la sienne, nous faisant découvrir une jeune fille qui voulait croquer dans la vie, une jeune femme étudiante en droit à l'Université de Michigan, militante pour les droits civiques, qui pensait avoir la vie devant elle, et qui avait fait une demande de covoiturage pour aller chez ses parents leur annoncer et leur faire accepter son mariage prochain avec Phil, un jeune homme juif, alors qu'elle se trouvait en froid avec eux. Elle n'arrivera jamais. Un remarquable travail de la langue qui m'a amené au-delà du fait divers, et fait vivre bien des émotions, dont la colère face à une vie pleine de promesses ainsi horriblement fauchée. Comme l'écrit
Dylan Thomas que Nelson cite (p. 71), dans son poème Do not go gentle into that good night:
“Do not go gentle into that good night
Rage, rage against the dying of the light”