C'est une grande chose que de savoir quand on va mourir. On peut s'organiser et faire de son dernier jour une œuvre d'art.
Récapitulons, petite je voulais devenir Dieu. Très vite, je compris que c’était trop demander et je mis un peu d’eau bénite dans mon vin de messe : je serais Jésus. J’eus rapidement conscience de mon excès d’ambition et acceptai de « faire » martyre quand je serais grande
Adulte, je me résolus à être moins mégalomane et à travailler comme interprète dans une société japonaise. Hélas, c’était trop bien pour moi et je dus descendre un échelon pour devenir comptable. Mais il n’y avait pas de frein à ma foudroyante chute sociale. Je fus mutée au poste de rien du tout. Malheureusement –j’aurais dû m(en douter- rien du tout, c’était encore trop bien pour moi. Et ce fus alors que je reçus mon affectation ultime : nettoyeuse de chiottes.
"Ne dites pas trop de mal de vous-même : on vous croirait."
« Non : s’il faut admirer la Japonaise – et il le faut -, c’est parce qu’elle ne se suicide pas. On conspire contre son idéal depuis sa plus tendre enfance. On lui coule du plâtre à l’intérieur du cerveau : « Si à vingt-cinq ans tu n’es pas mariée, tu auras de bonnes raisons d’avoir honte », « si tu ris, tu ne seras pas distinguée », « si ton visage exprime un sentiment, tu es vulgaire », « si tu mentionnes l’existence d’un poil sur ton corps tu es immonde », « si un garçon t’embrasse sur la joue en public, tu es une putain », « si tu manges avec plaisir, tu es une truie », « si tu éprouves du plaisir à dormir, tu es une vache », etc. Ces préceptes seraient anecdotiques s’ils ne s’en prenaient pas a l’esprit. »
Un Japonais qui s'excuse pour de vrai, cela arrive environ une fois par siècle.
Ce constat me rappela le mot d'André Maurois : "Ne dites pas trop de mal de vous-même : on vous croirait."
Elle marcha sur moi, avec Hiroshima dans l'oeil droit et Nagasaki dans l'oeil gauche.
Non: s'il faut admirer la japonaise -et il le faut-, c'est parce qu'elle ne se suicide pas. On conspire contre son idéal depuis sa plus tendre enfance. On lui coule du plâtre à l'intérieur du cerveau: "Si à vingt-cinq ans tu n'es pas mariée, tu auras de bonnes raisons d'avoir honte", "si tu ris, tu ne seras pas distinguée", "si ton visage exprime un sentiment, tu es vulgaire", "si tu mentionnes l'existence d'un poil sur ton corps, tu es immonde", "si un garçon t'embrasse sur la joue en public, tu es une putain", "si tu manges avec plaisir, tu es une truie", "si tu éprouves du plaisir à dormir, tu es une vache", etc
Ces préceptes seraient anecdotiques s'ils ne s'en prenaient pas l’esprit.
Car, en fin de compte, ce qui est assené à la Nippone à travers ces dogmes incongrus, c'est qu'il ne faut rien espérer de beau.
- Vous êtes ma supérieure, oui. Je n'ai aucun droit, je sais. Mais je voulais que vous sachiez combien je suis déçue. Je vous tenais en si haute estime.
Elle eut un rire élégant :
-Moi, je ne suis pas déçue. Je n'avais pas d'estime pour vous.
Monsieur Haneda était le supérieur de monsieur Omochi, qui était le supérieur de monsieur Saito, qui était le supérieur de mademoiselle Mori, qui était ma supérieure. Et moi, je n'étais la supérieure de personne.
On pourrait dire les choses autrement. J'étais aux ordres de mademoiselle Mori, qui était aux ordres de monsieur Saito, et ainsi de suite, avec cette précision que les ordres pouvaient en aval, sauter les échelons hiérarchiques.
Donc, dans la compagnie Yumimoto, j'étais aux ordres de tout le monde.